Intervention de Sarah Legrain

Séance en hémicycle du mercredi 7 juin 2023 à 15h00
Écoles nationales d'architecture — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSarah Legrain :

…qui ont pourtant montré tous leurs méfaits. Si on lit bien cette proposition de résolution, on y trouve en effet, en guise de remède, tous les ingrédients nécessaires pour empoisonner un service public.

On en ferait presque une recette Marmiton, le « Gâteau empoisonné façon Macron ». Chères écoles, vous prendrez bien un peu de « développement des ressources propres », agrémenté d'un « bonus financier » pour celles d'entre vous qui auront bien atteint les objectifs fixés… Quel est l'ingrédient de base de ces ressources propres à augmenter ? Les frais d'inscription ! C'est une mauvaise plaisanterie ? Les étudiants payent déjà des droits d'entrée supérieurs à ceux des universités, auxquels s'ajoutent des frais de matériel très élevés, dont ils se plaignent.

Mais ne vous arrêtez pas là, chères Ensa, et prenez donc goût aux fonds privés ! On retrouve là un incontournable de la gastronomie libérale. Un service public meurt de faim ? Que ses personnels administratifs en sous-effectifs se mettent tout de suite en chasse de coopérations avec les entreprises ! Car, au fond, quel problème y aurait-il à remettre la survie de nos formations publiques d'architecture – maillon essentiel de la bifurcation écologique – entre les mains des grosses entreprises polluantes du BTP – bâtiment et travaux publics ?

Quant à la fameuse « recherche de voies d'économies », elle assaisonne d'un goût amer les mesures proposées, comme l'ajustement des maquettes pédagogiques ou l'intégration des Ensa au sein d'établissements publics expérimentaux (EPE). Il est à craindre que l'objectif de réduction des coûts ne l'emporte sur la résolution des inégalités d'accès aux droits et des inégalités de statut, aujourd'hui dénoncées.

Enfin, vous ajoutez une cerise sur ce gâteau empoisonné : le renforcement de l'implication des collectivités territoriales, qui ne peut être qu'une provocation. Avez-vous vu l'état de ces dernières ? Avez-vous entendu le cri d'alarme des écoles d'art et de design territoriales, elles aussi en lutte depuis plusieurs mois, et dont certaines sont purement et simplement menacées de disparition, du fait, précisément, du désengagement des collectivités ?

Le collectif des Ensa en lutte appelle à voter contre ce texte, ce que fera le groupe La France insoumise. Il appelle aussi à reprendre le travail de concertation, pour aboutir à des engagements à la hauteur des urgences rencontrées comme du défi écologique.

Alors, chiche ! Pour l'architecture comme pour le reste, finissons-en avec les recettes libérales qui sabotent nos services publics, et osons l'État stratège qui investit et planifie.

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