Intervention de Jean-Yves Le Déaut

Séance en hémicycle du 24 mai 2013 à 15h00
Projet de loi relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche — Avant l'article 42, amendement 570

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Déaut :

Permettez-moi de développer l'argument de cet amendement, qui me paraît important.

Le présent amendement a pour objet de compléter la législation existante relative à l'ouverture d'établissements privés dispensant des formations de santé. L'installation récente en France d'une antenne de l'Université Fernando Pessoa a en effet mis en lumière l'insuffisance du dispositif législatif dans ce domaine qui concerne les politiques publiques de santé. Vous avez d'ailleurs saisi M. le procureur de la République à ce sujet, madame la ministre.

La législation actuelle, très ancienne, prévoit des obligations spécifiques pour les formations de médecine et de pharmacie mais ne traite pas du cas des autres formations de santé, odontologie, kinésithérapie, maïeutique.

Il est proposé de conserver les obligations actuellement prévues pour les formations de médecine et de pharmacie, mais de compléter le dispositif par l'ajout, pour l'ensemble des formations privées de santé, de l'obligation minimale de conclure une convention avec un établissement public de santé soumise à l'approbation du ministère de la santé.

On peut en effet douter des intentions d'une université qui n'a négocié le contenu de sa formation ni avec le Gouvernement français ni au niveau européen et qui recrute des étudiants ayant échoué au concours commun des études de santé, le concours de la PACES. Elle demande des frais d'inscription très élevés et proposera sans doute à ses étudiants de poursuivre leurs études au Portugal moyennant des sommes encore plus élevées qu'aujourd'hui. C'est un véritable contournement de ce que devrait être la coopération au niveau européen en matière d'enseignement supérieur et de recherche.

Si on laisse cette situation prospérer et qu'on ne trouve pas de solution dans l'immédiat, certains étudiants qui seront en deuxième année auront passé les concours dans des disciplines données et on élargira le champ des disciplines en première année. Je crois savoir d'ailleurs que, après avoir installé une première antenne à Toulon, cette université veut en installer une autre à Béziers. On risque de se retrouver par la suite face à une situation ingérable.

L'État doit être stratège. L'enseignement supérieur fait partie de ses compétences. Les conventions avec les établissements privés existent.

Il ne s'agit pas de refuser toute coopération avec les universités étrangères. Je viens d'une région où une université américaine, Georgia Tech, a installé son antenne. Mais cela a été négocié avec la Région, avec l'État et avec les organismes de recherche. Nous avons même réussi à mettre en place la première unité mixte internationale du CNRS.

Il s'agit, en l'espèce, d'un cas totalement différent. Cette officine privée donne l'impression de vouloir passer en force. Elle essaie, sous le nom d'université, de faire du rabattage d'étudiants et de gagner beaucoup d'argent avec cette politique, qui n'est pas une politique de service public.

Voilà pourquoi, après avoir travaillé avec plusieurs parlementaires et avec vos services, madame la ministre, je présente cet amendement. J'espère que son adoption permettra de donner un coup d'arrêt à ce qui est un premier essai de privatisation de l'enseignement supérieur français, privatisation à laquelle nous devons résister avec force.

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