Intervention de Frédéric Cuvillier

Séance en hémicycle du 3 octobre 2013 à 15h00
Dialogue social et continuité du service public dans les transports maritimes — Présentation

Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche :

…l’année 2011 a connu de très fortes perturbations, du fait du contexte propre à l’entreprise. Je rappelle cependant la responsabilité du précédent Gouvernement dans le fait que le dialogue social n’a pas été assumé. Pourtant, les difficultés ne manquent pas, si c’est bien la SNCM dont vous souhaitez parler.

Dans ces conditions, invoquer la forte conflictualité pour justifier le dépôt de cette proposition de loi semble donc totalement infondé : la continuité des services publics de transports maritimes de personnes n’est à aucun moment remise en cause.

L’objectif affiché de cette proposition de loi est de favoriser le dialogue social. Puisqu’il n’y a pas de conflit, c’est qu’il y a un dialogue, et je n’ai eu de cesse de m’entretenir avec l’ensemble des représentants syndicaux et des acteurs du maritime, quelle que soit la compagnie. La question du maritime est très sensible, et mon prédécesseur s’est rendu compte de cette réalité : abandon de SeaFrance, pavillon français, difficultés de Brittany Ferries, difficultés de la SNCM. C’est dire à quel point il est nécessaire d’assurer un dialogue constant, et que l’État assume son rôle.

En ce qui concerne plus particulièrement la Corse, point n’est besoin d’avoir un texte de loi. L’autorité organisatrice a elle-même aménagé des dispositions permettant de favoriser le dialogue social et prévu des dispositions précises au sujet de la continuité des services. Je pense notamment à des modalités de négociation entre syndicats et acteurs du maritime, notamment pour définir quels sont les usagers prioritaires en cas de conflit ou évoquer le service social et solidaire, l’information du public.

De même, les opérateurs titulaires d’une délégation se sont dotés d’accords de prévention des conflits, en concertation avec les syndicats, car c’est par la prévention que l’on peut éviter toute difficulté liée à la continuité des services publics. Lorsque conflit il y a, c’est bien dû à un échec du dialogue, à une absence de discussion et peut-être même de respect du dialogue social. À la CMN, cet accord a été signé par l’ensemble des syndicats dès 2006 et, à la SNCM, non pas sous le précédent Gouvernement, car c’eût été difficile, mais en novembre dernier, alors même que le climat avait changé.

Dès lors, permettez-moi de douter de l’utilité de cette proposition de loi, d’autant que les principaux acteurs, les partenaires sociaux, l’autorité organisatrice ont mis au coeur de leurs préoccupations la nécessité de déterminer les modalités nécessaires à la mise en place d’un service public performant, respectueux des voyageurs et assurant la qualité des prestations grâce au dialogue social.

Sur le plan technique, ce texte est ambigu. Alors que l’exposé des motifs se focalise sur la desserte de la Corse, sans doute parce que c’est votre terre d’élection, la rédaction de la proposition de loi en l’état semble pourtant l’exclure de son champ d’application.

En effet, s’agissant des dessertes maritimes, trois types de collectivités organisatrices de transport sont recensés, les départements, les communes ou groupements de communes assurant la desserte maritime des petites îles, et la collectivité Corse. Or l’article L.5431-1 du code des transports cité dans l’article 2 du texte ne mentionne que les deux premiers types de collectivités, alors qu’il n’est pas fait mention de l’article L.4424-18 du code général des collectivités territoriales, au terme duquel la collectivité territoriale de Corse définit les modalités d’organisation des transports maritimes et aériens entre l’île et toute destination de la France continentale.

Par ailleurs, vous ne parlez que de l’armement des navires. C’est certes un maillon nécessaire du transport maritime, mais il n’est pas le seul.

Nous savons bien que, pour que l’ensemble de l’activité maritime soit pris en considération, il faut traiter les services de sécurité, de sûreté, les capitaineries et autres services maritimes. Souhaitez-vous avoir une vision englobante pour votre texte ?

En réalité, ce texte tente tout simplement de créer un précédent. ne s’agit-il pas, là où le dialogue social, la concertation existent – j’ai illustré mon propos en montrant ce qui existe au sein des compagnies, notamment dans l’une de celles qui assurent la délégation de service public entre la France continentale et la Corse –, d’affaiblir ces procédures de prévention des conflits qui se caractérisent par le respect de la représentativité ?

Par ailleurs, le fait que le champ de votre texte soit si large – il inclut le transport de voyageurs à vocation touristique, le transport de marchandises… – me conduit à m’interroger sur la remise en cause de principes constitutionnels, parmi lesquels le droit de grève.

Je pense qu’il n’y a aucune justification à vouloir légiférer en ce domaine. La précédente majorité avait d’ailleurs tiré cette même conclusion. Mesdames et messieurs les députés de l’opposition, monsieur Mariani, qui, en tant que ministre, avez été un acteur et un témoin privilégié, en 2007, lorsque le précédent Gouvernement a demandé à certains députés de retirer des amendements qui allaient dans ce sens, c’est bien que vous considériez qu’ils n’étaient pas nécessaires.

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