Intervention de Dominique le Guludec

Réunion du 16 octobre 2013 à 16h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Dominique le Guludec :

S'agissant des liens entre L'IRSN et les exploitants, je souligne leur importance : d'eux découlent l'indépendance de l'Institut et de ses jugements, la collaboration, et en définitive l'acceptation de la sûreté. Pour avoir accès aux informations, un dialogue proche avec les exploitants - avec lesquels nous partageons, pour des raisons de coût, certains outils de recherche - s'avère primordial. Il faut aller sur place voir les installations, connaître les conditions locales d'exploitation : l'IRSN ne rend pas ses avis sur dossier. La charte de déontologie en vigueur à l'IRSN examine toutes les situations dans lesquelles le personnel de l'IRSN pourrait être mis en difficulté dans ses relations avec les exploitants. De plus les expertises reposent sur une démarche collective. Et enfin le partage de connaissance avec les exploitants, en amont, ne préjuge évidemment en rien du contenu des avis de l'IRSN. Celui-ci conserve son esprit critique, son indépendance vis-à-vis des exploitants, qu'il a largement démontrés par le passé.

Je rappelle enfin que l'ASN seule, et non l'IRSN, délivre les autorisations d'exploitation : cette séparation des tâches m'apparaît comme un point très important de la gouvernance de notre sûreté nucléaire. Elle permet à l'IRSN de nouer, avec des organismes de recherche et des universités, des échanges et des collaborations à l'international qu'il serait moins aisé d'obtenir en tant qu'autorité de sûreté. Ma modeste expérience, acquise depuis cet été au sein du conseil d'administration de l'IRSN, m'a permis de mesurer l'importance de son rôle au sein de cette gouvernance.

J'ai été interrogée sur le stockage des déchets radioactifs : il s'agit d'un bon exemple de la contribution de l'IRSN à l'expertise et à l'évaluation par des recherches d'amont, entre autres sur la réaction des matériaux ou des sous-sols, qu'il ne faudrait pas confier exclusivement à des industriels. Des experts indépendants et compétents garantissent la fiabilité de ces recherches.

La phase actuelle, nouvelle mais qui semble fonctionner, d'ouverture au débat et à la société civile des projets illustre la transparence qui s'est désormais imposée. Bien sûr l'expertise et la plus-value, que je juge d'excellent niveau, de l'IRSN seul ne suffisent pas : il faut des compétences multiples pour évaluer valablement de tels projets.

Les accidents dans les hôpitaux – pour l'essentiel dans les services de radiothérapie – concernent directement l'IRSN. Ce que l'on peut dire, c'est que par le passé nos hôpitaux n'ont pas accordé aux postes de radiophysiciens, à leur nombre ainsi qu'à leur répartition entre les services, l'attention qu'ils méritaient. Ces accidents – à quelque chose malheur est bon – ont occasionné une vraie prise de conscience sur le rôle de ces spécialistes. Le groupe hospitalier de Bichat dans lequel j'exerce, ne comptait il y a quelques années qu'un malheureux physicien : il compte désormais quatre radiophysiciens et un ingénieur en radioprotection, alors que nous ne pratiquons pas de radiothérapie, même si nous disposons de salles de cathétérisme et de services de radiologie et de cardiologie interventionnelles. Il a donc fallu mobiliser des moyens conséquents, ce qui n'a pas nécessairement été simple, mais nous avons beaucoup appris – et je vois là une réelle similitude avec la démarche de l'IRSN –de ce retour d'expérience.

L'imagerie médicale nous a permis, en grande partie, de gagner en Europe, en trois décennies, cinq années de vie en moyenne, soit près de deux mois par an. L'amélioration de l'offre de soins, la prévention par l'identification des facteurs de risques, mais aussi l'élévation du niveau socio-économique ont également, bien sûr, joué un rôle dans ce phénomène. S'agissant de la qualité des soins, les diagnostics précoces se sont avérés prépondérants : le ratio bénéfices – risques a incontestablement évolué en faveur du premier. Si la solution ne consiste pas à baisser au maximum les doses délivrées au cours des examens, la balle se trouve aujourd'hui à mon sens dans le camp des industriels. Qu'il s'agisse de scanner ou de médecine nucléaire, nous utilisons aujourd'hui, parce que nos outils sont plus sensibles, des doses inférieures de moitié, et parfois des deux tiers, à celles délivrées il y a quelques années encore. Le progrès médical nous permettra d'injecter à l'avenir des doses nanomolaires.

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