Intervention de Thierry Benoit

Séance en hémicycle du 18 septembre 2013 à 15h00
Redonner des perspectives à l'économie réelle et à l'emploi industriel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Benoit :

Vous êtes tout excusé, monsieur le ministre. L’inverse est tout aussi vrai : lorsque vous vous exprimez, nous devons vous écouter. Je souhaite que nous nous en tenions à cet échange de bons procédés et vous en remercie par avance.

Je reprends donc le fil de mon propos, car votre arrivée intempestive m’a finalement embrouillé l’esprit : je disais que nous considérons le choix de la majorité de passer par une proposition de loi est critiquable.

Sur l’étude d’impact, nous considérons qu’il est indispensable d’évaluer précisément les conséquences de votre dispositif sur l’économie réelle que vous prétendez secourir. Le groupe UDI proposera donc que le Gouvernement produise une véritable étude d’impact avant le 1er janvier 2014 pour permettre au législateur d’avoir une vision des conséquences éventuelles en termes de sauvegarde de l’emploi et de pérennisation des sites industriels. À titre d’exemple, il serait intéressant de savoir si un tel dispositif aurait permis, dans le cas de l’entreprise Florange, de sauvegarder tant les emplois que l’activité du site industriel.

Dans le domaine du dialogue social, nous nous étonnons que vous reveniez sur les conditions relatives aux offres de reprises soumises aux sites qui envisagent une fermeture, car ce sujet a été traité dans le cadre de l’accord national interprofessionnel que le groupe UDI a soutenu. Alors que l’encre de cet accord est à peine sèche et que l’ensemble des acteurs économiques avaient accueilli l’annonce d’un choc de simplification avec un grand soulagement, vous vous apprêtez déjà à alourdir davantage le code du travail.

S’il est évidemment légitime de défendre l’emploi dans des entreprises industrielles rentables du territoire national, nous considérons que les obligations nouvelles et les sanctions que vous faites peser sur les dirigeants d’entreprise dans le cadre de la recherche d’un repreneur sont juridiquement fragiles, sources de contentieux, inutiles en termes de sauvegarde de l’emploi et dangereuses sur le plan économique.

Ces contraintes sont tout d’abord juridiquement fragiles, ce que le Conseil d’État a largement démontré en pointant toutes les insuffisances du dispositif de l’article 1er . Si son avis vous a heureusement contraints à revoir votre copie et à l’améliorer en commission, nous craignons cependant que ce texte ne soit une nouvelle source de contentieux et un nouveau facteur de judiciarisation de l’économie. S’il doit créer des emplois, ce sera donc davantage dans les tribunaux et les cabinets d’avocats que dans nos usines.

Je pense notamment à la notion d’offre sérieuse de reprise, qui ne s’appuie sur aucune définition légale mais dont le refus sans motif légitime entraîne des sanctions exorbitantes. Nous vous proposerons de définir plus précisément le caractère sérieux de l’offre en fonction de la capacité du repreneur à garantir la préservation de l’activité et de l’emploi dans l’établissement et à assurer le paiement du prix de cession et des créanciers et de l’intérêt économique qu’elle présente en termes de préservation des filières industrielles ou des savoir-faire. Cette préconisation du Conseil d’État nous semblerait de nature à sécuriser votre dispositif.

Ensuite, les nouvelles contraintes qu’impose ce texte s’appliqueront à tous. Elles auront pour principale incidence d’alourdir les procédures et de rallonger les délais, ce qui pourrait avoir des conséquences contre-productives à l’égard d’éventuels repreneurs, dissuadés par la lourdeur de l’ensemble de ces procédures.

Elles seront, enfin, dangereuses sur le plan économique : si cette loi d’affichage n’apportera aucun résultat en termes d’emploi, elle aura néanmoins des effets dissuasifs sur le volume des investissements tant nationaux qu’étrangers.

La relance de l’activité industrielle française et l’inversion de la courbe du chômage doivent passer par des mesures concrètes en amont même des situations de crise et des plans de relance auxquels font face bon nombre de nos entreprises. Le poids des charges qui pèsent sur le travail doit impérativement être allégé à l’heure où la France occupe la deuxième place dans la zone euro en termes de coût horaire du travail. Nous continuons à considérer que le transfert des charges de la production vers la consommation constitue une condition nécessaire au dynamisme économique de notre pays.

La taxation des produits en lieu et place de la taxation des outils de production, des charges sociales et donc des salaires, permettrait de toucher aussi bien les productions nationales que les importations étrangères – je fais référence, vous l’aurez compris, à la mise en oeuvre d’une réelle TVA sociale. Rappelons-le : les préconisations du rapport Gallois, qui allaient dans ce sens, nous offraient une opportunité quasiment historique de tous nous retrouver sur cet impératif économique que représente la baisse des charges pesant sur le travail.

Nous restons convaincus qu’une baisse immédiate de ces charges à hauteur de 30 milliards d’euros dès l’année 2013 aurait eu des effets déjà perceptibles sur la compétitivité de nos forces productives. Nous déplorons donc que, malgré l’explosion du chômage et la situation critique de la compétitivité de la France, le Gouvernement ait préféré attendre 2014 pour aider, timidement, nos entreprises, à hauteur de 10 milliards d’euros, puis 5 milliards d’euros en 2015 et 2016 avec la mise en place du crédit impôt compétitivité emploi.

Autre impératif essentiel à nos yeux : la question des normes qui entravent trop souvent le développement de nos entreprises et compromettent leur compétitivité. Il faut impérativement alléger la surréglementation française afin de donner les moyens à nos entreprises de lutter à armes égales avec leurs concurrents européens et internationaux.

Enfin, la question de la compétitivité de nos entreprises ne peut être traitée en dehors du cadre européen. Parce qu’elle est trop souvent présentée comme une menace, nous tenons à réaffirmer ici que l’Europe constitue une chance et une source d’innombrables d’opportunités pour le développement de nos entreprises nationales. Le rôle de la France est d’influer sur le destin des entreprises européennes, à travers la mise en place d’un véritable Gouvernement économique de la zone euro, capable d’imposer la réciprocité et de justes accords de libre-échange dans le cadre d’un commerce international équitable.

Profondément européen, le groupe UDI regrette que la France se distingue une nouvelle fois en Europe et dans le monde avec une législation sociale ultra-rigide qui va freiner l’investissement des repreneurs et des entrepreneurs.

Enfin, nous considérons que ce texte participe du climat de défiance généralisée qui est entretenu par le Gouvernement depuis plus d’un an à l’égard des entrepreneurs.

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