Intervention de Marwan Lahoud

Réunion du 16 octobre 2013 à 9h30
Commission des affaires économiques

Marwan Lahoud, président d'EADS France et directeur général délégué du groupe EADS :

Je vais tâcher de répondre à vos interrogations en les regroupant par thèmes.

S'agissant de l'actionnariat, la situation antérieure au changement décidé en mars 2013 lors de l'assemblée générale d'EADS était la suivante : le groupe était alors contrôlé par un pacte d'actionnaire. Daimler détenait alors 22.5 % du groupe et représentait les intérêts de l'Allemagne au sein du groupe. Je rappelle à cet égard que 60 000 à 65 000 salariés du groupe travaillent en Allemagne. Daimler, mandataire du Gouvernement allemand, souhaitait sortir du pacte d'actionnaires. Il en était de même pour le groupe Lagardère. De ce fait, une évolution du capital du groupe était inéluctable. Le pacte d'actionnaires risquait de tomber sans solution de substitution.

Il a donc été décidé de remplacer le pacte d'actionnaire en répondant à la question : « qu'est-ce qui est important pour les États ? ». La réponse des États fut la suivante : ce sont les intérêts de sécurité et de souveraineté. S'agissant de la stratégie du groupe, les États n'avaient qu'un pouvoir de contrôle négatif, en s'opposant à certaines décisions.

Une holding de défense a donc été constituée en France – et son équivalent en Allemagne –, qui se traduit par un certain nombre d'accords de défense et de sécurité entre l'État et l'entreprise. L'accord de sécurité en France protège, d'une part, la force de dissuasion, qui est sanctuarisée. Cette activité ne peut pas être cédée et, si elle l'est, l'État français a un droit de préemption. D'autre part, la participation dans Dassault Aviation fait l'objet d'un pacte d'actionnaire. L'État français dispose d'un droit de préemption dans l'hypothèse où nous souhaiterions céder notre participation de 46 % dans Dassault Aviation. Je rappelle que Dassault Aviation est une société contrôlée à 51 % par la famille Dassault, qui de ce fait la dirige. Notre participation de 46 % dans Dassault Aviation ne peut donc être autre chose qu'un placement financier.

Concernant la stratégie industrielle du groupe et l'implantation de ses activités, celles-ci sont fonction de la compétitivité du territoire et des financements publics lorsqu'ils existent. Le poids de l'État français est ainsi décisif dans le domaine de la défense, largement financé par le ministère de la défense. Tant que la France continuera d'investir dans le M51, EADS fera de même. Mais, à l'époque du pacte d'actionnaire où l'État français détenait 15 % du groupe, les implantations industrielles du groupe n'étaient pas décidées par un chef de bureau du ministère des finances. Elles sont décidées en fonction de critères industriels et économiques, liés à la compétitivité du territoire et aux financements publics lorsqu'ils existent.

Dans l'aéronautique civile, le système des avances remboursables a été très bénéfique pour lancer Airbus, en faisant supporter une part du risque par l'État, dont le retour sur investissement a ensuite été assuré par le succès des programmes financés. Depuis les accords de 1992, le système des avances remboursables est codifié. L'argent public est plus rare et plus cher que l'argent privé. Il est devenu plus facile de lever des financements sur les marchés financiers que d'obtenir une avance remboursable. Celle-ci n'est plus une condition nécessaire au lancement de la fabrication d'un avion. Nous cherchons toutefois à assurer la pérennité des avances remboursables.

Le seul drone de surveillance en service dans les armées française et allemande est construit par EADS. Nous aurions souhaité que la loi de programmation militaire prévoie un programme de développement de drones, mais tel n'a pas été le cas. Nous souhaiterions donc que cette orientation soit retenue lors de la prochaine loi de programmation militaire.

L'évolution des dépenses militaires a un impact sur le groupe, mais cet impact est gérable car il est pris en amont du développement des programmes. Pour prendre un exemple, la France maintiendra sa commande de 50 A400M sur l'ensemble de la durée couverte par la loi de programmation, mais veut revoir la cadence à la baisse. Les conséquences sont donc plutôt en termes de montée en cadence moindre, c'est-à-dire de rythme de développement, que de réduction d'activité.

S'agissant d'Astrium, il est prévu d'avoir une structure plus légère, afin de gagner en efficacité et en compétitivité dans le fonctionnement de la nouvelle division. L'impact de la fusion sur l'activité industrielle sera limité, même si on est à la merci des décisions sur le financement des activités de défense et, du côté civil, de l'espace institutionnel.

Concernant les 10 % de rentabilité, il est important de les replacer dans leur contexte. Le plan Vision 2020 prévoyait déjà un objectif de 10 % de profitabilité en 2015 « hors impact du dollar et avant le lancement de l'A350 ». Cet objectif n'est donc pas nouveau même si le fait de l'afficher en 2008, 2013 ou 2015 n'a pas le même impact. Soyons clairs : le groupe EADS atteindra le seuil de 10 % de rentabilité opérationnelle en 2015.

Une fois constaté l'échec de la fusion avec BAE, les autres dispositions du plan Vision 2020 n'étaient pas atteignables, notamment l'équilibre entre activités civiles et activités militaires, les premières se développant à un rythme nettement plus rapide que les secondes. Le plan Vision 2020 ne reflétait donc plus une stratégie possible pour EADS.

S'agissant des implantations industrielles hors Union européenne, je rappellerai que l'essentiel de nos effectifs et de notre développement se fait en Europe. Notre implantation industrielle en Chine est motivée, non par des raisons de coût de la main-d'oeuvre, mais par des raisons d'accessibilité au marché chinois. L'acquisition d'avions par nos partenaires chinois est conditionnée au développement d'une activité de sous-traitance en Chine.

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