Intervention de Yves Fromion

Réunion du 23 octobre 2013 à 16h20
Commission élargie : finances - défense nationale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Fromion :

Monsieur le ministre, ce budget s'inscrit dans la continuité de la réflexion menée par le Livre blanc. Il constitue le « point d'entrée » de la loi de programmation militaire. D'un côté, nos ambitions politico-stratégiques restent entières – dans ce domaine, ce Livre blanc ne diffère guère du précédent si ce n'est en exprimant des ambitions supplémentaires et légitimes, comme celles concernant la cyberdéfense – ; de l'autre, les capacités budgétaires consacrées à la défense se réduisent constamment.

Je vous concède que cette dernière tendance n'est pas nouvelle, mais nous en sommes arrivés à un point de rupture. Parler aujourd'hui de déclassement serait excessif, l'opération au Mali en témoigne, mais nous ne pouvons pas nous dissimuler que nous prenons ce chemin. En prétendant le contraire, nous nous bercerions d'illusions ; nous construirions une ligne Maginot virtuelle dans les esprits de nos concitoyens.

Nous faisons un pas de trop dans le découplage entre nos ambitions et les moyens que nous y consacrons. Les militaires sont inquiets à juste titre car ils vivent au quotidien les ruptures capacitaires. Il est bien beau de porter au tableau d'effectifs et de dotations un nombre élevé de chars ou d'avions, mais il faut faire le compte de la réalité des équipements dont les militaires peuvent vraiment se servir : l'écart est considérable ! Une flottille de l'aéronavale a ainsi fonctionné pendant quatre mois avec un seul hélicoptère Lynx en état sur sept ! Un jeune pilote sorti de l'école affecté sur Puma n'a pas réussi à effectuer quatorze heures de vol en six mois ! Notre armée est professionnalisée depuis 1997, et les professionnels que sont nos militaires ont besoin d'un outil de travail que seule la nation peut leur donner. C'est notre devoir ; nous ne pouvons pas y faillir !

Nos militaires ressentent un véritable sentiment d'injustice. Vous avez décidé de supprimer 24 000 postes supplémentaires alors qu'on se demandait comment réduire les 10 000 postes restant et qu'on recrute, par ailleurs, 60 000 enseignants supplémentaires. Comment voulez-vous que les militaires ne ressentent pas cela comme une agression ?

S'agissant de la construction budgétaire, chacun avance des chiffres différents. Il serait intéressant d'en avoir un état exact au terme de la loi de finances 2013. On doit bien avoir une idée aujourd'hui du montant du report sur l'année prochaine et surtout de la hauteur des gels et des surgels. Il y aurait jusqu'à 4,2 milliards d'euros de reports. C'est intenable !

Quels moyens prévoyez-vous pour compenser, au cas où elles ne rentreraient pas, les recettes exceptionnelles ou extrabudgétaires que vous avez prévu d'apporter à la loi de finances pour 2014 ?

Vous avez prévu 200 millions d'euros de recettes liées à des ventes immobilières. Or, selon l'engagement n° 23 du candidat François Hollande, les terrains disponibles devaient être mis gratuitement à la disposition des collectivités locales pour des opérations immobilières.

Dans le cadre de la participation des ministères à la réduction des déficits, le ministère de la défense doit apporter 100 millions sur les 900 millions prévus au niveau interministériel. Franchement, après les efforts que les militaires ont consentis au Mali et ailleurs, après les réductions successives de leur budget, est-il décent de leur demander de se sacrifier encore à cette hauteur ? Cette disposition doit être supprimée de la loi de finances !

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