Intervention de Emeric Bréhier

Séance en hémicycle du 5 novembre 2013 à 21h30
Loi de finances pour 2014 — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmeric Bréhier, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation :

…menée par l’ancien Gouvernement a contribué à faire baisser le nombre de doctorants de près de 5 % entre 2009 et 2012, et puis il y a la fracture très nette entre les thèses financées et celles qui ne le sont pas, et il faut aussi noter l’exposition accrue au chômage des docteurs, de trois points supérieurs aux titulaires d’un master. Le bénéfice réel procuré par les CIFRE, dispositif bien connu, et les écoles doctorales n’est, hélas, pas encore en mesure de renverser cette situation.

Enfin, et c’est sans doute un élément essentiel, le diplôme de docteur est peu valorisé dans notre pays. Cette faible valorisation amène d’ailleurs les entreprises à préférer les ingénieurs et – il faut le regretter – elle a souvent poussé les partenaires sociaux à ne pas engager les négociations de branche faute d’une normalisation évidente, d’où le nécessaire rappel dans la loi dont nous avons débattu avant la pause estivale.

Quant à la haute fonction publique, son organisation et ses modalités de recrutement sur concours avec épreuves sur programme sont peu adaptées pour les titulaires d’un doctorat.

Si le constat est assez sombre, les dizaines d’heures d’audition réalisées ont permis de mettre en avant des propositions permettant d’envisager l’avenir des doctorants et des docteurs avec plus de sérénité.

Trois axes pourraient être explorés.

Le premier concerne la nécessaire protection juridique et sociale pendant la préparation d’un doctorat, expérience professionnelle qui devrait être mieux reconnue. Il comporte aussi divers autres sujets : remise à plat du système de répartition des allocations de recherche dont les auditions ont souligné la grande opacité ; responsabilisation de certains directeurs de thèses trop portés à en accepter un trop grand nombre ; dotations supplémentaires – même dans le cadre budgétaire que nous connaissons – de contrats doctoraux attribuées aux établissements engagés dans une politique d’amélioration de la formation doctorale ; augmentation du nombre de contrats doctoraux et surtout de CIFRE, notamment auprès des collectivités territoriales qui ignorent bien souvent ces dispositifs.

Deuxième axe de réflexion : l’enjeu de la professionnalisation des doctorants. Il s’agit notamment de permettre aux écoles doctorales de disposer d’indicateurs de suivi des doctorants, en généralisant les bonnes pratiques constatées ou encore en limitant le nombre de thèses encadrées par une seule personne.

Parallèlement, il importerait de normer davantage le diplôme afin de permettre au secteur privé de mieux percevoir les compétences et qualités requises pour la réussite d’un doctorat.

Le dernier axe est celui, capital, de la carrière des docteurs. Pour que ce diplôme puisse enfin être reconnu à sa juste valeur, trois éléments semblent incontournables : ne plus considérer le statut d’enseignant-chercheur comme le débouché exclusif et naturel du doctorat ; élargir l’accès à la haute fonction publique, en particulier territoriale ; valoriser les recrutements de docteurs par le secteur privé.

La difficulté à percevoir ce diplôme de docteur induit nombre de conséquences. À l’heure où les questions de compétitivité et de création de valeur ajoutée sont cruciales pour notre pays, la prise en compte des docteurs est un enjeu important.

C’est fort de ce rapport, que sur ma proposition et contre l’avis de mon cher collègue Patrick Hetzel, la commission des affaires culturelles et de l’éducation a émis un avis favorable à l’adoption des crédits du ministère.

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