Intervention de Najat Vallaud-Belkacem

Réunion du 6 novembre 2013 à 16h30
Commission spéciale pour l'examen de la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel

Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes2 :

Il est inacceptable que des personnes engagées dans un processus de changement de sexe n'aient d'autre choix que la prostitution pour subvenir à leurs besoins ; tout doit être fait pour faciliter la transition et leur insertion professionnelle et pour combattre la stigmatisation dont elles sont l'objet. Nous devons aussi faciliter la modification de leur état-civil et je me suis engagée au Sénat à ce que des dispositions en ce sens figurent dans le projet de simplification du droit, notamment de l'état civil, que vous examinerez au premier trimestre 2014. Mais ces questions sont distinctes de celle dont nous débattons aujourd'hui. Des dispositions relatives aux transsexuels ne peuvent être envisagées dans le cadre d'un texte relatif à la prostitution – vous imaginez, si on abordait la question des trans dans le cadre de la prostitution, ce que vous pourriez dire ! Cette proposition de loi doit valoir pour tous, femmes, hommes, transsexuels et transgenres, dès lors qu'ils sont victimes de la prostitution.

Décider de responsabiliser les clients des prostituées est tout sauf un choix de facilité. Délégitimer la demande masculine de prostitution au point de poursuivre les clients n'est rien moins qu'un renversement de perspective historique, cette proposition de loi est une révolution, de ce point de vue. La pénalisation des clients signerait, dites-vous, l'échec des politiques publiques d'accompagnement social et de réinsertion des personnes prostituées – mais y en a-t-il eu ? On a plutôt vu une forme d'indifférence à leur sort, dont témoigne la diminution du financement des associations qui les accompagnent. Nombreux sont ceux qui composent sans états d'âme avec la prostitution. Le fait de mettre en lumière qu'il s'agit, à 90%, de traite d'êtres humains et de créer un outil de financement ambitieux destiné à faciliter la sortie de la prostitution marque un tournant. Mais se limiter à abroger le délit de racolage tout en augmentant les fonds destinés à l'accompagnement social, loin de faire reculer la prostitution, serait un mauvais signal donné aux trafiquants, que l'on semblerait encourager à agir. Or notre projet commun n'est pas seulement que la prostitution ne progresse pas : c'est qu'elle recule. Voilà pourquoi la proposition de loi me paraît équilibrée.

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