Intervention de Pierre-Alain Muet

Réunion du 7 novembre 2013 à 15h00
Commission élargie : Écologie, développement et mobilité durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Alain Muet, président :

Monsieur le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, M. François Brottes, M. Jean-Paul Chanteguet et moi-même sommes heureux de vous accueillir pour examiner les crédits du projet de loi de finances (PLF) pour 2014 consacrés à la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et aux comptes d'affectation spéciale (CAS) qui lui sont rattachés. Nous étudierons d'abord les politiques de l'écologie et du développement durable, avant de nous pencher, avec M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, sur les transports, la mer et les affaires maritimes.

M. Hervé Mariton, rapporteur spécial pour la prévention des risques et pour la conduite et le pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer. Monsieur le ministre, quelle est votre évaluation de la capacité d'expertise de votre ministère ? Dans un rapport d'octobre 2011 pertinemment intitulé Le difficile chemin de la taxe poids lourds, j'avais souligné que la procédure choisie par l'État s'avérait d'autant plus nécessaire que les facultés d'expertise de votre administration déclinaient. Quelles mesures comptez-vous prendre pour renforcer vos possibilités en la matière ? Pourriez-vous nous indiquer la nature de l'évaluation dont le Parlement disposera lorsqu'il sera saisi du débat sur le schéma national des infrastructures de transport (SNIT) ?

La première partie du PLF – que l'Assemblée nationale a adoptée – contient des dispositions utiles, mais insuffisantes, d'encouragement à la rénovation thermique des bâtiments. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) assume le rôle de guichet dans ce domaine : quelles instructions lui donnerez-vous pour que les maigres moyens accordés à cette politique soient efficacement employés ? Ce guichet, qui va au-devant des acteurs concernés – notamment les ménages –, sera-t-il adapté pour répondre à cet enjeu du nombre ?

S'agissant de la prévention des risques, pourriez-vous nous décrire la mise en oeuvre du choc de simplification dans votre département ministériel ? Les dispositions réglementaires de votre champ de compétence proviennent largement du droit de l'Union européenne : mettez-vous de l'énergie à appliquer ce choc dans les textes européens – et si tel est le cas, quelles initiatives avez-vous prises ? – ou comptez-vous vous en servir comme d'un prétexte pour ne pas avancer ? Ne pourrait-on pas imaginer des formes de rescrit administratif qui inciteraient l'État à prendre des engagements sur la nature et le délai des procédures opposées aux demandeurs ?

La baisse des effectifs de votre ministère s'accentue, puisque neuf fonctionnaires sur dix partant à la retraite ne sont pas remplacés, contre un sur deux auparavant : veillez-vous à ce que cette réduction n'entraîne pas un allongement des délais, mais bien une simplification des procédures ?

Votre ministère participe aux mauvaises pratiques de débudgétisation – en particulier sur l'élargissement des compétences du Fonds Barnier : cela s'explique-t-il par des raisons techniques ou par commodité budgétaire ?

Comment justifiez-vous la suppression d'une trentaine d'emplois à l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) compte tenu de l'importance des missions assurées par cette structure ? Celle-ci compensera la baisse de la dotation budgétaire par une ponction sur son fonds de roulement : cette stratégie est-elle tenable dans la durée ? Alors que le Gouvernement persiste malheureusement à vouloir fermer la centrale de Fessenheim, l'exécutif devrait à tout le moins rendre compte devant la représentation nationale des coûts engagés. Ces dernières semaines, des échanges se sont tenus par voie de presse sur l'évolution des durées d'amortissement des centrales : quelles instructions recevra le représentant de l'État au conseil d'administration d'EDF au sujet de cet enjeu économique et de sûreté nucléaire aux conséquences budgétaires et fiscales importantes ?

M. Marc Goua, rapporteur spécial pour l'énergie et pour le compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ». Le programme 174 « Énergie, climat et après-mines »aura pour priorités en 2014 d'amorcer la transition énergétique, d'amplifier la lutte contre le changement climatique et la pollution atmosphérique, et de garantir la gestion économique et sociale de l'après-mines.

Le projet de loi de finances pour 2014 prévoit de porter les autorisations d'engagement (AE) de ce programme à 592,2 millions d'euros et les crédits de paiement (CP) à 597,5 millions. À périmètre constant, cela constitue une baisse des crédits légèrement supérieure à 6 % ; cette diminution porte essentiellement sur l'action « Gestion économique et sociale de l'après-mines »et découle de la diminution naturelle du nombre des ayants droit de l'après-mines.

Au programme 174, s'ajoutent à titre exceptionnel pour 2014 les programmes 403 et 404, qui visent à orienter une part des nouveaux investissements d'avenir vers les projets permettant de mener à bien la transition énergétique et écologique, pour un montant d'investissement total de 1,57 milliard d'euros.

Il convient également d'examiner le CAS dédié au « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (FACÉ). Le projet de budget du compte prévoit des recettes constantes, évaluées à 377 millions d'euros pour 2014, dont 98 % sont affectées au programme 793 sur l'électrification rurale ; celui-ci contient diverses actions visant principalement au renforcement et à l'extension des réseaux.

L'énergie nucléaire représente aujourd'hui environ 75 % de la production électrique, cette part devant décliner à 50 % à l'horizon 2025. Pour autant, la possibilité de prolonger la durée de vie des centrales nucléaires doit donner lieu à une réflexion approfondie ; en effet, l'arrêt de tous les réacteurs du parc actuel, après le même nombre d'années de fonctionnement, poserait de nombreux problèmes. Il serait préférable, pour ne pas dire indispensable, de répartir les investissements liés au renouvellement du parc sur une période plus longue, en prolongeant la durée de vie de certains réacteurs aussi longtemps que l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) les jugera sûrs.

Je suis néanmoins conscient que le nucléaire ne doit pas constituer une échappatoire au développement des énergies renouvelables ; il est à ce titre essentiel d'atteindre l'objectif européen de produire 23 % de l'énergie à partir de sources renouvelables en 2020. Dans cette optique, le Fonds chaleur constitue un outil dont l'efficacité est reconnue par l'ensemble des acteurs de la filière et dont la dotation actuelle – 220 millions d'euros – est jugée insuffisante. Monsieur le ministre, envisagez-vous, pour les années à venir, un renforcement substantiel de ce dispositif ?

Dans les autres domaines, l'État doit poursuivre son soutien aux filières bois, photovoltaïque, hydraulique et éolienne qui font aujourd'hui face à des défis importants. Dans ce cadre, je serai très attentif à la mise en oeuvre prochaine du Fonds stratégique de la forêt et du bois, et à la méthode de renouvellement des concessions hydroélectriques – dans ce domaine, monsieur le ministre, où en sommes-nous et quels ont été les choix retenus ?

Le débat sur la transition énergétique ne peut être séparé de celui sur la tarification de l'énergie ; en effet, le coût relativement bas du kilowattheure français devrait augmenter, et nous devrons consentir des investissements considérables dans les prochaines années pour financer la production énergétique de demain. Aussi, le niveau de la contribution au service public de l'électricité (CSPE), qui s'élevait à 13,5 euros par mégawattheure en 2013, augmentera pour atteindre 20 euros en 2015. À ce niveau, un élargissement de l'assiette ne devrait-il pas être envisagé ? Il pourrait s'agir de faire financer l'ensemble des coûts de la transition énergétique – et de son accompagnement par les tarifs sociaux – par l'ensemble des consommations d'énergie, et non pas seulement par la seule consommation d'électricité. Dès lors, monsieur le ministre, comptez-vous élargir l'assiette de la CSPE ?

Il est crucial de parvenir au développement d'une économie et d'une société sobres et efficaces énergétiquement. Le débat national sur la transition énergétique (DNTE) a posé un objectif ambitieux de réduction de 50 % de la consommation énergétique finale d'ici à 2050. Un plan de rénovation énergétique de l'habitat (PREH) a été mis en place, avec comme cible la rénovation énergétique de 500 000 logements à l'horizon 2017 ; pour parvenir à de tels résultats, plusieurs mesures seront mises en oeuvre : mobilisation de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) et du programme « Habiter mieux », réduction du taux de TVA pour les travaux de rénovation énergétique dans les logements, et recentrage du dispositif du crédit d'impôt développement durable (CIDD) et de l'éco-prêt à taux zéro – éco-PTZ.

Des interrogations demeurent toutefois sur le futur Fonds national de garantie de la rénovation énergétique, qui doit favoriser la mobilisation des organismes de financement en faveur de la rénovation ; j'aimerais attirer l'attention de M. le ministre sur ce point, et lui demander s'il peut apporter des précisions sur ce dispositif auquel doit participer la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

J'émets un avis favorable sur le vote des crédits de cette mission.

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