Intervention de Brigitte Allain

Réunion du 15 janvier 2014 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Allain, rapporteure :

Rassurez-vous, monsieur Martial Saddier : nous sommes bel et bien ici pour débattre ! Je remercie Sophie Errante pour ses précisions sur l'environnement et les problèmes de santé.

Nous ne pouvons que nous féliciter, monsieur Martial Saddier, de voir que ces questions seront traitées à l'horizon 2020 ou 2022 plutôt qu'à l'horizon 2050 : cela signifie, en définitive, que les décisions ne sont pas reportées sine die. Le plan Écophyto avait sans doute des objectifs louables mais, faute de moyens suffisants, ils ne seront pas atteints, s'agissant en particulier d'une diminution de moitié de l'usage des pesticides par la profession agricole d'ici à 2018. Le projet de loi d'avenir pour l'agriculture, voté hier par notre assemblée, comporte des outils qui permettront d'atteindre ces objectifs, et le présent texte en étend les principes aux particuliers et aux collectivités publiques.

Monsieur Yannick Favennec a insisté sur la dimension non agricole de cette proposition de loi et rappelé la souplesse du Sénat, lequel, sur 196 votes exprimés, s'est prononcé à 192 voix pour et 4 voix contre. Un tel consensus n'aurait pas été possible sans un vrai débat.

Le message politique est fort, bien entendu : faut-il s'étonner que le groupe écologiste dépose, dans le cadre de sa niche parlementaire, des textes marqués par de vrais enjeux écologiques ? Il n'est pas moins normal, ce me semble, que notre commission soit saisie de tels textes.

S'agissant des délégations au secteur privé, monsieur Carvalho, le texte précise bien que les collectivités ne doivent pas utiliser ou « faire utiliser les produits » visés : l'hypothèse d'une délégation à un tiers est donc bien prise en compte.

Monsieur Paul Molac a rappelé que 40 % des communes ont d'ores et déjà adopté le plan « zéro phyto » : cela signifie aussi que 60 % restent à convaincre et qu'il faut fixer des dates butoirs, comme ce fut le cas pour l'accessibilité des lieux publics. Certains élus locaux poussent des hauts cris, mais je rappelle que ces dates, dont l'échéance laisse le temps aux collectivités pour se préparer, sont connues depuis longtemps. La proposition de loi a aussi pour objectif de convaincre les élus encore réticents.

Il est vrai, monsieur Jacques Krabal, que les matériels et les pratiques ne sont pas encore adaptés aux normes et réglementations en vigueur. L'interdiction des produits phytosanitaires, dont la dangerosité a souvent été minimisée, réglera précisément le problème. Sur ce point aussi, la future loi constituera un signal fort.

On l'a observé, souvent le bon sens prévaut, y compris pour les forêts ; mais l'homme est ainsi fait que même des mesures de bon sens doivent être inscrites dans la loi.

Les démarches prévues supposent en effet des choix techniques et de la formation, mais certaines observations sur les valeurs respectives des produits phytosanitaires et de la binette ne laissent pas de m'étonner.

Monsieur Jean-Yves Caullet m'a interrogée sur les espaces forestiers. Lors des auditions, les dirigeants de l'Office national des forêts m'ont indiqué que les produits phytosanitaires n'y étaient utilisés que de façon très rare. La proposition de loi, du reste, prévoit cette utilisation, ainsi que la possibilité, pendant les traitements, de fermer la promenade au public dans les forêts dont ce n'est pas la vocation principale. Une telle disposition me semble nécessaire au vu des risques avérés que présentent les produits phytosanitaires pour les voies respiratoires ou la peau.

Monsieur Jacques Kossowski a évoqué le bilan préoccupant des contrôles. Que les choses soient claires : toute infraction à la loi est sévèrement punie. C'est tout le sens de l'article 2 : la loi n'est vraiment respectée que si les sanctions sont dissuasives. Le montant de l'amende est un signal fort adressé, non seulement aux collectivités, mais aussi aux distributeurs.

Le droit, dans le domaine dont nous parlons, est amené à évoluer, et le groupe écologiste y prendra sa part à travers d'autres textes ; reste qu'aujourd'hui, l'opinion n'est pas prête à voir appliquée l'interdiction des produits phytosanitaires sur les terrains de football ou dans les cimetières. Certaines collectivités ont trouvé des solutions dans le cadre des plans « zéro phyto » : il leur faudra les appliquer sur tous les types de terrains. Bref, les choses évolueront.

Monsieur François-Michel Lambert a rappelé le rôle de notre commission sur des textes de cette nature, et précisé que celui dont nous discutons est l'aboutissement d'une trajectoire. Je le répète : on a parfois sous-estimé, y compris de bonne foi, les dangers des pesticides. Aujourd'hui, de nombreux rapports mettent en évidence leur danger, pour la santé humaine et animale comme pour l'environnement. Peut-être aurions-nous dû fermer le marché, au moins pour les usages non professionnels : a-t-on jamais envisagé d'ouvrir celui de la pénicilline ou des antibiotiques ? Cette proposition de loi met fin à trente ans d'erreur.

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