Intervention de Patrick Hetzel

Séance en hémicycle du 19 février 2014 à 21h30
Développement et encadrement des stages — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Hetzel :

Des dispositions antinomiques, disais-je, avec la volonté de développer massivement l’offre de stages. Hélas, rien dans la discussion en commission n’a permis de lever ce problème majeur, loin de là.

Permettez-moi de rappeler ici que le cadre national des formations supérieures de licence, licence professionnelle et master, qui fait l’objet d’un projet d’arrêté à paraître prochainement, rend obligatoires les stages en licence professionnelle et en master. Or, aujourd’hui, on estime que seuls près de 50 % des étudiants effectuent un stage en master. Avec les nouvelles orientations du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, il faudra doubler le nombre de stages. Comment y arriver avec un texte qui fait peser de telles contraintes sur les entreprises ? Je suis très surpris que vous défendiez ainsi ce texte : nous sommes vraiment face à des contradictions majeures.

Il faut rappeler que le stage est déjà obligatoire dans bon nombre de cursus : études d’ingénieur, d’avocat, carrières médico-sociales, de commerce et de management, de sciences politiques, de journalisme. L’offre quantitative doit donc demeurer suffisante pour permettre aux jeunes une première expérience du milieu professionnel et la validation de leur diplôme.

Ces éléments étant posés, venons-en précisément aux mesures de cette proposition de loi que nous considérons comme dangereuses pour le développement de l’offre de stage et inacceptables pour maintenir un bon équilibre entre les parties prenantes concernées : les stagiaires, les organisations qui les accueillent et les établissements de formation.

Première mesure totalement inadaptée : le principe d’une limitation du nombre de stagiaires en fonction des effectifs et la création d’une amende administrative de 2 000 à 4 000 euros par stagiaire. Quelle est la cohérence de la politique globale de développement de l’accueil des jeunes en entreprise ? Une telle démarche est sous-tendue, à l’évidence, par la volonté de punir. La conséquence de ce plafonnement du nombre de stagiaires couplé à la baisse du nombre de contrats en alternance ne pourra conduire qu’à une aggravation du taux d’accès à l’emploi des jeunes. Il faut veiller à ne pas développer sur le sujet qu’un discours dénonçant des abus dont la mesure s’avère aléatoire. Les quelques cas existants ne peuvent servir de prétexte pour remettre en cause la quasi-totalité des stages, qui se passent de manière positive.

Deuxième catégorie de mesures tout aussi inadaptées : celles qui tendent à assimiler le stage à un contrat de travail et aggravent la charge administrative des entreprises. En effet, le renforcement des contrôles de l’inspection du travail va contribuer à dissuader les employeurs de prendre de nouveaux stagiaires.

De la même façon, cette proposition de loi contient des dispositions qui suscitent des interrogations quant à leur portée. Citons la limitation de la durée des stages à six mois, déjà inscrite dans le code de l’éducation depuis la loi Cherpion, ou encore la possibilité de prolonger le stage en cas d’interruption pour certains motifs et la possibilité de valider la période de formation même si la durée prévue dans le cursus n’est pas atteinte.

La philosophie sous-jacente de cette proposition de loi, c’est une vision très négative du monde du travail.

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