Intervention de Bruno Le Roux

Séance en hémicycle du 24 septembre 2014 à 15h00
Déclaration du gouvernement sur l'intervention des forces armées en irak et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Le Roux :

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, chers collègues, il y a maintenant un an – le 4 septembre 2013 – nous nous réunissions ici même pour débattre de la Syrie. Comme aujourd’hui, chaque groupe politique avait pu s’exprimer et j’avais, au nom des députés socialistes, républicains et citoyens, affirmé que la situation dans ce pays portait en germe de nouvelles menaces pour la sécurité collective. J’aurais alors voulu être dans l’erreur !

Certes, depuis, l’arsenal chimique du régime de Bachar Al-Assad a été démantelé sous la pression internationale, notamment grâce à l’action diplomatique de la France. Mais sa politique effroyable s’est poursuivie à l’encontre de la population civile, poussant le cynisme jusqu’à faire le jeu des islamistes les plus radicaux pour défaire l’opposition modérée. Ainsi, à l’heure où nous parlons, les peuples du Tigre et de l’Euphrate sont pris entre le marteau et l’enclume, entre une dictature de la terreur d’un côté, et un califat de la barbarie de l’autre.

Face à cette situation, le Président de la République, chef des armées, a décidé, au nom de la France, de répondre favorablement à l’appel à l’aide que lui ont lancé les autorités irakiennes pour lutter contre Daech, un mouvement terroriste dont la cruauté n’a d’égale que la prédation territoriale. Contrôlant aujourd’hui près d’un tiers des terres syriennes et irakiennes, il agit tel un rouleau compresseur emportant toute opposition sur son passage, avec pour objectif de s’emparer de l’ensemble des pays du Levant : l’Irak, la Syrie, la Jordanie, le Liban.

Grâce à sa mainmise sur de grands axes de communication, sur des puits de pétrole, sur des barrages hydrauliques qui approvisionnent les populations en eau et en électricité, ou encore sur du matériel militaire sophistiqué dont disposaient les forces irakiennes, l’organisation dispose de moyens substantiels et renforce chaque jour son influence sur les populations locales. C’est la raison pour laquelle la France demande au Conseil de sécurité des Nations unies de continuer à prendre des sanctions – et nous avons raison de le faire –, comme le gel des avoirs ou l’interdiction de voyager, contre les individus qui financent cette organisation terroriste.

Forte de trente mille combattants, elle est aussi rompue aux coups de force militaires qu’aux sinistres et sanguinaires coups d’éclats médiatiques. Par ses actions de propagande sur internet, elle incite de nouvelles recrues à quitter l’Afrique du Nord, le Caucase, l’Europe, en tout plus de quatre-vingts pays dont l’Australie et les États-Unis, pour venir grossir ses rangs. À leur retour, ceux-ci représentent un risque considérable pour leur pays d’origine, comme nous l’avons malheureusement constaté et longuement débattu lors de l’examen du projet de loi de lutte contre le terrorisme que nous avons adopté la semaine dernière, et qu’examinera sous peu le Sénat.

Nous devons, chacun à notre niveau, rappeler sans cesse – M. le Premier ministre vient de le faire : je veux le faire à mon tour, à cette tribune – que malgré le nom qu’elle s’est donnée, l’organisation terroriste Daech n’est ni un État, ni le représentant de l’islam. Non, le prétendu choc des civilisations, qui opposerait un bloc occidental à un bloc musulman, n’existe pas – les Français et tous les Européens doivent l’entendre. Les communautés musulmanes de tous les pays, y compris le nôtre, ont dénoncé et condamné, à juste titre, les innombrables exactions commises par Daech, qui n’obéissent qu’à une seule loi : celle de la surenchère dans la barbarie.

Que reste-t-il d’humanité à des personnes qui enlèvent et décapitent des civils, forcent des femmes, des enfants et des hommes sans défense à l’exode dans des montages arides, sans vivres, en raison de leur ethnie ou de leur confession ? De quel califat s’inspirent-elles pour exiger qu’on leur prête allégeance, alors qu’elles piétinent, à chacun de leurs actes odieux, les principes fondamentaux de la religion dont elles disent s’inspirer, dont le caractère sacré de la vie ? Si choc il y a, ce n’est pas entre l’Occident et l’islam, mais entre l’humanisme et la barbarie, entre la liberté et le joug totalitaire que représente cette organisation.

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