Intervention de Valérie Rabault

Séance en hémicycle du 14 octobre 2014 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 - projet de loi de finances pour 2015 — Présentation commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Rabault, rapporteure générale de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire :

Vous proposez même, chers collègues, de supprimer les baisses que nous avons envisagées !

Alors, je ne peux que vous inviter à faire preuve d’un peu de cohérence entre ce que vous défendez ici, dans l’hémicycle, et ce que vous affichez à l’UMP ! Ainsi, chacun y verra beaucoup plus clair et notre démocratie en sortira grandie.

Pour conclure, s’agissant des dépenses, je considère que l’effort qui doit être réalisé est ambitieux et qu’il est en phase avec ce que nos partenaires européens attendent de nous – non dans le sens où il s’agirait de répondre à je ne sais quelle injonction de la part de l’Union européenne, mais parce qu’il y va de notre économie, de la France et du respect des engagements que nous prenons.

Je considère même que ces efforts en matière de dépenses nous permettront sans doute d’aller au-delà des 0,2 % d’efforts structurels qui sont affichés dans ce PLF pour 2015.

Maintenant, un petit mot sur les recettes afin, notamment, de battre en brèche quelques idées fausses.

Entre 2013 et 2014, le nombre de foyers fiscaux imposables a baissé d’un million. Ce PLF va plus loin pour redonner du pouvoir d’achat aux Français. En effet, son article 2 vise à faire entrer nos compatriotes plus tard dans l’impôt sur le revenu.

Ainsi, une famille qui compte deux parents et deux enfants commençait à payer l’impôt lorsque son revenu annuel s’élevait à 27 702 euros ; avec l’article 2 qui, je l’espère, sera voté, elle n’entrera dans l’impôt que si son revenu annuel dépasse les 39 959 euros.

Faire sortir des Français de l’IR ou ne pas les y faire entrer se fera-t-il au détriment des autres contribuables ? La réponse est non.

Si, aujourd’hui, vous vous situez dans une tranche d’imposition inférieure à 14 %, l’impôt sur le revenu baissera. Si la tranche d’imposition est supérieure à 14 %, à revenu constant, l’IR de 2015 sera identique.

Au total, ce sont 9 millions de foyers fiscaux qui bénéficieront de cette mesure, soit un quart des foyers fiscaux français, sachant que sur les 36 millions de foyers fiscaux que compte notre pays, la moitié est imposable. Cela représente un coût budgétaire pour l’État de 3,167 milliards d’euros.

Avec cette baisse d’impôt proposée par le Gouvernement dans l’article 2, comment parvenons-nous à l’équilibre budgétaire ?

Pour 2014, les recettes de l’IR devraient s’élever à 68,9 milliards d’euros. Pour 2015, si nous faisons l’exercice, nous ôtons à cette somme 3,167 milliards liés au coût de la mesure, 100 millions au titre de la réforme du régime des plus-values immobilières de cessions de terrains à bâtir et 300 millions d’euros en raison de l’impact sur l’IR de la dernière loi sur les retraites. Nous procédons au rééquilibrage grâce au 1,3 milliard que rapporte la mesure exceptionnelle mise en oeuvre au mois de septembre ainsi qu’au 1,8 milliard de hausse naturelle.

Au total, les recettes prévues par ce PLF atteindront 292,6 milliards d’euros en 2015, dont 278,9 milliards d’euros de recettes fiscales.

Il s’agit bien entendu de prévisions et même si cette année – je dois le souligner, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État – elles sont plus prudentes que les années précédentes, il convient de rester toujours vigilant en la matière.

Un dernier mot s’agissant du soutien à l’investissement.

Je voudrais profiter de cette tribune pour dire quelques mots du CICE puisque nous avons reçu deux rapports en amont de ce PLF : d’une part, le deuxième rapport annuel du comité de suivi institué par la loi ; d’autre part, le rapport de notre collègue Yves Blein, au nom de la mission d’information créée par la conférence des présidents.

Le coût budgétaire du CICE devrait être de 6,5 milliards d’euros en 2014, ce qui est un tout petit peu inférieur à la prévision initiale et qui s’explique notamment par une dynamique de l’impôt sur les sociétés due à la conjoncture.

Les micro-entreprises et les PME concentrent 42 % de la créance, ce qui contribue également à atteindre l’objectif que nous souhaitions.

Enfin, l’enquête de conjoncture de l’INSEE fait apparaître que pour plus de la moitié des entreprises – 52 % dans les services et 58 % dans l’industrie – le CICE servira prioritairement à l’investissement.

Il va sans dire que ces premiers éléments sont purement déclaratifs et qu’ils devront être confirmés ultérieurement, mais ils témoignent de ce que le soutien en matière d’objectif d’investissement devra être confirmé et qu’il devra bien entendu se vérifier sur le plan comptable.

Toujours afin de soutenir l’activité économique, le crédit d’impôt développement durable – CIDD –, transformé en crédit d’impôt pour la transition énergétique – CITE – devient plus attractif pour inciter les ménages à investir sans attendre dans la rénovation de leurs logements.

La condition obligeant à réaliser plusieurs travaux de façon concomitante pour avoir droit au crédit d’impôt est supprimée et le taux de celui-ci est porté à 30 % pour tous les équipements, soit à un niveau bien plus avantageux que celui qui était prévu avant.

Tous ces aménagements doivent entrer en vigueur à compter du 1er septembre 2014 et ils devraient produire leurs effets le plus rapidement possible.

Ce PLF prévoit d’autres mesures de dépenses fiscales. L’addition de toutes celles concernant le logement devrait permettre d’espérer une augmentation du chiffre d’affaires des entreprises du bâtiment pour la partie rénovation entre 4 % et 5 %, ce qui est extrêmement important. Tous les citoyens, toutes les entreprises doivent se saisir rapidement de ces dispositifs.

Il y a l’investissement privé, certes, mais il y a aussi bien entendu l’investissement public, auquel vous avez fait référence, monsieur le ministre.

Le soutien à l’économie passe aussi par la mobilisation des collectivités locales. C’est pourquoi il est crucial que celles-ci maintiennent leur investissement. Un an après les élections municipales, nous savons que si les collectivités réalisaient l’année dernière 50 milliards d’euros d’investissement, elles pourraient n’en réaliser en fait que 45 ou 46 milliards.

Nous avons déposé et voté des amendements en commission des finances – dont nous rediscuterons bien entendu en séance publique – afin de soutenir le mieux possible l’investissement des collectivités locales.

Pour finir, permettez moi, mes chers collègues de citer le nouveau prix Nobel d’économie, Jean Tirole : "On peut aider à avoir de meilleures supervisions, à fournir des idées. Mais il faut que les politiques se les approprient et qu ’il y ait des discussions autour de ces idées».

Discuter de ce PLF et de la loi de programmation, c’est précisément se les approprier et tel est le but de cet examen.

À son issue, je vous invite à adopter ces deux projets de loi, comme l’a fait la commission des finances.

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