Intervention de Laurence Abeille

Réunion du 18 décembre 2012 à 17h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurence Abeille :

Vous le savez, les écologistes portent un grand intérêt à la question du nucléaire. La question des déchets, centrale, s'ajoute à celle des risques que cette technologie fait courir à la population et à celle de ses coûts, très mal évalués.

En une cinquantaine d'années, les réacteurs français ont produit près de 33 000 tonnes de déchets dont nous ne savons que faire, d'autant que leur durée de vie est extrêmement longue – elle dépasse même parfois l'entendement : jusqu'à 4,5 milliards d'années pour l'uranium 238 ! La période de demi-vie de la plupart de ces éléments radioactifs est de plusieurs dizaines, voire de plusieurs centaines de milliers d'années. La solution serait l'enfouissement des déchets en couche géologique profonde, avec le projet CIGÉO de Bure : c'est certes une façon d'enfouir le problème, mais pas de le résoudre !

Nous avons récemment examiné le projet de loi relatif à la mise en oeuvre du principe de participation du public défini à l'article 7 de la Charte de l'environnement. Les écologistes ont défendu l'idée que cette participation devait être menée bien en amont du projet pour être utile. Dans le cas de CIGÉO, un débat public est prévu pour 2013, alors que le projet est presque arrêté et qu'il n'existe pas de solution de rechange. Dès lors, sous l'apparence d'une concertation, ce débat ne servira en réalité qu'à entériner une décision. Existe-t-il des projets alternatifs ? Si oui, quel est leur état d'avancement ? L'ANDRA et la Commission nationale du débat public sont-elles prêtes à organiser un débat réellement contradictoire ?

Comment garder la mémoire, sur plusieurs millions d'années, du site d'enfouissement de Bure ? Comment être sûr que celui-ci ne connaîtra pas de modifications hydrogéologiques, tectoniques ou artificielles ? Ce projet insensé est mené faute d'autre solution, et parce que nous ne savons que faire de nos déchets nucléaires – ce qui ne nous empêche pas de continuer à en produire.

Le nucléaire nous est toujours présenté comme étant l'énergie la moins coûteuse ; mais la perception change dès lors que l'on prend en compte les coûts du démantèlement, de l'assurance en cas d'accident, de la recherche et développement, de la gestion des déchets et de leur enfouissement pendant des dizaines de milliers d'années – voire davantage.

Dans son rapport de 2011, la Cour des comptes soulignait que le coût de la gestion des déchets n'était pas connu, et qu'il était presque impossible à évaluer. Le modèle économique du nucléaire n'est pas pertinent dès lors qu'il ne parvient pas à intégrer le coût du stockage des déchets. Après l'enfouissement définitif, pendant combien de temps devra-t-on employer du personnel pour surveiller le site ? Faudra-t-il conserver une structure de surface pour conserver la mémoire du lieu ? Si c'est le cas, le coût sera colossal – mais l'hypothèse inverse ne serait guère responsable.

Bref, la gestion des déchets nucléaires nous inquiète fortement.

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