Intervention de Alexis Bachelay

Séance en hémicycle du 1er juillet 2016 à 15h00
Égalité et citoyenneté — Article 37

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexis Bachelay :

Les Français sont attachés à la liberté d’expression et à l’exercice de leur citoyenneté. Ils en ont fait maintes fois la démonstration dans l’histoire de leur pays. Pétitions, manifestations, associations : les moyens d’expression sont multiples.

Faire connaître son choix sur le non-achat d’un produit ou d’un service et conseiller à d’autres d’en faire autant peut-il être répréhensible ? Dans la plupart des pays du monde, la réponse est non. En France, l’appel au boycott a été considéré comme un délit et lourdement sanctionné. Cela revient à nier le droit au boycott, et donc le caractère citoyen de la consommation et des conditions de production : le citoyen est un consommateur, le consommateur est un citoyen. Pourquoi l’appel au boycott de produits ou de services, acte citoyen, pacifique et non-violent, serait-il interdit ?

Notre amendement vient souligner les contradictions de la loi du 29 juillet 1881, censée garantir la liberté d’expression mais qui peut entraver le droit d’appeler au boycott, en particulier depuis l’envoi de la circulaire Alliot-Marie aux procureurs en 2010. C’est pourtant un droit qui, dans l’histoire des peuples, a plusieurs fois permis de faire reculer les injustices, les inégalités ou le racisme. Le boycott est un moyen pacifique de faire entendre un point de vue citoyen face à la puissance des États ou des multinationales.

Jean-Jacques Urvoas, alors président de la commission des lois, s’était ému que des citoyens et des associations puissent ainsi être poursuivis. Dans un courrier du 20 novembre 2015 adressé à Christiane Taubira, garde des sceaux, il demandait l’abrogation de la circulaire Alliot-Marie. Je le cite : « L’incitation à punir ce militantisme constitue une atteinte à la démocratie et aux libertés fondamentales, telles que la liberté d’expression, qui ne doit faire l’objet de limitations qu’en cas de déclarations ou de faits inacceptables et contraires aux valeurs républicaines. »

Dans ce même courrier, Jean-Jacques Urvoas exprimait ses doutes sur le bien-fondé de l’arrêt de la Cour de cassation du 20 octobre 2015, qui a confirmé de lourdes condamnations rendues en appel à l’encontre de personnes ou d’associations ayant appelé au boycott. Il y dit que la décision de la Cour de cassation détourne la loi du 29 juillet 1881 de son objectif initial pour demander la poursuite en justice des personnes appelant au boycottage des produits israéliens en provenance des territoires occupés.

Cet amendement est issu des recommandations de notre ancien collègue Jean-Jacques Urvoas. Nous considérons que l’appel au boycott de produits et de services ne doit pas être considéré comme une discrimination.

8 commentaires :

Le 02/07/2016 à 19:14, laïc a dit :

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"Les Français sont attachés à la liberté d’expression et à l’exercice de leur citoyenneté. Ils en ont fait maintes fois la démonstration dans l’histoire de leur pays. Pétitions, manifestations, associations : les moyens d’expression sont multiples."

Commentaires citoyens des interventions des députés à l'Assemblée nationale sur le site "nos députés" aussi...

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Le 13/03/2017 à 10:28, Laïc1 a dit :

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Les moyens d'expression sont multiples, mais ils ne sont pas officiels : sur les sites internet des mairies, il n'y a pas de lieu obligatoire où les citoyens pourraient exprimer leurs avis sur ce qui va ou ne va pas dans leur commune. Également, lors des conseils municipaux, la liberté d'expression du citoyen est nulle et non avenue, sauf à vouloir faire un scandale public et être expulsé de la salle... Donc il n'y a pas vraiment d'expression citoyenne légale en France. Et sans cette liberté d'expression du citoyen dans les lieux de pouvoir, la démocratie ne sera jamais qu'une façade, un leurre, un mensonge.

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Le 13/03/2017 à 16:26, Laïc1 a dit :

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Pour plus de précision sur la "démocratie" lors des conseils municipaux, voici ce que j'ai trouvé :

D'abord un témoignage :

"Dans mon village rural de 220 habitants, en tant que personne du public assistant à la réunion du conseil municipal, j'ai demandé la prise de parole (pour poser une question), ce qui m'a été immédiatement refusé par le maire (silence et absence de réaction de ma part).

La préfecture, que j'ai interrogée, me confirme (par écrit) le droit du maire et rajoute que : "seuls les conseillers municipaux peuvent poser des questions orales en fin de réunion, en rapport avec les affaires courantes".

Plus loin, une explication plus "technique"

1/ En réunion de Conseil, vous n'avez le droit que de vous taire....sauf si le Maire vous interpelle à titre consultatif.

A votre première parole, il peut faire évacuer la salle, s'il le désire..."

Donc la liberté d'expression citoyenne doit être respectée jusque dans les conseils municipaux. Le silence imposé aux citoyens lors des conseils municipaux est une atteinte à la liberté d'expression citoyenne, une volonté de museler le peuple, de le faire taire, elle prouve que la démocratie municipale n'a de "démocratie" que le nom, mais n'est en fait qu'une véritable dictature imposée au peuple par l'oligarchie régnante.

Pour ce qui est de la "démocratie départementale" ou "régionale", c'est évidemment la même chose : la terreur des oligarques en guise de démocratie, des décisions prises unilatéralement sans aucun consentement populaire, et bien sûr tout cela fait le jeu des lobbies et de la corruption.

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Le 17/03/2017 à 21:45, luine 77 a dit :

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il devrait être possible pour un citoyen de faire passer une question écrite au conseil municipal qui serait lu au moment des questions diverses. les questions directes orales peuvent être source de troubles. mais les maires souvent abusent du pouvoir de ne pas rendre des comptes aux citoyens qui les interpellent de plein droit. C'est déficit pour la démocratie cela fait des élus des supers citoyens.

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Le 18/03/2017 à 09:18, Laïc1 a dit :

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Tout à fait, on peut même dire qu'en fin de compte il n'y a plus guère que les élus qui sont citoyens réellement, les autres citoyens étant cantonnés au silence, à l'inexistence civique, ce sont des non-êtres politiquement parlant. Cette situation ne peut plus durer.

Comment peut-on admettre par ailleurs que les citoyens ne soient pas tenus au courant de l'ordre du jour du Conseil municipal, qu'ils ne savent pas même à l'avance quels sujets y seront débattus ? C'est se moquer du monde, c'est l'opacité totale en guise de démocratie, il n'y a pas d'informations, c'est digne d'un régime soviétique.

Et encore, le site de ma mairie donne les dates des prochains conseils municipaux, j'ai consulté le site d'autre mairies, il n'y a pas même la date des futurs conseils municipaux. Dans une démocratie épanouie, nulle doute que les mairies seraient fières d'annoncer à l'avance la date des prochains conseils municipaux, avec grand renfort de publicité pour que la population, soucieuse de sa participation réelle et non pas fictive à la démocratie municipale, puisse y venir en nombre... Quelle horreur, surtout pas de public, moins on sera nombreux, plus on sera dans la confidentialité, et mieux on se portera, quelle belle démocratie.

Après la "démocratie officielle" tente de se donner bonne conscience en créant des conseils citoyens, mais là encore le problème est le même : on tire au sort 50 personnes, qui n'ont pas de réels pouvoirs, et pas de réelles motivations personnelles pour se faire entendre, et tout le reste de la population est rejeté dans le silence, dans la non information, les conseils citoyens ne font que perpétuer le système, mais autrement.

C'est l'individu, le citoyen qui est à la base de la démocratie, pas des groupes informes qui ne font que répercuter les directives venues "d'en haut".

Et surtout pas de suggestions citoyennes pour l'ordre du jour : les cahiers de doléances, c'était bon pour préparer la révolution française et la République, mais depuis que la prétendue République est là, oubliées les doléances citoyennes, l'individu doit se taire et obéir, surtout pas s'exprimer, le roi est parti depuis longtemps, on n'a plus besoin de vous...

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Le 19/03/2017 à 10:08, chb17 a dit :

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Au tribunal aussi, où la justice est rendue au nom du peuple, le citoyen a le droit d'être présent mais pas celui d'intervenir oralement. La réplique classique à cet égard, "Silence ou je fais évacuer la salle", traduit bel et bien la loi.

La sérénité des débats est confortée en Conseil municipal par la même injonction de se taire si l'on n'est pas élu (et donc titulaire d'une voix au chapitre). Cela n'empêche pas les citoyens, ou une association d'iceux, d'adresser au Maire ou aux conseillers une demande ou une plainte par courrier, par interpellation dans la presse, lors d'un rendez-vous etc.

Loi n°2004-809 du 13 août 2004 : « Toute convocation [du Conseil] est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour. Elle est mentionnée au registre des délibérations, affichée ou publiée ». Ca se fait par internet aussi, maintenant, même si des communes ne se sont pas encore mises à la technologie de l'instantané.

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Le 19/03/2017 à 13:11, Laïc1 a dit :

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"Technologie de l'instantané" : il y a bien les délibérations du conseil municipal sur internet, mais pas la moindre mention de l'ordre du jour. Si on peut l'un, on peut aussi l'autre, surtout que l'ordre du jour est moins long à rapporter que les délibérations. Donc, s'il n'y a pas l'ordre du jour sur internet, c'est bien par volonté de ne pas associer les citoyens à la vie de la commune, c'est intentionnel, car on n'est pas en démocratie, les élus ne veulent pas associer la population à leurs magouilles internes et à leurs délibérations.

Par ailleurs, j'irai farfouiller dans ma mairies pour trouver l'ordre du jour. Où est-il affiché ? Je ne l'ai jamais vu, rien n'attire l'attention dessus, s'il faut avoir l'âme d'un détective pour trouver le fameux ordre du jour... , là encore la politique de la confidentialité est à l...ordre du jour.

Pour ce qui est de contacter la mairie, il y a bien les courriers confidentiels, mais on est en démocratie, on est en droit de prendre à témoin la population de ses ennuis municipaux, ce qui fera pression sur la mairie, et d'exposer aussi ses problèmes pendant le conseil municipal, qui refuse tout dialogue citoyen, et qui se disqualifie ce faisant pour se qualifier de démocratique.

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Le 19/03/2017 à 13:23, chb17 a dit :

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Vous exigez, Laïc, une meilleure démocratie. Mes félicitations, citoyen !

Au niveau local, je compte sur vous pour "harceler" votre mairie jusqu'à ce que vous obteniez un affichage, accessible au public, de l'ordre du jour des prochaines réunions du Conseil. C'est la loi. La Préfecture pourrait appuyer votre démarche si nécessaire.

Ma propre mairie laisse tout cela dans un registre qu'il faut demander à l'accueil, mais elle en fait publier l'essentiel dans la presse locale. L'ordre du jour sur le ouèbe ? Ca ne prendrait pas trop de temps à la secrétaire de mairie, faut essayer.

Bon courage.

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