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Jacques Bompard
Question N° 100265 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 1er novembre 2016

M. Jacques Bompard alerte M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur l'état de la population travaillant dans le secteur agricole. Pressions, accélération des cadences, de la taille des élevages, etc., les responsables de la sécurité sociale agricole s'alarment : « Le secteur agricole est une cocotte-minute prête à exploser ». Avec 2,8 % d'agriculteurs en moins (2013) et une charge de travail ayant augmenté de plus de 1,4 %, les agriculteurs sont harassés. Abattus par des maladies graves dues à d'intenses crises sanitaires, qui augmentent les chances de contracter des troubles musculo-squelettiques ; épuisés par un trop lourd fardeau, portant atteinte au moral de ces garants des terroirs. « Les métiers de l'agriculture ont bénéficié de la mécanisation, les agriculteurs travaillent plus et la charge morale et psychologique a remplacé la charge mécanique », affirme en ce sens Laurent Pinatel, porte-parole national de la Confédération paysanne. 10 % des salariés sont exposés à de graves produits cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques ; une problématique inquiétante, qui soulève la question de la transparence des pouvoirs publics en la matière. Quid des alertes de l'ANSES ou de l'OMS concernant des produits comme le glyphosate, pour lequel a été demandée l'ouverture d'une commission d'enquête (voir proposition de résolution n° 3831) et à laquelle il est refusé de faire écho ? Quid de la protection des accidents du travail, quant à la sécurité au contact des animaux étant donné que 56 % des accidents du travail sont liés aux activités en élevage ? En 2015, ce sont près de 70 754 accidents qui ont pu être recensés.... Et enfin, quelles prises de mesures pour les pressions psychologiques intenses auxquelles sont soumis les membres du secteur agricoles ? Entre 35 % et 60 % de ces travailleurs admettent en subir les symptômes ! Face à ces nombreuses questions, le Gouvernement opte pour la posture : à la dépendance de plus en plus forte des agriculteurs aux entreprises agro-industrielles, à la grande distribution et aux aides publiques, on répond par l'ouverture de grandes surfaces le dimanche. À la surcharge du temps de travail laborieux, on ajoute des normes administratives absconses... Tant de charges, qui contribuent à l'affaissement du moral des exploitants agricoles, « qui affichent un taux de suicide trois fois plus élevé que les cadres » - si l'on en croit l'ergonome Bernard Dugué (É part, p.8, 4e trimestre 2016). Quant aux plans mis en œuvre pour en limiter l'impact, on s'interroge encore sur leur efficacité... Car après les maladies cardiovasculaires et les cancers, le suicide est la troisième cause de mortalité dans ce domaine. Les agriculteurs doivent retrouver la nature originelle de leur travail. Un labeur noble, responsable de la santé des Français et de la beauté des territoires. Aussi il lui demande quelles mesures son ministère va mettre en œuvre afin d'appuyer la population œuvrant dans le domaine agricole, afin de leur garantir des conditions de travail sereines, de leur assurer un traitement sain des territoires.

Réponse émise le 27 décembre 2016

Le Gouvernement est résolument engagé dans une politique de santé au travail partagée entre l'État, les partenaires sociaux, la sécurité sociale et les organismes et acteurs de la prévention des risques professionnels. Le plan santé au travail 2016-2020, adopté en décembre 2015, donne la priorité à la prévention primaire et au développement de la culture de prévention, y compris pour les actions menées en direction des travailleurs agricoles. La caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA), étroitement associée à la fixation de ces priorités, assure leur mise en œuvre et les déploie de manière ciblée via le plan santé et sécurité au travail des actifs agricoles 2016-2020, que le ministre chargé de l'agriculture a approuvé en décembre 2015. Les trois risques principaux du secteur agricole qui ressortent, tant de l'analyse de la sinistralité des accidents du travail et des maladies professionnelles des professions agricoles, que des données de santé disponibles au sein de la MSA, sont liés aux animaux, à l'utilisation des produits chimiques, dont les produits phytopharmaceutiques et à l'utilisation des machines. Des actions nationales ou locales sont ainsi ciblées pour la période concernée. Pour la prévention des risques liés à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, il est à noter que le plan Écophyto II apporte les moyens issus de la taxe sur les pollutions diffuses afin, notamment, d'orienter la recherche vers l'amélioration des connaissances sur les substances et mélanges utilisés. En ce qui concerne la prévention des risques psychosociaux (RPS), il est également prévu d'agir sur les facteurs organisationnels et relationnels des situations de travail générateurs de ces risques. Ces facteurs sont aujourd'hui connus, ainsi que leurs effets sur la santé, notamment en termes de maladies-cardio-vasculaires, de troubles musculo-squelétiques, de troubles anxio-dépressifs ou d'épuisement professionnel, voire de suicide. Il s'agit pour l'État et ses partenaires, d'impulser une meilleure connaissance de ces facteurs et de pérenniser les démarches d'évaluation et de prévention satisfaisantes. Pour la prévention du suicide, le ministère chargé de l'agriculture et la CCMSA sont plus particulièrement engagés dans un plan national de prévention du suicide qui mobilise les cellules pluridisciplinaires de prévention au sein des caisses de MSA et les associations d'écoutes spécialisées, via le dispositif AgriEcoute. Les statistiques des appels pour le premier semestre 2016 montrent une très forte augmentation du nombre d'appels reçus à ce numéro : 1697 appels, contre 537 appels de janvier à juin 2015. Cette tendance est en cours d'analyse, en partenariat avec l'agence santé publique France. En tout état de cause, ces données confirment un réel besoin d'écoute de la part des agriculteurs et de leur famille. Ces orientations de prévention et d'amélioration des conditions de travail sont définies et suivies dans leur mise en oeuvre avec les partenaires sociaux du secteur au sein de la commission spécialisée agricole du conseil d'orientation des conditions de travail (COCT). Ainsi, leur évaluation est prévue et sera assurée de manière coordonnée avec celle de la convention d'objectifs et de gestion (2016-2020), qui a été signée en juillet 2016 entre la CCMSA et l'État, pour ses dispositions relatives à la santé et la sécurité des salariés et des non-salariés agricoles.

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