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Jacques Bompard
Question N° 100805 au Ministère des affaires étrangères


Question soumise le 22 novembre 2016

M. Jacques Bompard interroge M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la persistance de l'État islamique à Mossoul. Face aux vagues percutantes de djihadistes, l'armée iraquienne est assaillie, ses forces épuisées et les nerfs de ses soldats mis à mal. Utilisant, sur la côte orientale du Tigre, des réseaux souterrains de près de 70 km de long, les terroristes islamiques surprennent de façon intempestive les forces spéciales, utilisant de petites unités de cinquante hommes pour frapper à chaque instant. L'armée, tout comme les forces spéciales, ne sont pas accoutumées à cette forme de combat, où les quartiers résidentiels sont mis à profit par les snipers de l'État islamique, où les civils sont utilisés comme des couvertures pour dissimuler des djihadistes prêts à commettre à chaque seconde un attentat-suicide. Des civils, que l'armée peine à distinguer de ces potentiels meurtriers. Avec des chars de combat non adaptés aux étroits sentiers de la ville, les forces iraquiennes doivent en appeler aux unités aériennes américaines pour délivrer des bombes sur ces quartiers. Une stratégie particulièrement meurtrière pour la population civile. Avec 100 000 combattants, la coalition de peshmergas kurdes, de l'armée iraquienne et des milices paramilitaires chiites ne peut parvenir à bout des 50 000 terroristes de l'État islamique. Et alors qu'Abu Bakr al-Baghdadi a appelé ses soldats à périr pour le contrôle de Mossoul, le conseiller du gouvernement iraquien Hisham al-Hashemi met en garde sur le sérieux de cette menace et rappelle la part importante que représentent les terroristes français dans cet état de fait ; la filière Al-Mourabitoune n'a-t-elle pas prêté serment, affirmant que ses soldats étaient prêts à se donner la mort plutôt que de perdre leurs postes stratégiques à Mossoul ? Les positions de l'armée iraquienne sont de plus en plus délicates à maintenir ; les zones hier aux mains du gouvernement sont proclamées le lendemain dans celles des combattants de l'État islamique. Sur soixante quartiers de Mossoul, le gouvernement reconnaît n'en détenir que six avec certitude. Et s'il faut se réjouir des avancées de deux forces d'infanterie de l'armée iraquienne au nord et au sud du pays, destinées à ouvrir deux nouveaux fronts, force est de constater que ces effectifs ne pourront parvenir à la victoire qu'à l'issue d'une bataille coûteuse. « Nous faisons face à la plus inflexibles des guerres civiles, qu'aucune force dans le monde ne pourraient contrer » a déclaré à cet égard le porte-parole du service de lutte contre le terrorisme Sabah al-Numani. Face au nouveau mode de guerre civile déployé par l'État islamique dans le cadre du combat de Mossoul ; derrière les sombres déclarations des responsables de l'armée iraquienne, rappelant l'inéluctabilité d'un combat d'une violence sans précédent auquel ont pris part des terroristes français, quelles nouvelles méthodes le ministre des affaires étrangères compte-t-il mettre en œuvre pour que la France élabore une stratégie offensive lui permettant à la fois d'appuyer l'État irakien dans sa lutte contre un terrorisme usant insidieusement de la population civile et de juguler l'alimentation des flux djihadistes par des ressortissants français ? Il lui demande ce qui est prévu quant au retour de ces terroristes sur le territoire français.

Réponse émise le 16 mai 2017

Depuis 2014, la France soutient les autorités irakiennes dans leur combat contre le terrorisme. Son action ne vise pas à se substituer à celle des Irakiens. Son objectif est de mettre les forces irakiennes en capacité d'éradiquer durablement la menace terroriste. La France appuie donc directement les opérations conduites par les Irakiens en déployant ses aéronefs et un groupement tactique d'artillerie ; elle engage aussi ses troupes pour conseiller, former, assister et équiper les forces irakiennes, dans le cadre de la coalition internationale contre Daech. Concernant la situation à Mossoul, il faut reconnaître l'importance des avancées réalisées par les forces irakiennes depuis le déclenchement des opérations pour libérer la ville, le 17 octobre. Les quartiers est de la ville ont été libérés dès le début de l'année. Depuis le lancement de l'offensive pour reprendre la partie occidentale de la ville en février, la progression des forces irakiennes a été remarquable. En quelques semaines, elles ont reconquis plusieurs quartiers au sud de la ville et des bâtiments emblématiques dont Daech s'était saisi, comme le musée de Mossoul ou le siège du gouvernorat. Le groupe terroriste a aussi été privé des principaux axes logistiques qui relient Mossoul à la Syrie et subit une forte attrition. Aujourd'hui, Daech est encerclé, ne contrôle plus que quelques quartiers de la medina. Mais la bataille de Mossoul restera, jusqu'à la libération de la ville, très difficile car les djihadistes opposent une résistance acharnée aux forces irakiennes, soucieuses de limiter au maximum les pertes civiles dans des quartiers à forte densité. Daech, au contraire, n'hésite pas à utiliser les populations civiles comme boucliers humains et exécute ceux qui cherchent à fuir les combats. Au-delà de la nécessaire destruction de la capacité militaire de Daech, une solution politique inclusive est la seule à même de restaurer la confiance entre l'ensemble des composantes de la société irakienne. La réconciliation nationale, la stabilisation et la reconstruction des zones libérées de Daech sont une nécessité pour venir à bout du terrorisme. C'est pourquoi, outre la participation de la France aux efforts de la coalition internationale et aux efforts de reconstruction pour la période de l'après-Daech, la France soutient fermement la politique de réconciliation nationale portée par le Premier ministre Haïder al-Abadi. Elle souhaite que son gouvernement parvienne à réaliser les réformes nécessaires pour répondre aux aspirations des différentes composantes de la nation irakienne dans leur diversité. Dans la continuité de la réunion ministérielle organisée à Paris le 20 octobre dernier, il est indispensable que la gouvernance politique de Mossoul après Daech soit préparée dès à présent dans un esprit inclusif pour répondre aux besoins et aux aspirations des habitants. Les autorités françaises suivent avec la plus grande attention la situation des civils en Irak et condamnent toutes les formes de violence commises à leur encontre. Consciente que Daech ne pourra être vaincu durablement que par la stabilisation des zones libérées, la France a contribué à hauteur de près de 35 millions d'euros depuis 2014 à l'aide humanitaire en Irak et contribue aux Fonds des Nations unies, notamment au mécanisme de financement pour la stabilisation immédiate du PNUD (FFIS), pour permettre le retour durable, volontaire et en toute sécurité des populations déplacées. Concernant le phénomène des combattants terroristes étrangers, la France a tout mis en œuvre pour entraver les déplacements entre la France et la zone syro-irakienne. D'abord, par le renforcement de son dispositif législatif et par la mobilisation totale des services de sécurité et de renseignement.Mais aussi en se mobilisant au niveau européen avec la mise en œuvre du PNR européen et le renforcement des contrôles aux frontières extérieures de l'Union européenne, notamment. Ces efforts portent leurs fruits, comme en témoigne la diminution notable du nombre de départs vers la Syrie et l'Irak en 2016. Par ailleurs, la France poursuit ses efforts de détection et de prévention de la radicalisation dans le cadre du Plan d'action contre la radicalisation et le terrorisme adopté en mai 2016. S'agissant des retours de combattants de Daech sur le sol français, la politique de la France en la matière est claire : tous les adultes de retour de la zone syro-irakienne feront l'objet d'une procédure judiciaire et devront rendre compte des actes auxquels ils ont participé lors de leur séjour en Syrie ou en Irak.

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