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François Loncle
Question N° 54919 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 6 mai 2014

M. François Loncle attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement, sur une nouvelle méthode de lutte contre les algues vertes. Celles-ci résultent de la concentration dans les sols et les cours d'eau de nitrates qui proviennent surtout de l'épandage d'engrais azoté d'origine minérale ou organique. L'intensification de l'élevage, entre 1960 et 1990, a fortement contribué à la prolifération des algues vertes. Le littoral breton est particulièrement affecté par ce phénomène, car la Bretagne est la première région européenne d'élevage et regroupe plus de la moitié la production porcine française. Chaque année, entre 50 000 et 100 000 m3 d'algues vertes s'accumulent sur les plages des Côtes d'Armor et du Finistère, mais cette invasion gagne le littoral bas-normand et les côtes vendéennes. L'élimination des algues vertes représente donc un problème primordial, tant sur le plan agricole, écologique que financier, dans la mesure où le coût de leur ramassage, entre 300 000 et 500 000 euros, est assumé par les communes et les conseils généraux. Cependant, une découverte italienne pourrait contribuer à réduire sensiblement la masse des algues vertes. En effet, un minéralogiste de Modène a constaté que la chabasite, une roche volcanique employée comme matériau de construction, possédait des propriétés insoupçonnées puisqu'elle peut capturer l'azote ammoniacal qui est à la base des nitrates. Ce minéral a été expérimenté, avec succès, dans la région de Parme pour combattre les mauvaises odeurs des élevages porcins. Réduite en poudre, la chabasite est incorporée en très petite quantité (3 %) dans le mélange de soja et de maïs nourrissant les cochons. Cet apport permet de diminuer de manière importante les intrants dans le lisier de porc, puisque près du tiers de l'azote ammoniacal est ainsi capturé, diminuant d'autant la pollution aux algues vertes. Des tests menés en France par l'Institut du porc ont confirmé l'intérêt que présente la chabasite. Le département des Côtes-d'Armor s'est proposé d'entreprendre une expérimentation significative. Dans ces conditions, il aimerait connaître la position du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur l'emploi de chabasite comme complément alimentaire des porcs et comme moyen de lutte contre les algues vertes. Il voudrait savoir si les pouvoirs publics comptent réaliser une étude approfondie des effets de cette utilisation sur la santé animale et humaine, sur la qualité de la viande porcine, sur les sols, les eaux et l'air. Il lui demande comment pourrait être financée la généralisation de ce procédé qui entraîne un surcoût de 4 euros par porc et s'il n'est pas nécessaire que l'État engage une concertation avec les exploitants, les consommateurs, les collectivités locales et le secteur de la grande distribution.

Réponse émise le 14 avril 2015

La chabasite est une roche volcanique, silicate de la famille des zéolites, utilisée depuis une dizaine d'années en complément alimentaire en élevage porcin dans la région de Parme en Italie pour réduire la nuisance olfactive de ces élevages. Les caractéristiques de cette roche lui permettent notamment de piéger l'azote ammoniacal (NH4+) au sein de sa structure cristalline et de ne le libérer qu'une fois sollicité par le milieu extérieur. L'effet de l'introduction de la chabasite en l'alimentation porcine sur la réduction des nuisances olfactives est aujourd'hui bien documenté. D'autres avantages environnementaux potentiels de cette roche sont à l'étude, par exemple dans le cadre du projet européen Zéolife sur la plaine du Pô et de tests réalisés en région Bretagne. Les tests réalisés en Bretagne concernent l'introduction de chabasite comme complément alimentaire en élevage porcins. Ils ont été réalisés en partenariat avec l'institut du porc (IFIP) et accompagnés par les pouvoirs publics. Ils ont montré qu'à zootechnie équivalente, l'incorporation de 3 % de chabasite dans l'alimentation de porcs à l'engraissement permet de diminuer l'azote total et l'azote ammoniacal dans le lisier, d'écrêter le pic d'odeurs, de réduire les émissions d'ammoniac en bâtiment, de réduire les rejets de phosphore et de réduire les émissions de méthane et de dioxyde de carbone. Ces tests n'ont toutefois pas permis d'établir le bilan complet de l'azote sur le cycle de production : un défaut de bilan élevé est constaté pour la chabasite, qui reste à objectiver. D'autre part, l'impact sur les performances zootechniques des animaux reste à confirmer. Ces premiers tests doivent donc être complétés et approfondis et ces premiers résultats consolidés. Au-delà des effets de l'introduction de chabasite dans l'alimentation porcine sur les émissions azotées des élevages, il est nécessaire d'étudier l'effet de la chabasite, et notamment son innocuité, sur les productions agricoles (viande, lait et cultures associées après épandage) et sur le fonctionnement des sols à long terme. Le bilan environnemental et économique de la chabasite tout au long de son cycle de vie serait également à établir. Ainsi, une seconde phase d'étude et d'expérimentation, financée par l'État en région Bretagne, relative aux propriétés de cette roche dans le sol, a débuté en 2013 pour une période de deux années. Les résultats sont attendus pour l'année 2015. D'éventuels travaux de recherche et de développement complémentaires pourront le cas échéant être accompagnés par les pouvoirs publics dans le cadre des dispositifs existants, dans le respect des règles propres à chacun de ces dispositifs et notamment celles relatives aux processus de sélection des projets, ainsi que dans le respect des règles de la concurrence. En outre, toute utilisation de chabasite en agriculture doit nécessairement respecter le droit en vigueur sur son éventuel épandage sur les sols agricoles (article L. 255-2 du code rural et de la pêche maritime), ainsi que le droit européen applicable en matière d'alimentation animale. Enfin et dans l'esprit du projet agro-écologique, si la recherche de la performance économique, écologique et sociale en agriculture passe nécessairement par le soutien à l'innovation, il reste essentiel en matière de fertilisation, notamment azotée, de travailler à la recherche systématique et fine de l'équilibre de la fertilisation ainsi qu'à la bonne valorisation des matières organiques tout au long de leur cycle de production et de transformation.

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