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Bérengère Poletti
Question N° 69044 au Secrétariat d'état au commerce


Question soumise le 18 novembre 2014

Mme Bérengère Poletti attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire, au sujet des compléments alimentaires. En 2012 une nouvelle réglementation européenne entrait en vigueur : les industriels, qu'ils fabriquent des aliments ou des compléments alimentaires, ne pouvaient plus prétendre que leurs produits avaient un effet sur la santé sans en apporter la preuve. L'Autorité européenne de sécurité des aliments (Aesa) rendait alors son verdict sur plus de 2 000 dossiers. Près de 90 % des allégations revendiquées étaient considérées comme non démontrées ! On pouvait donc penser que ces « publicité mensongères » allaient cesser. Malheureusement, il semble que nous en soyons loin. En effet, certains industriels ont choisi d'ignorer la réglementation, d'autres la contournent en décidant de faire passer leur produit sous le statut de dispositif médical, d'autres enfin font pression pour échapper à la loi sous prétexte que leurs produits contiennent des plantes. Grâce à ces procédés les industriels n'ont pas besoin de voir leurs allégations validées, et peuvent (contrairement aux médicaments) les commercialiser sans prouver leur efficacité, et sans être soumis à une procédure d'autorisation. C'est le fabriquant qui atteste de la conformité de son produit aux exigences essentielles de sécurité en apposant le marquage CE. Le consommateur ne peut donc en aucun cas se fier aux allégations avancées, puisqu'elles ne sont validées par personne. Aussi, elle lui demande les mesures qu'envisage de prendre le Gouvernement afin de protéger les consommateurs de ce vide juridique.

Réponse émise le 24 janvier 2017

Le règlement (CE) no 1924/2006 du 20 décembre 2006 relatif aux allégations nutritionnelles et de santé portant sur les denrées alimentaires (ci-dessous règlement allégations), en application depuis 2007, prévoit l'établissement de listes exhaustives d'allégations autorisées. Ainsi, le règlement (UE) no 432/2012 du 16 mai 2012 dresse la liste des allégations de santé (AS) génériques autorisées. Sa publication a mis fin à la période de transition qui permettait aux opérateurs d'employer les allégations présentes sur le marché avant l'entrée en vigueur du règlement (CE) no 1924/2006. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), en charge du contrôle de la loyauté des pratiques commerciales à l'égard des consommateurs, s'attache à vérifier la conformité de la communication relative à la santé sur l'ensemble des supports commerciaux des denrées alimentaires mis en œuvre. A cet égard, elle a mis en place des programmes de contrôle annuels visant à garantir l'absence d'allégations non autorisées mais aussi le respect des autres dispositions du règlement (CE) no 1924/2006. Les derniers résultats d'enquêtes ont révélé un taux de non-conformités de 13,4 % sur 469 établissements contrôlés et 1 124 actions de contrôle. Cela concerne à la fois l'application du règlement allégations mais également d'autres dispositions applicables (étiquetage nutritionnel, non déclaration des compléments alimentaires, etc.). Il existe néanmoins des obstacles à une mise en œuvre pleinement satisfaisante du règlement (CE) no 1924/2006. Le nombre considérable d'allégations de santé à évaluer par le même groupe d'experts au niveau européen (plus de 4 500 AS génériques) a beaucoup ralenti leur procédure d'autorisation. Par ailleurs, les exigences de l'autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) en termes de preuves à apporter, pour la démonstration d'un effet santé, des denrées alimentaires, ont soulevé certaines incohérences, notamment en ce qui concerne les allégations portant sur des substances botaniques. En effet, si dans le domaine des médicaments traditionnels à base de plantes, la prise en compte de la tradition leur permet de s'exonérer des preuves cliniques pour démontrer leur efficacité, cela n'était pas le cas pour la démonstration des effets santé des denrées alimentaires à base de plantes qui devaient présenter des études suivant un protocole particulièrement exigeant. Il a donc été décidé de mettre en attente l'évaluation des allégations relatives aux substances botaniques en attendant de décider d'un mode opératoire pertinent. Dans ce contexte, la France a fait valoir que les aliments devaient être soumis au même niveau d'exigences que les médicaments. La nouvelle commission devra décider de l'orientation à prendre. Par ailleurs, s'agissant des allégations de santé spécifiques (fondées sur des dossiers d'autorisation reposant sur des preuves spécifiques), l'application du règlement (CE) no 1924/2006 a conduit à n'autoriser que 5 allégations sur les 89 dossiers évalués. Cela témoigne, d'une part, de l'investissement consenti par les entreprises de l'agro-alimentaire (un dossier étant extrêmement onéreux) et, d'autre part, du niveau d'exigences très élevé qui leur est appliqué. Ainsi, le Gouvernement français, par l'intermédiaire de la DGCCRF, met tout en œuvre pour garantir une application stricte du texte au profit des consommateurs à la fois au niveau européen, à l'occasion des débats communautaires, et au niveau national par les contrôles effectués sur ce marché. Quant aux denrées alimentaires qui se placent sur le segment des dispositifs médicaux, cette classification leur concède effectivement un cadre juridique plus souple au regard des allégations de santé. Cependant, les autorités françaises estiment que certains produits ne répondent pas à la définition de dispositif médical et devraient être soumis au règlement allégations. L'agence nationale de sécurité du médicament a ainsi été sensibilisée par la DGCCRF sur ce détournement de la réglementation. La direction générale de la santé et la DGCCRF ont conjointement rédigé, en novembre 2013, un courrier adressé à la Commission européenne afin qu'elle se prononce sur le statut de certaines catégories de produits, conformément à ce que prévoit la réglementation sur les dispositifs médicaux. Les autorités françaises sont toujours en attente de la réponse de la Commission européenne. Enfin, concernant les marquages CE, ceux-ci sont apposés sur les produits industriels et non sur les denrées alimentaires dont la sécurité est encadrée par les nombreuses dispositions européennes et nationales en vigueur (paquet hygiène, dispositions spécifiques…).

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