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Rudy Salles
Question N° 94616 au Ministère de l’environnement


Question soumise le 5 avril 2016

M. Rudy Salles attire l'attention de Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat sur la vente aux enchères d'ivoire. Le dernier rapport de l'ONG IFAW (International fund for animal welfare - Fonds international pour la protection des animaux) intitulé « Ivoire d'éléphant - lot du jour : adjugé, vendu ! » révèle l'ampleur du commerce d'ivoire prenant place dans les salles de ventes aux enchères en France, alors même que les éléphants traversent l'une des crises les plus graves de leur existence. Aujourd'hui le braconnage atteint des seuils alarmants avec une moyenne de 35 000 éléphants d'Afrique tués chaque année et un nombre de saisies importantes d'ivoire (plus de 500 kg) en hausse. Dans cette enquête, IFAW a recensé 1 774 lots d'ivoire brut et travaillé proposés à la vente en France sur une période de deux mois (mai à juillet 2014). Au moins 970 d'entre eux ont été vendus, générant un produit final qui s'élève à 1 227 455 euros. Le poids de l'ensemble des lots mis en vente totalisait 2 tonnes. Le marché de l'ivoire dans les salles de ventes aux enchères en France est un marché actif, profitable et prospère qui entretient de façon active la demande internationale pour l'ivoire. Cette disponibilité renforce l'appétit pour ces produits. Il s'agit également d'un marché à risque : le fait que le commerce de l'ivoire soit globalement interdit en France mais autorisé pour les ivoires dits pré-convention ou qualifiés d'antiquités rend la notion d'interdiction confuse auprès du grand public et rend également l'application de la réglementation encadrant ce commerce dérogatoire difficile par les professionnels du secteur des ventes aux enchères publiques. Dernièrement, la France s'est voulue être un pays exemplaire en termes de lutte contre la criminalité envers les espèces sauvages : en établissant un plan national d'actions dans ce sens ; en devenant le premier pays européen à procéder à une destruction de 3 tonnes d'ivoire saisi, et en prenant la décision d'interdire toute exportation d'ivoire brut à destination de pays tiers tout en sollicitant de ses homologues européens une initiative similaire. Cependant, cette dernière mesure s'est avérée insuffisante et le marché des ventes aux enchères publiques d'ivoire est maintenu. Autoriser ce marché spécifique a des conséquences néfastes sur les populations actuelles d'éléphants et les communautés humaines qui en dépendent en encourageant le braconnage, la violence, la circulation d'armes et en enlevant tout stigma sur la consommation ou la possession d'ivoire ce qui sape les efforts de réduction de la demande initiés dans les pays consommateurs d'ivoire. D'après un sondage IFOP réalisé entre le 1er et le 3 juillet 2015, 76 % des Français se déclarent favorables à une interdiction pleine et entière du commerce de l'ivoire en France. Aussi, il souhaiterait savoir si la France envisage d'interdire strictement le commerce de l'ivoire sur son territoire, notamment dans le cadre des ventes aux enchères.

Réponse émise le 20 septembre 2016

La France est très impliquée dans la préservation de la biodiversité et la lutte contre le commerce illégal des espèces sauvages. Dès le 5 décembre 2013, la Présidence de la République a organisé une table ronde sur la « lutte contre le braconnage et le trafic des espèces menacées » réunissant neuf chefs d'États africains aux côtés du Président de la République. Après avoir contribué, en février 2014, avec 41 autres États à la déclaration de Londres sur le commerce illicite de faune et de flore sauvages, la France a participé en mars 2015 à la conférence de Kasane (Botswana) dont l'objet était d'inscrire la mobilisation internationale sur ce sujet dans la durée. Elle a également participé à la conférence du 10 avril 2014 sur le trafic d'espèces sauvages tenue à Bruxelles et à la 7ème Conférence des Parties à la convention des Nations Unies contre la criminalité organisée dite « convention de Palerme » en octobre 2014. Lors de son déplacement au Kenya le 30 avril 2016 à l'occasion d'une cérémonie de destruction d'ivoire organisée par le président du Kenya, la ministre chargée de l'environnement a annoncé qu'elle souhaitait interdire tout commerce d'ivoire sur le territoire français, sauf dérogation exceptionnelle, et qu'elle porterait cette mesure au niveau européen. Pour concrétiser cet engagement, un arrêté ministériel a été préparé pour interdire en France tout commerce d'objets composés en tout ou partie d'ivoire d'éléphant ou de corne de rhinocéros sauf dérogation exceptionnelle pour le commerce et la restauration d'objets d'art dont est établie l'ancienneté antérieure au 1 juillet 1975, date d'entrée en vigueur de la convention sur le commerce international d'espèces de faune et de flore menacées d'extinction (CITES). Il a été présenté au conseil national de la protection de la nature (CNPN) qui s'est réuni le 7 juin et est actuellement soumis à concertation. Cet arrêté devrait être publié dans les premiers jours de juillet 2016. Ce texte viendra compléter l'instruction ministérielle donnée aux directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) le 9 mai dernier leur demandant de suspendre la délivrance de certificats requis préalablement à la mise en vente d'objets en ivoire ou comportant de l'ivoire même en partie et la mesure prise en janvier 2015 de suspendre en France la délivrance des documents d'exportation ou de réexportation d'ivoire brut. De plus, dans le cadre du plan d'action européen de lutte contre le trafic d'espèces sauvages, la France porte une disposition enjoignant l'ensemble des États membres à ne plus délivrer de documents d'exportation ou de réexportation d'ivoire brut « pré-Convention CITES » et l'examen de mesures supplémentaires mettant un terme au commerce de l'ivoire. Il convient de rappeler qu'a d'ores-et-déjà été adopté dans le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, un article modifiant le code de l'environnement pour renforcer les sanctions prévues en cas de trafic d'espèces protégées (éléphants, rhinocéros, tigres, variétés de bois tropicaux, etc…) : les amendes encourues en cas d'infraction simple seront décuplées et passent de 15 000 à 150 000 euros. Elles seront multipliées par cinq en cas de trafic en bande organisée, et passeront de 150 000 à 750 000 euros.

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