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Jean-Claude Mathis
Question N° 96734 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 21 juin 2016

M. Jean-Claude Mathis attire l'attention de M. le ministre des finances et des comptes publics sur les inquiétudes formulées par les jeunes agriculteurs de l'Aube concernant la non marchandisation des contrats laitiers ainsi que les relations commerciales contenues dans le projet de loi Sapin II. En effet, l'interdiction de la marchandisation des contrats laitiers au seul lait de vache telle que le projet de loi le prévoit n'est pas suffisante. En effet, les jeunes agriculteurs souhaitent l'extension de cette prohibition au lait en général puisque tous les laits sont concernés par le modèle de contractualisation engagé par l'accord interprofessionnel signé le 17 mai 2016. En outre, aujourd'hui les négociations entre distributeurs et producteurs se font au cours de l'année. Ce système, qui défavorise les producteurs au profit des distributeurs, peut être corrigé par l'instauration d'une date limite (fixée au 30 novembre 2016) qui permettrait une renégociation avec plus de visibilité et de lisibilité. Par ailleurs, la prise en compte d'un certain nombre de contraintes dans les coûts de production est toujours défaillante : premièrement, les CGV (conditions générales de vente) des industriels doivent englober les éléments économiques liés à « l'amont » agricole des producteurs dans les négociations commerciales afin de couvrir au mieux les coûts de production ; deuxièmement, les contrats MDD (marques de distributeurs) devraient déterminer leurs prix en fonction des coûts de production et des prix de marché, ce qui n'est nullement le cas dans le projet de loi présenté par le Gouvernement ; troisièmement, alors que les coûts de production et les matières premières agricoles et alimentaires sont variables, les marchés publics de fourniture de denrées alimentaires se basent sur des prix fermes inchangés sur une période d'un an au moins. Il est alors impossible d'intégrer les variations des cours des prix des produits alimentaires tels que les viandes ou les œufs. C'est pourquoi il serait souhaitable de rendre systématique le recours au prix révisable dans les marchés publics de denrées alimentaires afin de facilité une meilleure répartition au sein des filières agricoles. Par conséquent, il lui demande de prendre en compte ces inquiétudes et l'appelle à répondre à ces nombreuses préoccupations et attentes.

Réponse émise le 6 septembre 2016

Le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dit Sapin II, contient, à l'initiative du ministre en charge de l'agriculture, plusieurs mesures en faveur de l'amélioration de la situation financière des exploitations agricoles et visant à assurer une meilleure répartition de la valeur au sein de la filière alimentaire. Le projet de loi Sapin II contient deux articles, portés par le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, visant d'une part à assurer la transparence des filières en confiant un nouveau pouvoir au président de l'observatoire de la formation des prix et des marges. Il pourra signaler aux présidents de tribunaux de commerce les entreprises n'ayant pas publié leurs comptes, ces derniers pourront alors adresser une injonction à l'entreprise en faute sous peine d'astreinte pouvant atteindre 2% de son chiffre d'affaires journalier. Dans une situation de crise agricole, ce projet de loi, dans sa rédaction issue de la première lecture au Parlement, vise également à éviter le renchérissement du coût de l'installation et de l'investissement pour les producteurs. Ainsi, un article prévoit l'interdiction de la cession à titre onéreux des contrats de lait de vache entre producteurs. Ces contrats entre les producteurs et leurs laiteries ne doivent en aucun cas se transformer en un droit à produire, ce qui constituerait un obstacle à l'installation des jeunes agriculteurs. Le projet de loi, suite à son vote au Sénat et sur proposition du ministre en charge de l'agriculture, dispose par ailleurs que les contrats commerciaux entre industriels et distributeurs portant sur la vente de produits des filières soumises à l'obligation de contractualisation écrite doivent faire référence au prix prévisionnel moyen payé aux producteurs agricoles. Il s'agit de donner sa place à l'amont agricole dans les négociations commerciales entre industriels et grande distribution en objectivant les conséquences d'une discussion du prix à la baisse pour les producteurs, tout en préservant le principe de la liberté contractuelle et de la libre détermination du prix. En outre, dans le cadre de la contractualisation écrite obligatoire à l'occasion de la première mise en marché, les critères et modalités de détermination du prix devront faire référence à un ou plusieurs indicateurs publics d'évolution des coûts de production et à un ou plusieurs indices publics des prix des produits agricoles et alimentaires. Pour donner plus de visibilité aux acteurs économiques, le Gouvernement a proposé de donner la possibilité aux industriels et aux acteurs de la distribution de conclure des contrats pluriannuels, pour une période maximale de trois ans, intégrant une clause obligatoire de révision de prix. La mise en place d'accord-cadre entre les acheteurs et les organisations de producteurs ou associations de producteurs, pour les filières soumises à contractualisation écrite obligatoire et notamment celle du lait de vache, doit permettre de rééquilibrer le rapport de force entre les différents maillons de la filière. Par ailleurs, à l'occasion des débats, il a été proposé d'instaurer une date limite à la conclusion des contrats prévus par l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime. Un tel dispositif n'est techniquement pas applicable, les contrats étant pluriannuels et les prix évoluant mensuellement. De plus, les agriculteurs s'installant après la date limite de signature du contrat se trouveraient dans l'impossibilité de signer un contrat. Le projet de texte, issu des deux chambres parlementaires, doit désormais faire l'objet d'un examen en commission mixte paritaire. Enfin, le Gouvernement, conscient de la nécessité de prendre en compte la volatilité des prix des denrées alimentaires, a adopté le 25 mars 2016 le décret no 2016-360 relatif aux marchés publics qui dispose, dans son article 18, que « Les marchés publics d'une durée d'exécution supérieure à trois mois qui nécessitent pour leur réalisation le recours à une part importante de fournitures, notamment de matières premières dont le prix est directement affecté par les fluctuations de cours mondiaux, comportent une clause de révision de prix incluant au moins une référence aux indices officiels de fixation de ces cours ».

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