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Bernard Perrut
Question N° 99775 au Ministère de l'éducation nationale


Question soumise le 11 octobre 2016

M. Bernard Perrut attire l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les inégalités sociales à l'école, produites par l'école elle-même puisque telle est la démonstration que fait le Conseil national d'évaluation du système scolaire (Cnesco), en rendant publiques les conclusions d'une vingtaine de rapports qui mettent en cause trente ans de politiques éducatives qui, au lieu de résorber les inégalités de naissance, n'ont fait que les exacerber. L'école française est devenue la plus inégalitaire de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), et avec une telle baisse des résultats des élèves défavorisés et l'amélioration du niveau des élites, le fossé se creuse. Aussi, il souhaite connaître les intentions du Gouvernement afin d'agir contre la « longue chaîne de processus inégalitaires » qui se cumulent et se renforcent à chaque étape de la scolarité : inégalités de traitement, inégalités de résultats, inégalités d'orientation, inégalités d'accès au diplôme et même inégalités d'insertion professionnelle. Limités à l'école primaire, les clivages explosent à partir du collège, et les élèves des établissements les plus défavorisés, en fin de 3ème, ne maîtrisent que 35 % des compétences attendues en français contre 80 % dans un contexte privilégié, et à même niveau scolaire, ils ont deux fois moins de chances d'intégrer le lycée général.

Réponse émise le 17 janvier 2017

Le rapport du CNESCO paru en 2016 repose pour l'essentiel sur des données de la recherche produites avant 2013. Il ne prend pas en compte la politique conduite depuis cette date. Il faut rappeler que le rapport diagnostic produit dans le cadre d'une évaluation de politique de publique de la MAP (modernisation de l'action publique) sur l'éducation prioritaire en juin 2013 avait déjà indiqué, d'une part, la nécessité de développer la politique de mixité sociale, d'autre part, de revoir la politique de l'éducation prioritaire pour la rendre plus efficace. Il indiquait en outre l'intérêt de développer une allocation des moyens plus progressive qui prenne davantage en compte la situation sociale des territoires, des écoles et des établissements. Aussi le rapport du CNESCO vient-il, trois ans plus tard confirmer les orientations alors proposées, d'une part, dans le cadre le la loi no 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République et, d'autre part, dans le cadre de la refondation de l'éducation prioritaire en janvier 2014, après une grande consultation des acteurs de l'éducation prioritaire. Il convient, en outre, de bien distinguer l'écho médiatique du rapport, qui en a simplifié à l'extrême le message, du rapport lui-même qui est plus nuancé. Il reste que le constat tel qu'il était disponible dans PISA 2012 et que PISA 2015 confirme sur l'inégalité de l'école française a été pris en compte dès 2013 pour le déploiement des mesures de la refondation de l'école dans le cadre de la loi précitée et dès 2014 pour la refondation de l'éducation prioritaire et de sa nouvelle cartographie. Il est en revanche injuste de dire que le système éducatif serait seul producteur des inégalités à tous les niveaux de son fonctionnement alors que l'école publique répond sur tout le territoire aux besoins d'éducation de tous les enfants, de tous les jeunes. Les principales difficultés sont liées aux clivages sociaux de la société française qui connait des lieux de concentration de difficultés sociales particulièrement marqués. Les personnels de l'éducation nationale font face à ces réalités sociales avec détermination et les orientations nationales visent toutes à les aider dans cette perspective. Le système éducatif, s'il a réussi la phase de massification, doit désormais pouvoir évoluer vers une démocratisation plus affirmée afin de garantir la réussite de tous. Pour cela, la refondation engagée est profonde. Elle concerne, au premier chef, l'école primaire (maternelle et élémentaire) pour laquelle notre pays n'investissait pas assez par comparaison avec d'autres pays qui présentent de meilleurs résultats et surtout une plus grande équité. Elle concerne le contenu des savoirs enseignés : la redéfinition du socle de connaissances, de compétences et de culture a notamment permis de prendre en compte plus fortement la question des langages pour penser, et des méthodes et outils pour apprendre. De la même manière, la réécriture des programmes de l'école maternelle et de l'école obligatoire (école élémentaire et collège) doit permettre un enseignement plus efficace. Elle vise également les organisations des journées des enfants et des jeunes. De nouveaux rythmes dans le premier degré permettent désormais à la France de bénéficier d'enseignement sur cinq matinées par semaine et d'organiser les temps péri-scolaires en permettant à la très grande majorité des enfants de participer à des activités complémentaires de l'école de qualité alors que, jusque là, seule une petite minorité en bénéficiait. Elle vise une plus grande qualité pédagogique : la formation initiale des enseignants du premier comme du second degré qui avait disparu en 2012 a été rétablie et la formation continue est actuellement renforcée. La priorité accordée au primaire a permis le développement du dispositif « plus de maîtres que de classes » qui contribue fortement à faire évoluer les pratiques des enseignants pour une meilleure prise en compte des besoins diversifiés des élèves. L'accueil des enfants de moins de trois ans qui favorise une scolarisation réussie des enfants des milieux les plus défavorisés se développe. Ces deux derniers dispositifs sont principalement implantés dans les territoires les plus défavorisés socialement. Dans ces territoires, où la mixité sociale apparaît difficile à développer, la politique d'éducation prioritaire s'applique et a elle-même été refondée. Cette refondation a permis une révision de la carte des réseaux d'éducation prioritaire afin qu'elle soit mieux adaptée aux réalités socio-économiques d'aujourd'hui. Elle sera dorénavant périodiquement révisée. La refondation de la politique d'éducation prioritaire s'attache à mettre au cœur de l'action de tous les professionnels une approche pédagogique qui répond aux besoins des élèves culturellement les plus éloignés de l'univers scolaire. Pour cela, elle s'appuie sur le développement du travail collectif et de la formation des enseignants, sur la présence de formateurs qui ont été spécifiquement formés pour accompagner les équipes. L'organisation des enseignements est également repensée au collège où de nouveaux temps d'autonomie sont donnés aux enseignants pour mieux prendre en compte les besoins de leurs élèves. L'accompagnement personnalisé, jusque-là réservé aux élèves de sixième, est étendu à tous les niveaux du collège. Une analyse des acquis et des besoins permet d'organiser ces temps d'accompagnement. Les EPI (enseignements pratiques interdisciplinaires) doivent permettre de construire et d'approfondir des connaissances et des compétences par une démarche de projet conduisant à une réalisation concrète, individuelle ou collective qui permet aux élèves de mieux consolider leurs savoirs. L'article L. 111-1 du code de l'éducation insiste, depuis la loi de refondation précitée, sur la nécessité du développement de la mixité sociale, sur la lutte contre les inégalités sociales et territoriales et sur l'éducabilité de tous les enfants. L'ensemble de ces mesures et d'autres encore parmi lesquelles, le « plan de lutte contre le décrochage scolaire », la mise en œuvre des orientations du rapport « Grande pauvreté et réussite scolaire » avec notamment la revalorisation des bourses et des fonds sociaux, le développement des parcours (avenir, citoyen, artistique et culturel, de santé mais aussi d'excellence), le plan « agir pour la mixité sociale et scolaire au collège » constituent un ensemble de mesures d'ampleur et inédit pour faire évoluer l'école de la République dans le sens d'une plus grande efficacité et équité.

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