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Jean-Pierre Cubertafon
Question N° 3969 au Ministère du travail


Question soumise le 19 décembre 2017

M. Jean-Pierre Cubertafon attire l'attention de Mme la ministre du travail sur la maltraitance dont sont victimes certains apprentis et le frein que constitue ce phénomène pour le développement de cette voie de formation. Dans le cadre de la concertation sur la future réforme de l'apprentissage, la ministre et ses équipes ont identifié une trentaine de freins au développement de l'apprentissage. Mais outre le manque d'appétence pour les filières professionnelles ou la mauvaise orientation, des professionnels de sa circonscription évoquent un autre frein, moins exposé : la maltraitance. La liste des abus que ces professionnels de la formation lui font remonter est alarmante : insultes, objets lancés à la figure, attouchements, jours de congés tronqués, vacances octroyées sur le temps de présence au CFA... La liste est loin d'être exhaustive... En 2014, le manifeste « Touche pas à mon commis » du chef étoilé Gérard Cagnat appelait déjà à lever l'omerta sur les abus de la profession. Face à ces maltraitances, le suivi des jeunes est parfois insuffisant. Un certain nombre de CFA, tributaires du versement de la taxe d'apprentissage, sont obligés de « composer » avec le nombre restreint d'employeurs qui consentent à former des apprentis. Des phénomènes de connivence au sein des professions, empêchent parfois que des abus soient révélés et que des mesures soient prises. Il souhaite rappeler que ces personnes mineures doivent encore parfaire leur comportement dans le milieu de l'emploi du fait de leur jeune âge. Leur encadrement doit alors être empreint de patience et de pédagogie, ce qui s'avère parfois difficile pour certains professionnels qualifiés. Les jeunes ne sont parfois pas assez informés des difficultés et des exigences des filières. La conséquence directe de ces abus est une perte d'intérêt pour le métier dès la période d'apprentissage. Certains jeunes abandonnent leur formation en cours de route, d'autres changent totalement d'orientation une fois le diplôme obtenu. Ainsi, au lieu de garantir un avenir, la période d'apprentissage peut les condamner. Alors que le Gouvernement souhaite inciter les jeunes à s'orienter davantage vers l'apprentissage, on peut se demander comment vanter les mérites et les bienfaits de ces filières et inciter les jeunes à les rejoindre s'ils ne sont pas protégés. Il souhaite donc connaître les mesures envisagées afin de mieux repérer et sanctionner ces abus, et ainsi lever ce frein au développement de l'apprentissage. Une meilleure information des apprentis sur leurs droits en cas de maltraitance est-elle envisagée ? Il lui demande s'il est possible d'améliorer le suivi des apprentis, tout au long de leur formation, grâce à un intervenant qui ne soit ni issu de la profession ni du centre de formation afin d'agir en totale impartialité ?

Réponse émise le 10 avril 2018

La France compte plus de 1.3 million de jeunes qui ne sont ni à l'école, ni à l'université, ni en apprentissage et ni en emploi. Cela ne saurait être une fatalité. C'est un gâchis à la fois pour les jeunes, pour notre pays et pour l'économie. Or, l'apprentissage constitue une promesse solide d'insertion professionnelle puisque environ 70% des apprentis trouvent un emploi dans les 7 mois qui suivent la fin de leur formation. Pourtant, notre pays comptait au 31 décembre 2016 seulement 400000 apprentis, soit 7% des jeunes, contre 15% en moyenne dans les pays européens qui ont réussi à endiguer le chômage de masse des jeunes. Cette situation s'explique par le fait que les jeunes et les entreprises se heurtent à de nombreux obstacles. En effet, outre un frein culturel, notre système de l'apprentissage se caractérise par la complexité tant de sa gouvernance, que de son financement et de son opérationnalité, si bien que les jeunes sont privés de formations adaptées à leurs besoins et ne trouvent pas d'entreprises alors de des dizaines de milliers de places ne sont pas pourvues. C'est pourquoi le Gouvernement, avec tous les acteurs concernés, les Régions, les branches professionnelles et les partenaires sociaux, ont décidé de s'engager conjointement dans une mobilisation nationale sans précédent pour une meilleure orientation et une transformation profonde de l'apprentissage. Une large concertation, lancée le 10 novembre dernier, a réuni l'ensemble des acteurs de l'apprentissage autour de Mme Sylvie Brunet, Présidente de la section Travail et Emploi du Conseil économique social et environnemental, dont le rapport a été transmis aux ministres du Travail, de l'Éducation nationale et de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation. La question de la qualité de l'accueil des apprentis au sein de l'entreprise, accueil d'autant plus important que le jeune s'avère être un mineur, a fait l'objet d'un véritable échange au sein de la concertation. Actuellement, l'accueil est, la plupart du temps, personnalisé par le maître d'apprentissage obligatoirement désigné pour la réalisation du contrat. Dans ce contexte, la nécessité de mieux former le maître d'apprentissage est apparue comme une action incontournable pour participer au développement d'un meilleur accueil en entreprise avec bienveillance et pédagogie. Ainsi les branches professionnelles ont l'obligation de négocier tous les trois ans sur la valorisation de la fonction de maître d'apprentissage. De même les branches et les entreprises peuvent négocier les modalités de mise en œuvre et de prise en charge des formations destinées au maître d'apprentissage. Toutefois, les participants de la concertation ont reconnu que les résultats n'étaient pas probants à ce jour, ce qui implique d'aller plus loin. Aussi, parmi les mesures retenues pour la transformation de l'apprentissage par le Gouvernement et présentées lors d'une conférence de presse le 9 février 2018, figure la création d'une certification de maître d'apprentissage. Elle sera accessible par la formation professionnelle ou la reconnaissance des acquis de l'expérience. Les branches professionnelles pourront adapter par accord les qualifications nécessaires pour devenir maître d'apprentissage ou le nombre maximum d'apprentis par maître. Cette mesure contribuera à améliorer nettement l'accueil des apprentis, et ainsi à réduire le taux de rupture de contrat, mais aussi, s'agissant plus spécifiquement de l'objet de votre question, à limiter les cas de maltraitance. Par ailleurs, l'amélioration de l'information des apprentis sur leurs droits en tant que salariés leur permet d'être plus armés et donc de mieux se défendre en sollicitant les personnes ou structures identifiées en cas de difficultés rencontrées en entreprise. En tout état de cause, il ne faut pas minimiser le volet « sanction » de ce type de comportements. A ce titre et dans le cadre de leur mission de contrôle des entreprises, les inspecteurs du travail peuvent suspendre et annuler un contrat et interdire à l'employeur concerné de recruter de nouveau des apprentis. Si les agissements constatés le requièrent, une saisine du procureur de la République est toujours possible.

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