Commission des affaires étrangères

Réunion du 21 octobre 2015 à 9h45

Résumé de la réunion

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La réunion

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Audition de M. Jérôme Bonnafont, directeur d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient au ministère des Affaires étrangères et du Développement international.

La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.

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Nous accueillons M. Jérôme Bonnafont pour une audition centrée sur la situation en Iran, au Yémen et en Libye.

Je viens de me rendre en Iran, accompagnée de Mme Odile Saugues et de M. Philippe Cochet ; M. Pierre Lellouche, qui participait comme moi à la réunion, à Téhéran, du Core Group de la conférence de Munich sur la sécurité, s'est joint à notre délégation. J'ai constaté lors de ces entretiens que la conclusion de l'accord nucléaire a donné une nouvelle impulsion à la relation franco-iranienne. En juillet déjà, lors de la visite du ministre des affaires étrangères à Téhéran, j'avais été frappée par la cordialité du président Rohani et des membres de son gouvernement ; elle s'est confirmée cette fois. Les autorités iraniennes attendent de grandes retombées économiques de cet accord, mais chacun s'inquiète à l'idée de possibles sanctions américaines à l'encontre des établissements qui financeraient le commerce avec l'Iran. Cette préoccupation est d'autant plus forte que les financements disponibles là-bas ne sont pas, contrairement à ce que la presse a indiqué, de 150 milliards de dollars mais de 30 à 40 milliards, sans commune mesure avec des besoins estimés par les responsables iraniens à 1 000 milliards de dollars. Il y a là des perspectives économiques extraordinaires pour la France, dont les entreprises ont manifestement une cote d'amour élevée, singulièrement celles qui se sont maintenues en Iran pendant la période de difficulté ; nous avons compris, en particulier, la faveur dont jouit Airbus. Notre collègue Seybah Dagoma, qui s'intéresse assidûment aux négociations commerciales avec les États-Unis, a déjà commencé de travailler à la question du financement de ces projets et je veux faire le point sur cette question avec les collègues intéressés. Nous entendrons vos précisions avec grand intérêt.

Je vous inviterai à traiter ensuite de la politique intérieure de l'Iran. La négociation puis la signature de l'accord sur le programme nucléaire iranien ont été l'occasion de grandes tensions entre le gouvernement, qui a fait bloc avec le président Rohani, favorable à l'accord, et les conservateurs, dont on trouve beaucoup de représentants au Majlis, dont mon homologue, et qui ont mené la vie très dure au gouvernement à ce sujet. Vous nous direz si cela laisse présager des difficultés dans l'application de l'accord.

En politique étrangère en revanche, même si la tonalité des discours diffère, les responsables Iraniens soutiennent tous le président syrien et l'intervention russe en Syrie. Certains parmi les plus conservateurs sont allés, pendant la réunion du Core Group, jusqu'à nier la responsabilité du régime dans les largages de bombes sur la population, se limitant sobrement à expliquer, quand on leur rappelle que seul le régime détient les hélicoptères d'où les barils d'explosifs sont lâchés, que toute guerre cause des morts. Tous ne disent pas cela, mais tous s'accordent pour attribuer cette tragédie à des terroristes venus de l'extérieur – des pays européens, dont la France, et de pays voisins – l'Arabie saoudite mais aussi la Turquie – et qu'il convient de soutenir le régime soumis à ces attaques de l'étranger. Notre seul point de convergence a été qu'il n'est pas de solution uniquement militaire possible et qu'un accord politique est indispensable. Mais les divergences sont profondes tant sur l'analyse des causes de la tragédie que sur la manière de parvenir à la transition politique. Traiter de la politique étrangère de l'Iran vous conduira donc à aborder la situation en Syrie.

Selon les autorités iraniennes, la crise au Yémen est entièrement due à la paranoïa des Saoudiens qui, expliquent-elles, suspectent l'Iran de manipuler les houthistes, alors même que c'est l'Arabie saoudite qui est à l'origine de la crise. Sur le terrain, les forces de la coalition progressent difficilement et leurs bombardements sont responsables de 70 % des pertes civiles, estimées à 5 000 personnes. Les Nations Unies proposent une médiation pour parvenir à une solution politique ; selon vous, quelles en sont les chances de succès ?

Nous avons évoqué avec le ministre des affaires étrangères l'hypothèse de la formation d'un gouvernement d'union nationale en Libye, qui venait d'être annoncée. Quelle est l'influence des durs, à Tobrouk et à Tripoli ? Quelles sanctions envisager, dans le cadre des Nations Unies, si l'accord n'est pas signé ? En parle-t-on au niveau européen ? Quel est votre avis sur la position de l'Italie d'une part, sur l'impact pour la Tunisie de la situation en Libye d'autre part ? Nous sommes très attachés à la réussite de la transition en Tunisie ; pourrions-nous faire davantage pour aider ce pays, sachant que l'attribution du Prix Nobel de la paix aux représentants du Dialogue national en Tunisie ne suffira pas à susciter des emplois dans ce pays emblématique.

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Jérôme Bonnafont, directeur d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient au ministère des affaires étrangères et du développement international

C'est pour moi une situation singulière de m'adresser à vous immédiatement après que le ministre a largement abordé ces sujets ; je m'attacherai à vous apporter les précisions demandées. L'accord sur le programme nucléaire iranien, d'abord. La France a veillé à ce qu'il soit conçu de manière à garantir le parallélisme entre le respect de ses obligations par l'Iran d'une part, la levée ou la non-levée des sanctions et leur rétablissement éventuel d'autre part. Il le fallait pour que l'accord soit crédible sur le plan de la non-prolifération et pour que l'Iran sache qu'en cas de non-respect de ses obligations, la non-levée ou le rétablissement des sanctions serait automatique, sans qu'il soit besoin d'un nouveau vote du Conseil de sécurité.

Le dimanche 18 octobre dernier a été « le jour de l'adoption » : à cette date ont été adoptés les cadres législatifs et réglementaires de la future suspension des sanctions contre l'Iran. Auparavant étaient intervenus le vote du Congrès américain – qui n'était pas acquis d'emblée – et celui du Majlis iranien, organisé selon un calendrier tel que sa propre approbation de l'accord fût postérieure à celle du Congrès.

Nous attendons maintenant le rapport que l'Agence internationale de l'énergie atomique publiera en décembre. S'il conclut au respect par l'Iran de ses obligations, la levée des sanctions commencera ; elle sera progressive et dépendra du respect des engagements pris, qu'il s'agisse des fermetures de sites, des inspections ou de la fourniture de certains documents sur l'historique des sites.

Comme plusieurs de nos partenaires occidentaux, nous avons engagé la normalisation de nos relations politiques et économiques avec l'Iran. Sur le plan politique, elle a été illustrée, en juillet dernier, par la visite du ministre des affaires étrangères en Iran à laquelle vous avez participé, madame la présidente, et par l'invitation faite au président Rohani de venir à Paris où nous l'accueillerons dans quelques semaines, après sa visite à l'Unesco le 17 novembre.

Parallèlement, des contacts économiques ont lieu dans les secteurs d'intérêt particulier pour l'Iran dans lesquels l'offre française est très fournie. Cela vaut pour le secteur de la santé, avec une visite attendue de la ministre de la santé. Cela vaut aussi pour les infrastructures, car les sanctions ont entraîné un retard de dix ans dans les investissements en Iran ; dans ce domaine, nous proposerons aux Iraniens des offres conformes aux obligations d'une croissance respectueuse des objectifs de réductions des émissions de gaz à effet de serre. Cela vaut encore pour les transports et l'aéronautique, avec, vous l'avez mentionné, des perspectives pour Airbus.

Outre cela, nous ne négligerons pas la reprise des relations culturelles, scientifiques et universitaires. Nos consulats ont exercé pendant longtemps une vigilance particulière dans l'octroi de visas aux étudiants et aux scientifiques iraniens pour ne pas permettre le développement des activités de l'Iran dans le domaine nucléaire. Nous préparons une politique de plus grande ouverture progressive afin que les étudiants iraniens retrouvent le chemin de nos universités et que la coopération avec les scientifiques d'Iran regagne en intensité dans tous les domaines autres que le nucléaire.

Reste en suspens la question compliquée du financement de ce commerce. À un tête-à-tête économique avec les États-Unis, les Iraniens préfèrent une diversité de partenaires, dont la France, et la mission d'une centaine de chefs d'entreprise conduite en Iran par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et par le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger a reçu un très bon accueil.

Mais si élevé est le risque de sanction induit par l'extra-territorialité des lois américaines que notre secteur bancaire, ayant déjà payé très cher à cause de cela, est extrêmement méfiant à l'idée de financer le commerce avec l'Iran. Aussi avons-nous défini une politique en deux axes. Pour assurer la garantie juridique des exportations vers l'Iran, nous recherchons des établissements bancaires français ou étrangers pouvant mettre sur pied des circuits financiers sans liens ni avec les États-Unis ni avec le dollar américain ; c'est une entreprise extrêmement complexe. D'autre part, nous entendons régler avec les Américains la question des sanctions secondaires. La partie technique de ce travail est conduite par le Trésor en liaison avec nos partenaires allemands et britanniques ; sur le plan politique, le ministre a eu plusieurs fois l'occasion d'insister auprès du secrétaire d'Etat américain sur la nécessité d'une levée des sanctions secondaires. Jusqu'à présent, les Américains disaient attendre le jour de l'adoption de l'accord avec l'Iran pour traiter la question au fond ; il va falloir maintenant entrer dans des discussions concrètes et détaillées. M. John Kerry a certes réitéré son engagement politique à ce sujet mais des assurances seront nécessaires.

L'attitude de l'Iran en politique étrangère est un sujet de grave préoccupation pour nos partenaires de la région, et d'interrogations pour nous. Comment ne pas s'interroger sur ce que fera l'Iran quand il aura récupéré sa pleine capacité financière ? Nous prenons acte des intentions pacifiques exprimées par l'Iran dans les crises régionales, en Syrie, en Irak, au Yémen ou au Liban. Ces sujets doivent être discutés de manière approfondie et avec franchise avec l'Iran. Votre mission y contribue ; le président de la République s'est entretenu avec le président Rohani à New York et le rencontrera à nouveau ; le ministre des affaires étrangères s'entretient très régulièrement avec son collègue Javad Zarif. À l'occasion de la visite en France du président Rohani, nous créerons un mécanisme de dialogue politique permanent avec l'Iran.

La situation intérieure de l'Iran est assez compliquée. Le président Rohani et son gouvernement ont été convaincus de la nécessité d'un accord en constatant que le prix économique payé pour le raidissement de leur politique nucléaire était incommensurable avec les bénéfices potentiels qu'ils pouvaient en tirer. Ce réalisme politique fait l'objet de deux lectures opposées : celle des conservateurs classiques, pour lesquels la République islamique d'Iran n'a pas à entrer dans une négociation de cette sorte ni à passer sous les fourches Caudines de la communauté internationale. Celle, aussi, des pasdarans, qui mènent une politique quasiment autonome en Syrie et au Moyen Orient – comme l'a montré la récente visite alléguée à Moscou du général Ghassem Souleimani, chef de la force al-Qods Le président Rohani a gagné cette manche et conduit la normalisation. Parce que des élections auront lieu sous peu, il a besoin d'un progrès économique rapide pour démontrer à la population iranienne que la politique qu'il a choisie est gagnante. Cela explique la hâte du gouvernement à conclure des accords économiques avec nous et notre optimisme relatif quant à l'application des obligations figurant dans l'accord sur le programme nucléaire iranien.

La crise au Yémen est avant tout d'origine yéménite. Après la transition politique qui a eu lieu en 2011-2012, l'ancien président Ali Abdallah Saleh est resté au Yémen, avec son immense fortune. N'admettant pas son éviction, il a fait alliance avec les houthistes, et lorsque ces derniers ont décidé de partir à l'assaut du nouveau régime qui ne prenait pas assez en compte leurs revendications à leurs yeux, ils ont bénéficié de ses largesses. Rien ne nous permet de dire que l'Iran est à l'origine de cette rébellion ; cela demeure pour nous une interrogation.

À l'été 2014, les houthistes ont pris Sanaa et évincé le gouvernement yéménite légitime, dont une résolution du Conseil de sécurité a demandé le rétablissement. Dans le même temps, une coalition de dix pays emmenés par l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis a procédé à des opérations aériennes militaires très dures qui ont abouti à l'inversion du rapport de forces, et le gouvernement légitime a pu reconquérir des villes et des territoires. Le médiateur mauritanien Ismaïl Ould Cheikh Ahmed, envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies au Yémen, a essayé plusieurs fois d'amener les parties à négocier.

Dans une lettre récente à Ban Ki-moon, les houthistes ont dit accepter que la reconnaissance du gouvernement légitime serve de base à la négociation, et un membre de ce gouvernement a également accepté d'entrer en négociation. Un faible espoir existe donc qu'une négociation s'engage. Il le faut, car le Yémen est en proie à une grave crise humanitaire provoquée par les combats qui ont fait de nombreux morts et détruit une partie du patrimoine et bon nombre des infrastructures du pays, et par l'impossibilité de faire parvenir l'aide humanitaire là où elle est indispensable. L'urgence est très grande ; nous appuyons continûment les efforts des Nations Unies visant à la signature d'un accord et nous avons adressé aux parties des messages les invitant à négocier car, car comme l'a dit le ministre, le Yémen est un pays dans lequel on ne gagne pas une guerre.

En Libye, les efforts de médiation sont les otages des extrémistes des deux bords. M. Bernadino Léon, représentant spécial de Ban Ki-moon pour la Libye, a mis au point l'accord de Skhirat, qui prévoit une formule équilibrée de transition vers un gouvernement d'unité nationale. La majorité des groupes de Tobrouk et de Tripoli donnait le sentiment d'accepter de marcher dans cette direction et M. Léon a pu les convaincre de repartir de Skhirat vers leurs bases respectives pour faire approuver l'accord. Malheureusement, les présidents des deux instances parlementaires concurrentes – le mandat de celle de Tobrouk, que nous considérons seule légitime, s'achève aujourd'hui – appartiennent aux groupes hostiles à l'accord et manoeuvrent pour empêcher un vote favorable. Toute la difficulté est donc de convaincre les modérés de ne pas céder à la pression des minorités extrémistes, en les persuadant qu'il n'est pas de victoire possible par les armes et que, si l'accord ne se fait pas, ceux qui ramasseront la mise seront les milices armées, ainsi que Daech et al-Qaïda, qui sont de plus en plus agressifs dans l'ensemble de la région. Nous sommes aidés dans cet effort par la population libyenne, très lasse de ces jeux de pouvoir et des milices. Il faut profiter des dernières semaines pendant lesquelles M. Bernardino Léon exercera ses fonctions pour tenter de consolider l'accord.

Le ministre l'a dit : si l'accord ne se faisait pas, il nous faudrait réévaluer toute notre politique à l'égard du Parlement de Tobrouk dont le mandat est venu à échéance, de Tripoli, de la lutte anti-terroriste et des possibilités de coopération avec la Libye. Si un accord partiel se fait – nous sommes en train de travailler avec l'Italie et le Royaume Uni sur la sécurité, et avec la force des Nations Unies sur la coopération générale – on verra comment s'engagent la sécurisation et la reprise de la construction d'un État libyen. Là encore, nous avons des intérêts directs dans cette affaire : l'arrêt de la propagation du terrorisme en Libye avec ses conséquences potentielles sur notre sol ; la reprise en main du territoire libyen, qui est actuellement une voie de transit pour les populations qui cherchent à gagner l'Europe.

Nous avons été heureux d'apprendre l'attribution du Prix Nobel de la paix aux représentants du Dialogue national en Tunisie, récipiendaires que le président François Hollande a, le premier des chefs d'État étrangers, reçus le 16 octobre. Nous sommes très engagés dans la sécurité et l'économie de ce pays. Sécurité et économie sont étroitement liées, puisque la dégradation de la situation économique de la Tunisie est le contrecoup des attentats de Sousse et du musée du Bardo, l'effondrement des recettes touristiques de la Tunisie provoquant faillites et chômage en cascade. Les terroristes visent évidemment à précipiter la faillite économique du gouvernement pour pouvoir démontrer l'échec de la démocratie parlementaire dans les pays arabes et musulmans. Sur le plan sécuritaire, nous oeuvrons avec le gouvernement tunisien, dans le cadre du G7, à la reconstruction des forces de police et de sécurité et à la sécurisation des zones touristiques. Sur le plan économique, nous travaillons avec les institutions financières internationales de la Tunisie pour répondre aux éventuels besoins d'urgence – le pays a ainsi demandé à bénéficier d'une exception au règlement de l'OCDE régissant l'accès aux crédits à taux concessionnels ; pour aider aux réformes structurelles qui contribuent à la création d'entreprises et d'emplois ; pour identifier les projets au lancement desquels pourraient être employés les centaines de millions d'euros disponibles pour la Tunisie dans les institutions financières internationales. Enfin, le Premier ministre tunisien est attendu à Paris au tout début de l'année 2016.

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Nous nous devons en effet d'aider également la Tunisie par une coopération technique. Sur un autre plan, je me félicite que la décision ait été prise de créer un mécanisme de dialogue permanent avec l'Iran.

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J'ai participé à une mission en Iran en 2014 et à nouveau ces jours derniers. En un an, les autorités n'ont en rien assoupli leur position sur le régime syrien, ni sur les perspectives de solution politique. Voyez-vous dans la récente visite de Bachar al-Assad à Moscou le signe d'une éventuelle correction de la stratégie russe au sujet de la Syrie ? Pourrait-on en ce cas espérer que, parallèlement, l'Iran revoie la sienne ?

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Il faudra vraiment beaucoup chercher pour trouver en Syrie des katibas modérées, et armer le Front al-Nosra comme le font les États-Unis, répétant les erreurs qu'ils ont commises en Afghanistan, est une politique démentielle.

D'évidence, la France joue, pour des raisons commerciales, la carte de l'Arabie saoudite. C'est pourtant un État très fragile, si même c'est un État, où le risque de chaos est très élevé. On trouve partout des nids de frelons : de 4 000 à 5 000 djihadistes saoudiens combattent en Syrie aux côtés de Daesh ou d'al-Nosra, et autant au Yémen. En Arabie saoudite même, les autorités étant incapables d'assurer la sécurité intérieure, les attentats sont permanents. De plus, l'Arabie saoudite a joué les apprentis sorciers en Syrie, en Irak et ailleurs en livrant quelque 13 000 missiles à des insurgés ; même si la paix revient un jour, ces armes circuleront. Je me félicite donc que nous reprenions le dialogue avec l'Iran ; ce pays peuplé de 80 millions d'habitants disciplinés et formés correctement aura, à terme, un impact certain dans la région. Le rééquilibrage de notre politique est urgent. Si nous ne le faisons pas, nous le payerons très cher.

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La crise, très ancienne, que connaissait la Syrie a été prolongée par l'intrusion de Daesh. Depuis dix ans, la France et l'Occident au sens large échouent dans l'analyse et la résolution de cette crise, dont on fera le bilan le moment venu – et la lecture des comptes rendus des réunions de notre commission au long de cette période permettra de faire une histoire qui ne correspondra pas forcément aux discours des exécutifs successifs. En l'état, peut-on considérer que les trois priorités, pour la France, sont, dans l'ordre, la lutte contre Daesh, le maintien de l'intégrité de la Syrie et la résolution du « problème » Bachar al-Assad ?

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Il faut pour commencer, en attendant une transition politique, obtenir l'arrêt des largages de barils d'explosifs sur la population. Comment y parvenir ?

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Vous êtes nouveau dans vos fonctions, monsieur le directeur, et auriez-vous eu l'occasion de nous rencontrer plus tôt que vous l'auriez constaté : à propos de la Syrie, l'opinion presque unanime qui se dégage au sein de notre commission n'est pas du tout en accord avec la ligne du Quai d'Orsay.

Vous avez présenté le Hezbollah comme empêchant l'élection du président de la République libanaise. Je ne partage pas cette opinion. Le Hezbollah considère que cette élection est l'affaire des chrétiens, au sein desquels règne la zizanie, et que s'ils s'accordent sur une candidature, il s'en satisfera si le candidat est acceptable. Le Quai d'Orsay a-t-il un candidat préféré pour la présidence du Liban ?

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Non seulement notre consulat à Beyrouth, saturé par l'afflux de réfugiés syriens, connaît de grandes difficultés de fonctionnement, mais il est de plus en plus difficile pour les réfugiés qui cherchent à obtenir l'asile d'y accéder, notamment depuis que les Russes ont attaqué Lattaquié. Pourriez-vous faire le point sur la situation ?

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Les interventions d'États tiers dans plusieurs pays d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient déstabilisés par des affrontements terroristes à caractère religieux se font sans réelle coordination. Ainsi M. Laurent Fabius vient-il de nous dire que la France ne peut être partout et tout le temps en première ligne, et qu'en Lybie c'est l'Italie qui a vocation à intervenir. Il y a là quelque chose de surréaliste.

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Pour ajouter à l'inextricable de la situation dans cette partie du monde, le Hezbollah est évidemment le pire danger qui soit pour la région mais, paradoxalement, appuyé par l'Iran, il se bat aujourd'hui, au Sud du Liban, contre le Front al-Nosra, qui bénéficie lui-même de l'appui bienveillant des Israéliens…

En Libye, des gens qui, en théorie, ne veulent pas s'entendre, se parlent et préparent un gouvernement d'union nationale pour lequel des noms circulent déjà. On sait quelle carotte propose la communauté internationale par la voix de M. Bernadino Léon – une coopération en vue de soutenir le futur gouvernement –, mais avec quel bâton menacer Tobrouk et Tripoli pour les contraindre de débloquer la situation ?

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Dans l'hypothèse où M. Bernardino Léon échouerait à faire s'accorder Tobrouk et Tripoli, quel pourrait être le rôle de Daech ? La France pourrait-elle s'appuyer sur l'Égypte ?

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Lors de la visite du Premier ministre en Égypte, ses interlocuteurs lui ont dit leur extrême inquiétude face à la progression de Daech en tous lieux. Nous avons de nombreux points d'accord avec l'Égypte, mais j'observe qu'elle ne critique pas l'intervention russe en Syrie.

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En Syrie, les positions politiques du camp occidental évoluent depuis qu'il se trouve confronté à l'intérêt que la Russie et l'Iran portent à ce dossier. On le voit notamment pour ce qui concerne le maintien, ou non, de Bachar al-Assad. Certes, il ne représente pas l'avenir du pays, mais il est là. Ce qui est inacceptable, c'est de lancer des bombes sur la population. Le camp occidental, la Russie et l'Iran ne pourraient-ils avoir pour action diplomatique concertée de conditionner la place de Bachar al-Assad à la table des négociations à l'arrêt immédiat des largages de barils d'explosifs ?

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Des votes portant sur la reconnaissance de l'État palestinien ont eu lieu l'année dernière dans plusieurs parlements européens. Ce fut le cas au Parlement français qui, en adoptant la résolution sur la reconnaissance de l'État de Palestine, invitait le Gouvernement à aller en ce sens. Où en sont les discussions aux Nations Unies à ce sujet et quelle est la feuille de route française pour progresser dans cette voie ?

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Quelle est la situation en Jordanie, qui doit absorber un nombre considérable de réfugiés ?

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Quelques précisions avant de céder la parole à M. Bonnafont pour lui permettre de répondre à vos questions. Pour commencer, l'expression « camp occidental » me laisse réticente. Même si certains Iraniens tendent à considérer les pays de l'Union européenne et les États-Unis comme un ensemble indifférencié, ce n'est pas un bloc et bien des questions demeurent sur le positionnement des différents gouvernements à l'égard de la Syrie. Ensuite, M. Bonnafont, qui a dirigé le cabinet de M. Alain Juppé, alors ministre des affaires étrangères, n'ignore rien des débats qui agitent notre commission. Enfin, monsieur Loncle, pour ce qui concerne la Syrie et l'Iran, tout le monde s'est beaucoup trompé, y compris nous-mêmes : un moment séduits par M. Ahmadinejad, n'avons-nous pas conduit une mission en Iran il y a quelques années, pour déchanter ensuite ?

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Jérôme Bonnafont, directeur d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient au ministère des affaires étrangères et du développement international

Nous soumettrons à nos partenaires les plus proches, dans les jours qui viennent, un projet de résolution demandant à toutes les parties au conflit d'arrêter les bombardements indiscriminés en Syrie. Étant donné l'évidente teneur humanitaire du texte, nous espérons éviter un veto russe lors de sa présentation au Conseil de sécurité des Nations Unies. Si la Russie met son veto à l'adoption de cette résolution, cela signifie qu'il sera ensuite très difficile d'engager la négociation politique sur la base de la prise en compte minimale des besoins humanitaires de la population syrienne.

Nous ferons cette tentative car les bombardements aux barils d'explosifs sont source de terribles souffrances pour la population, et aussi l'une des raisons principales de son exode. M. Bachar al-Assad, que certains d'entre vous semblent considérer comme combattant l'islam radical, vide délibérément son pays, en bombardant sa propre population, pour nous affaiblir par la menace des réfugiés. J'aimerais rappeler à la commission que l'on dénombre à ce jour 250 000 morts en Syrie, pour une écrasante majorité du fait des forces du régime. Je recommande à chacune et chacun de consulter les éléments publics du dossier César, recueil de photos officielles prises et archivées par le régime et divulguées par un photographe légiste qui, n'en pouvant plus, a réussi à les faire sortir de Syrie. Ces photos témoignent d'un régime qui a torturé, coupé en morceaux et massacré des dizaines de milliers de ses concitoyens, documentant et archivant soigneusement tout cela. Ces clichés ont été donnés aux autorités françaises qui les ont fait expertiser pour s'assurer de leur authenticité ; une fois celle-ci avérée, le Ministère des Affaires étrangères, sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale qui oblige toute autorité publique à transmettre à la justice les informations qu'elle possède si elle a connaissance d'un crime ou d'un délit, a transmis le dossier au procureur de la République afin qu'il puisse conduire une enquête.

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Ce qui concourra sans nul doute à une solution.

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Jérôme Bonnafont, directeur d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient au ministère des affaires étrangères et du développement international

C'est à la justice qu'il appartiendra d'en décider.

Enfin, lorsque le Premier ministre s'est rendu, en Jordanie, dans un lieu de recueil et d'enregistrement tenu par le Haut-Commissariat pour les réfugiés, il a voulu connaître les raisons de leur exil. Jusqu'à une date récente, l'écrasante majorité d'entre eux fuyaient les exactions du régime ; ce n'est que depuis quelques semaines qu'ils sont aussi chassés par Daesh et les milices islamistes.

Telle est notre action dans le cadre des Nations Unies. M. Staffan de Mistura, envoyé spécial de Ban Ki-moon pour la Syrie, fait en permanence des propositions pour que l'ONU soit en mesure de conduire le dialogue politique dès qu'il sera possible. La base de travail est la Déclaration de Genève publiée à l'issue d'une réunion à laquelle participaient les parties prenantes, dont le ministre des affaires étrangères syrien. La formule agréée par tous est celle d'un gouvernement de transition doté des pleins pouvoirs exécutifs et en mesure de travailler dans un climat de neutralité. Bachar al-Assad ne peut d'évidence être considéré comme l'animateur d'un gouvernement travaillant dans un climat de neutralité ; la question de sa permanence à la tête de l'État a donc déjà été traitée à Genève..

Certains ont voulu voir dans la conduite des opérations en Syrie une rivalité entre la Russie et de l'Iran ; on assiste plus vraisemblablement à une répartition des rôles. Des conseillers iraniens sont présents de longue date et en très grand nombre aux côtés du régime syrien, comme le sont les forces du Hezbollah. Si la Russie a fait croire cet été qu'elle pensait possible une solution politique en Syrie afin de préparer tranquillement son opération militaire, c'est qu'elle considérait certainement que Bachar al-Assad était sur le point de ne plus être assez fort pour rester en place. Et c'est ainsi que les forces aériennes russes – dont 80 % des frappes ne touchent pas Daesh – sont venues appuyer l'offensive des forces du régime pour détruire ceux qui, sur l'échiquier politique, sont entre le régime et Daesh. L'objectif est d'aboutir à une confrontation totale entre le régime syrien et Daesh pour nous obliger à choisir Bachar al-Assad comme allié contre ce mouvement terroriste qui est sa créature.

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Jérôme Bonnafont, directeur d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient au ministère des affaires étrangères et du développement international

Cela ne l'est pas. En marge du sommet en format « Normandie » qui a eu lieu le 2 octobre à Paris, le président de la République et le ministre des affaires étrangères ont rappelé au président Poutine les principes dont le respect ferait que nous pourrions considérer la Russie comme faisant partie de la coalition anti-Daesh : que ses frappes soient dirigées contre Daesh et les groupes islamistes radicaux ; que les civils soient protégés ; que l'on parvienne rapidement à une solution politique. Malheureusement, la Russie n'a répondu positivement à rien de cela.

La situation est donc très compliquée, mais nous devons aller de l'avant car notre sécurité et notre stabilité sont directement menacées. La menace la plus évidente est celle du terrorisme puisque des Français ou des individus résidant en France partis combattre dans les rangs de Daesh peuvent revenir à tout moment – c'est déjà le cas pour certains. D'autre part, les réfugiés, qui sont plus de deux millions en Turquie, plus d'un million en Jordanie et un million au Liban, et auxquels s'ajoutent entre 6 et 8 millions de personnes déplacées à l'intérieur de la Syrie, sont dans une situation sans issue. C'est dire l'urgence d'une solution politique à ce conflit ; ce sera l'objet de nos travaux au cours des prochaines semaines.

C'est aux Libanais qu'il appartient de trouver un accord politique de telle sorte que les rivalités régionales qui s'exercent sur leur sol n'empêchent pas le fonctionnement de leurs institutions. Nous constatons qu'il est remarquablement compliqué de trouver une personnalité dont la candidature à la présidence de la République libanaise satisferait à la fois les chrétiens de toutes obédiences, les sunnites et les chiites. La France, qui ne souhaite ni ne peut dicter leur choix, ne reste pas inactive pour autant. Le président du Sénat, se rendra dans quelques jours au Liban où il aura des entretiens avec de nombreuses personnalités dont M. Nabih Berri, président du Parlement, qui cherche à réunir les forces politiques. Dans quelques jours, le ministre de l'intérieur sera à Beyrouth en même temps que la mission de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dépêchée au Liban pour examiner les demandes de 250 candidats à l'asile en France. Nos consulats au Liban, en Jordanie et en Turquie connaissent des moments difficiles en raison de l'afflux des demandes d'asile, qui doivent toutes être traitées individuellement et de manière approfondie. Nous examinons les moyens propres à faciliter la situation de nos collègues.

À propos de la Libye, nous discutons de l'édiction de possibles sanctions individuelles à l'encontre de ceux qui veulent empêcher la mise en oeuvre de l'accord de Skhirat ; la difficulté est de se mettre d'accord sur la liste des personnes concernées, dans les deux camps, et nos analyses peuvent diverger. Le ministre n'a pas dit que nous laissions le monopole de l'action en Libye à l'Italie mais que l'Italie ayant manifesté l'intention de conduire les travaux relatifs à la sécurité dans ce pays, nous la laissons agir comme chef de file. Cela ne nous empêchera pas de participer, à notre mesure et à notre proportion, à la politique qui sera suivie, mais la France ne peut être en première ligne sur tous les fronts. L'Égypte est très proche des autorités de Tobrouk et du général Haftar. Nous avons un dialogue avec les Égyptiens : il y a ainsi une répartition des rôles dans laquelle l'Égypte incite Tobrouk à coopérer avec M. Léon, ce qui permet au représentant de Ban Ki-moon de conduire son dialogue avec Tripoli en sachant que Tobrouk est assuré d'un appui fort.

Le Premier ministre était en Jordanie il y a quelques jours. Les institutions fonctionnent, mais le pays doit faire face à deux défis préoccupants, dont les autorités jordaniennes se sont ouvertes : d'une part, la présence de plus d'un million de réfugiés pèse très lourdement sur un État qui compte entre 6 et 8 millions d'habitants ; d'autre part, le terrorisme car l'offensive de Daesh, plus au Sud, peut menacer le pays assez rapidement. Les discussions ont porté sur la présence des appareils français qui, depuis la Jordanie, participent aux frappes de la coalition en Irak et sur les moyens d'apporter un appui économique et financier à la Jordanie.

Pour ce qui concerne Israël et la Palestine, monsieur Hamon, notre préoccupation première, comme le ministre y a insisté à l'instant, est la très forte tension qui règne actuellement. S'agissant de la reconnaissance de l'État palestinien, un geste symbolique a été fait à New York, en septembre : le drapeau de la Palestine a été hissé lors de l'ouverture de l'assemblée générale des Nations Unies après l'adoption de la résolution autorisant les États ayant le statut d'observateur à faire flotter leur drapeau devant le siège. La France a recherché un consensus européen sur ce point ; constatant qu'il ne se trouverait pas, nous avons voté cette résolution avec neuf autres pays membres de l'Union européenne (Belgique, Malte, Suède, Irlande, Pologne, Luxembourg, Slovénie, Espagne et Italie). Dans le même temps, le premier séminaire inter-gouvernemental franco-palestinien se tenait à Paris, où M. Mahmoud Abbas était attendu peu après. Nous privilégions la multiplication des efforts visant à la reprise de la négociation entre Israéliens et Palestiniens. Ce qui est très préoccupant est que les uns et les autres en viennent à remettre en cause le principe de l'établissement de deux États, ou sa faisabilité ; s'il en était vraiment ainsi, où serait la paix ? Il faut construire la mobilisation internationale pour faire comprendre aux parties que la négociation doit reprendre et que les nouvelles violences ne sont pas ponctuelles mais révélatrices d'une tension structurelle extrêmement forte entre des Palestiniens à bout de force et les Israéliens qui veulent étendre les colonies.

Le Quartet pour le Moyen-Orient n'exerçant pas de pressions suffisamment efficaces, il convient de le refonder en créant un groupe international de soutien élargi réunissant le Quartet et les pays européens et arabes, chargé de convaincre les parties de retrouver les conditions d'un accord – car si Israël se dit prêt à négocier sans conditions, M. Mahmoud Abbas ne peut reprendre place à la table des négociations aussi longtemps que la colonisation se poursuit et que la situation à Jérusalem est celle que l'on sait. Nous essayons de convaincre qu'il faut surmonter ces obstacles.

Enfin, pour répondre directement à madame Saugues, nous n'avons d'autres indications que la déclaration faite par Bachar al-Assad à l'issue de sa visite surprise à Moscou, qu'il dit avoir faite pour remercier la Russie de son intervention en Syrie ; le président Poutine explique pour sa part que le peuple syrien était héroïque car il se battait seul contre le terrorisme international. Une interprétation très optimiste de cette visite serait que la Russie préparerait la sortie négociée de Bachar al-Assad. Il est à craindre que cette visite à Moscou ne soit au contraire la manifestation claire de son très fort appui aux côtés de celui que M. Poutine considère comme le chef indiscuté de la Syrie.

Le cadre d'une solution politique est la Déclaration de Genève, qui avait été agréée par l'ensemble des parties. Elle tend à la construction d'une transition politique autour d'un gouvernement transitoire chargé de permettre l'arrêt des combats et le retour à une vie normale. Pour y parvenir, il faut réunir toutes les parties autour d'une table ; M. Staffan de Mistura s'y emploie. Il a proposé, sans y réussir encore, la création de groupes de travail thématiques composés de personnes du régime et de membres de l'opposition ; nous appuyons ses efforts. Il n'y aura pas de solution militaire en Syrie, pays déjà très largement dévasté. Il faut donc continuer le dialogue avec les Russes et avec les Iraniens pour les convaincre que la tension dans la région et les risques induits par la guerre en Syrie sont infiniment supérieurs aux bénéfices qu'ils peuvent en escompter. L'intégrité et l'unité de l'Irak, de la Syrie, de la Libye et du Yémen sont menacées ; nous ne croyons pas à des solutions fondées sur le démantèlement d'États selon des critères confessionnels mais à des solutions inclusives dans lesquelles l'unité de ces États est préservée et de nouveaux contrats politiques sont passés entre les composantes pour aboutir à des gouvernements. L'exemple tunisien est un bel exemple de réussite de ce point de vue. Pourquoi ce travail politique ne pourrait-il produire un jour ses fruits en d'autres lieux ?

La séance est levée à onze heures quinze.