Programmation 2018-2022 et réforme de la justice — Texte n° 1548

Amendement N° 583 (Rejeté)

Publié le 14 janvier 2019 par : M. Nilor, Mme Bello, M. Brotherson, M. Bruneel, Mme Buffet, M. Chassaigne, M. Dharréville, M. Dufrègne, Mme Faucillon, M. Jumel, Mme Kéclard-Mondésir, M. Lecoq, M. Peu, M. Fabien Roussel, M. Serville, M. Wulfranc.

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Compléter cet article par l'alinéa suivant :

« IX. –Les dispositions du présent article ne sont pas applicables dans les collectivités d'Outre-mer ».

Exposé sommaire :

La procédure de comparution à délai différé est affichée comme une mesure de simplification essentielle du projet de loi, souhaitée et attendue de nombreux professionnels.

En effet, il est prétendu que la procédure de comparution différée permettrait ainsi, en l'attente du seul résultat d'investigations (réquisitions, examens techniques ou médicaux) nécessaire à la comparution, le prononcé d'une mesure de sûreté avant le jugement devant le tribunal saisi de l'action publique.

Il existe actuellement une procédure rapide de comparution immédiate qui prévoit qu'à la suite d'une garde à vue, une personne soit immédiatement traduite devant le Tribunal correctionnel pour y être jugée.

S'il n'est pas possible pour le Tribunal de se réunir ce jour-là, le Parquet peut demander à un juge des libertés et de la détention dit juge délégué, de placer la personne mise en cause en détention provisoire jusqu'à ce que le Tribunal puisse se réunir dans un délai qui ne saurait excéder 3 jours.

Dans les faits, quand le dossier n'est pas prêt à être jugé par défaut notamment de certaines pièces, le Tribunal renvoie l'examen du dossier à une autre date et statue sur un maintien en détention ou un contrôle judiciaire.

Hors le cadre de la comparution immédiate, le Parquet à la possibilité de procéder à une convocation devant le Tribunal par procès-verbal et de saisir le Juge des libertés et de la détention afin que la personne poursuivie soit placée sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique jusqu'à sa comparution devant le Tribunal.

Il a aussi la possibilité de saisir un juge d'instruction qui devra alors instruire à charge et à décharge dans un cadre qui permet le placement en détention provisoire de la personne mise en cause mais permettant aux droits de la défense de s'exercer avec beaucoup plus d'acuité.

C'est pourquoi l'utilité d'une telle réforme apparaît pour le moins discutable.

Ce d'autant que les conséquences de ces modifications apparaissent dangereuses au regard des atteintes aux principes protecteurs de la liberté.

En effet, la procédure de comparution à délais différé permet de diminuer les saisines de juges d'instruction et évite les mesures de protection mise en place par le législateur par la nécessité d'un double regard du juge d'instruction et du juge des libertés et de la détention sur le placement en détention provisoire et son renouvellement.

Cela constitue un moyen d'économie déguisée, le placement en détention provisoire dans le cadre d'une mesure d'instruction supposant l'intervention et la rétribution d'un avocat devant le juge d'instruction puis devant le juge des libertés et de la détention.

De même les mesures de détention provisoire prises dans le cadre de la procédure actuelle de comparution immédiate le sont par un collège de trois magistrats du siège n'ayant plus les moyens de procéder à l'examen de l'entier dossier.

La comparution différée permet ainsi le recours à l'enfermement à moindre coût financier au détriment de la collégialité ou du double regard de magistrats du siège.

Le juge des libertés par ailleurs, outre le fait qu'il juge seul, exerce sa fonction dans des conditions d'alourdissement de ses tâches qui entraînent une charge de travail préjudiciable à un examen complet des dossiers qui lui sont soumis.

Ainsi, cette nouvelle disposition constitue un recul des libertés publiques au regard du processus prévu et de la durée du délai envisagé (le délai de 3 jours prévu dans le cadre de la comparution immédiate serait ainsi porté à 2 mois dans le cadre de la comparution à délai différé)

Outre son caractère liberticide, cette disposition soulève des difficultés d'application dans la mesure où elle aboutira à une augmentation du triste nombre des personnes en détention provisoire privées de liberté avant qu'un juge se soit prononcé sur leur culpabilité.

Cela augmentera le nombre de personnes qui vont être en contact, pour un temps encore prolongé, avec l'univers carcéral au sein duquel se développe un état d'esprit néfaste à la réinsertion au détriment de la population.

Or, la France ne cesse de s'illustrer en matière de surpopulation carcérale. Selon les chiffres répertoriés sur le site du Ministère de la Justice, au mois de juillet 2018, elle compte plus de 70 710 personnes détenues sur l'ensemble du territoire.

Avec 142,5 % de densité carcérale, les maisons d'arrêt françaises, dans leur ensemble, affichent l'une des pires moyennes d'Europe.

Et cette tendance ne devrait pas être radicalement renversée car ce ne seront pas 15.000 mais seulement 7.000 places qui devraient être ouvertes au terme de ce quinquennat.

Cette situation inacceptable, qui se dégrade d'année en année est particulièrement critique en Outre-Mer.

Et en Martinique, où en maison d'arrêt, il y a 498 détenus sur 371 places disponibles, individus placés en détention provisoire sont encore plus livrés à eux-mêmes, privés de véritables activités de réinsertion.

En conséquence, il est évident que cette mesure de Comparution à délai différé sera encore plus pénalisante pour le justiciable en Outre-Mer.

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