Taxe sur les services numériques — Texte n° 1838

Amendement N° 3 (Retiré)

Publié le 8 avril 2019 par : M. Brun, Mme Anthoine, M. Bazin, Mme Bazin-Malgras, M. Bony, Mme Brenier, M. Breton, M. Cinieri, M. de Ganay, Mme Kuster, M. Leclerc, M. Le Fur, Mme Louwagie, M. Masson, M. Quentin, M. Viala, M. Vialay.

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Rédiger ainsi cet article :

« I. – Après l’article 209 B du code général des impôts, il est inséré un article 209 C ainsi rédigé :
« Art. 209 C. – I. – 1. Aux fins de l’impôt sur les sociétés, un établissement stable est réputé exister dès lors qu’il existe une présence numérique significative par l’intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité.
« 2. Le 1 s’ajoute, sans y porter atteinte ni en limiter l’application, à tout autre critère conforme au droit de l’Union ou à la législation nationale permettant de déterminer l’existence d’un établissement stable dans un État membre aux fins de l’impôt sur les sociétés, que ce soit spécifiquement en relation avec la fourniture de services numériques ou autre.
« 3. Une présence numérique significative est réputée exister sur le territoire national au cours d’une période d’imposition si l’activité exercée par son intermédiaire consiste, en tout ou en partie, en la fourniture de services numériques par l’intermédiaire d’une interface numérique, définie comme tout logiciel, y compris un site internet ou une partie de celui-ci, et toute application, y compris les applications mobiles, accessibles par les utilisateurs, et qu’une ou plusieurs des conditions suivantes sont remplies en ce qui concerne la fourniture de ces services par l’entité exerçant cette activité, considérée conjointement avec la fourniture de tels services par l’intermédiaire d’une interface numérique par chacune des entreprises associées de cette entité au niveau consolidé :
« a) La part du total des produits tirés au cours de cette période d’imposition et résultant de la fourniture de ces services numériques à des utilisateurs situés sur le territoire national au cours de cette période d’imposition est supérieure à 7 000 000 € ;
« b) Le nombre d’utilisateurs de l’un ou de plusieurs de ces services numériques qui sont situés sur le territoire national membre au cours de cette période imposable est supérieur à 100 000 ;
« c) Le nombre de contrats commerciaux pour la fourniture de tels services numériques qui sont conclus au cours de cette période d’imposition par des utilisateurs sur le territoire national est supérieur à 3 000.
« 4. En ce qui concerne l’utilisation des services numériques, un utilisateur est réputé être situé sur le territoire national au cours d’une période d’imposition si l’utilisateur utilise un appareil sur le territoire national au cours de cette période d’imposition pour accéder à l’interface numérique par l’intermédiaire de laquelle les services numériques sont fournis. Ces derniers sont définis comme services fournis sur l’internet ou sur un réseau électronique et dont la nature rend la prestation largement automatisée, accompagnée d’une intervention humaine minimale, et impossible à assurer en l’absence de technologie de l’information.
« 5. En ce qui concerne la conclusion de contrats portant sur la fourniture de services numériques :
« a) Un contrat est considéré comme un contrat commercial si l’utilisateur conclut le contrat au cours de l’exercice d’une activité ;
« b) Un utilisateur est réputé être situé sur le territoire national au cours d’une période d’imposition si l’utilisateur est résident aux fins de l’impôt sur les sociétés sur le territoire national au cours de cette période d’imposition ou si l’utilisateur est résident aux fins de l’impôt sur les sociétés dans un pays tiers mais dispose d’un établissement stable sur le territoire national au cours de cette période d’imposition.
« 6. L’État dans lequel l’appareil de l’utilisateur est utilisé est déterminé en fonction de l’adresse IP de l’appareil ou, si elle est plus précise, de toute autre méthode de géolocalisation.
« 7. La part du total des produits mentionnée au a du 3 est déterminée par rapport au nombre de fois où ces appareils sont utilisés au cours de cette période d’imposition par des utilisateurs situés n’importe où dans le monde pour accéder à l’interface numérique par l’intermédiaire de laquelle les services numériques sont fournis.
« II. – 1. Les bénéfices qui sont attribuables à une présence numérique significative ou au regard d’une présence numérique significative sur le territoire national sont imposables dans le cadre fiscal applicable aux entreprises.
« 2. Les bénéfices attribuables à la présence numérique significative ou au regard de la présence numérique significative sont ceux que la présence numérique aurait réalisés s’il s’était agi d’une entreprise distincte et indépendante exerçant des activités identiques ou analogues dans des conditions identiques ou analogues, en particulier dans ses opérations internes avec d’autres parties de l’entreprise, compte tenu des fonctions exercées, des actifs utilisés et des risques assumés, par l’intermédiaire d’une interface numérique.
« 3. Aux fins du 2 du présent II, la détermination des bénéfices attribuables à la présence numérique significative ou au regard de la présence numérique significative repose sur une analyse fonctionnelle. Afin de déterminer les fonctions de la présence numérique significative et de lui attribuer la propriété économique des actifs et les risques, les activités économiquement significatives exercées par cette présence par l’intermédiaire d’une interface numérique sont prises en considération. Pour ce faire, les activités réalisées par l’entreprise par l’intermédiaire d’une interface numérique en relation avec des données ou des utilisateurs sont considérées comme des activités économiquement significatives de la présence numérique significative qui attribuent les risques et la propriété économique des actifs à cette présence.
« 4. Lors de la détermination des bénéfices attribuables conformément au 2, il est dûment tenu compte des activités économiquement significatives exercées par la présence numérique significative qui sont pertinentes pour le développement, l’amélioration, la maintenance, la protection et l’exploitation des actifs incorporels de l’entreprise.
« 5. Les activités économiquement significatives exercées par la présence numérique significative par l’intermédiaire d’une interface numérique comprennent, entre autres, les activités suivantes :
« a) La collecte, le stockage, le traitement, l’analyse, le déploiement et la vente de données au niveau de l’utilisateur ;
« b) La collecte, le stockage, le traitement et l’affichage du contenu généré par l’utilisateur ;
« c) La vente d’espaces publicitaires en ligne ;
« d) La mise à disposition de contenu créé par des tiers sur un marché numérique ;
« e) La fourniture de tout service numérique non énuméré auxa àd. Un décret en Conseil d’État peut compléter cette liste.
« 6. Pour déterminer les bénéfices attribuables au titre des 1 à 4, le contribuable utilise la méthode de partage des bénéfices, à moins que le contribuable ne prouve qu’une autre méthode fondée sur des principes acceptés au niveau international est plus adéquate eu égard aux résultats de l’analyse fonctionnelle. Les facteurs de partage peuvent inclure les dépenses engagées pour la recherche, le développement et la commercialisation, ainsi que le nombre d’utilisateurs et les données recueillies par État membre.
« III. – Les données qui peuvent être recueillies auprès des utilisateurs aux fins de l’application du présent article sont limitées aux données indiquant l’État dans lequel se trouvent les utilisateurs, sans permettre l’identification de l’utilisateur. » ;
« II. – Lorsque le Gouvernement négocie un traité comprenant des stipulations relatives à la double imposition, il informe la Commission européenne des mesures prises afin de se conformer à la recommandation de la Commission du 21 mars 2018 relative à l’imposition des sociétés ayant une présence numérique significative. »

Exposé sommaire :

Les grandes entreprises du secteur numérique, Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft (GAFAM) utilisent les principes fiscaux internationaux développés par l’OCDE pour localiser arbitrairement leurs activités économiques dans des pays faiblement taxés.

Les principes du droit fiscal international, élaborés à l’OCDE à la fin des années 70 et 80, irriguent un ensemble de milliers de conventions fiscales bilatérales entre États. Élaborés pour éviter qu’une même activité économique ne soit taxée dans plusieurs états, plusieurs de ces principes ont mal vieilli.

Ils sont en particulier mal adaptés à l’émergence des activités numériques, dont les critères de localisation matérielle, liés à des indices tels que la présence territoriale de bureaux, permettent aux entreprises concernées de domicilier l’ensemble de leurs bénéfices dans des paradis fiscaux.

Une part significative du résultat réalisé par les « GAFAM » échappe ainsi à l’impôt, leur permettant d’attribuer ces sommes au seul bénéficie de leur activité.

À titre d’exemple, Airbnb a payé pour l’exercice 2016 un impôt de 96 944 euros seulement pour un chiffre d’affaires de plus de 5 milliards euros alors que son activité est en concurrence directe avec le secteur de l’hôtellerie-restauration française. Cette concurrence déloyale est inacceptable !

Selon le rapport de nos collègues députés européens Paul Tang et Alain Lamassoure, Google et Facebook ont ainsi économisé à l’échelle de l’Union Européenne près de 5,4 milliards d’euros d’impôts entre 2013 et 2015.

L’OCDE, avec le projet BEPS, et l’Union européenne, avec les deux projets de directives sur la présence numérique significative, développent de nouveaux critères prenant en compte le caractère immatériel de cette activité économique. Mais l’adoption de ces projets se heurte aux règles d’unanimité gouvernant ces instances, exploitées par les pays bénéficiaires de cette structuration fiscale.

Il convient dans cette perspective de taxer les géants du numérique en reprenant les règles envisagées dans le projet de directive européenne et de définir dans le droit national la notion d’établissement stable pour les entreprises numériques.

Il s’agit là d’une question de justice fiscale vis-à-vis des opérateurs économiques traditionnels dont les outils de production ou les surfaces de ventes implantés au cœur de nos territoires supportent notamment la cotisation foncière des entreprises (C.F.E.), la taxe sur le foncier bâti, la TVA et l’impôt sur les sociétés.

Selon la Commission européenne, le taux d’imposition effectif des entreprises numériques – telles que les entreprises du secteur des médias sociaux, les plateformes collaboratives et les fournisseurs de contenu en ligne – atteint au sein de l’Union Européenne 9,5 % seulement, contre 23,2 % pour les modèles d’affaires traditionnels.

Cette proposition se justifie également d’autant plus que ces géants du numérique ont une empreinte carbone et environnementale conséquente. Les « fermes de serveurs », qui tournent 24 heures sur 24 consomment en effet des quantités considérables d’énergie. En 2007, le seul Google consommait déjà à l’époque 2,1 térawattheures par an, soit l’équivalent, de la production de deux centrales nucléaires. Selon le rapport Clicking Clean de Greenpeace publié le 10 janvier 2017, le secteur informatique représente aujourd’hui environ 7 % de la consommation mondiale d’électricité.

En 2020, le trafic Internet mondial devrait avoir triplé. L’empreinte écologique du réseau sera ainsi encore plus importante, du fait notamment de l’augmentation de notre consommation personnelle de données et du nombre d’utilisateurs à l’échelle mondiale, qui devrait passer de trois milliards aujourd’hui à plus de quatre milliards d’ici à la fin de la décennie.

Selon certaines estimations, la pollution générée par l’industrie du net et son impact sur le climat sont équivalents à ceux du secteur de l’aviation.

En outre, les usages induits par l’activité de vente des GAFAM se traduit par une multiplication des divers trafics (aériens, maritimes et terrestres) liés aux transports et livraisons et donc par une augmentation de la consommation d’énergies fossiles, de la pollution et des émissions de CO².

Le produit d’une taxe sur les GAFAM devrait être prioritairement affecté aux dépenses liées à la transition écologique.

Le Gouvernement a préféré retenir une approche différente avec une taxe de 3 % sur le chiffre d’affaire dite « taxe GAFAM » applicable uniquement en France.

En contradiction totale avec les initiatives portées par la France au sein de l’OCDE, et avec l’objectif affiché la taxe prévue à l’article 1er risque de renforcer la distorsion de concurrence vis à vis des entreprises françaises car les GAFAM continueront à éviter l’impôt sur les sociétés alors que les entreprises françaises paieront toutes, à un moment donné de leur développement souhaitable et souhaité, et la taxe et l’impôt, quelques soient les « franchises » imaginées.

En outre, du fait de leur position les GAFAM pourront répercuter sans problèmes la taxe sur leur client final quand les entreprises européennes, elles, risqueront en le faisant de se faire distancer sur les prix et perdre des parts de marché.

Par ailleurs, la taxe GAFAM telle qu’elle est prévue par l’article 1er ne concerne ni la vente en ligne de biens matériels de type Amazon, ni la fourniture de services numériques de type Netflix et cible en réalité uniquement Google et Facebook.

C’est pourquoi, le présent amendement vise à réécrire l’article 1er et à prévoir une taxation des géants du numérique en reprenant les règles envisagées dans le projet de directive européenne et de définir dans le droit national la notion d’établissement stable pour les entreprises numériques.

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