Projet de loi de finances pour 2019 — Texte n° 1490

Amendement N° 587 (Rejeté)

Publié le 16 décembre 2018 par : M. Coquerel, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Corbière, Mme Fiat, M. Lachaud, M. Larive, M. Mélenchon, Mme Obono, Mme Panot, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, Mme Ressiguier, Mme Rubin, M. Ruffin, Mme Taurine.

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Rédiger ainsi cet article :

« I. – L'article 60 et le B du I de l'article 82 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 sont abrogés.
« II. – L'article 11 de la loi n° 2017‑1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017 est abrogé. »

Exposé sommaire :

Le présent amendement propose d'abandonner le mécanisme de prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu. Nous nous battons contre ce passage au prélèvement à la source depuis notre entrée à l'Assemblée ! Mais les revendications récentes des gilets jaunes, parmi lesquelles on retrouvait la volonté de ne pas passer au prélèvement à la source, n'ont fait que confirmer notre opinion sur cette mesure ! C'est donc autant pour défendre notre vision sur ce projet que pour faire rentrer la voix des gilets jaunes au sein de l'Assemblée que nous proposons de nouveau cet amendement !

Ce projet de prélèvement à la source avait été adopté sous la précédente législature mais son entrée en vigueur a déjà été reportée par l'ordonnance n°2017‑1390 du 22 septembre 2017, pour une entrée en vigueur en janvier 2019. Les multiples reports ont été officiellement justifiés du fait de sa complexité. En réalité, l'enjeu premier était de pouvoir communiquer en 2018 sur les baisses de cotisations qui n'auraient pas été visibles avec une mise en place du PAS dès 2018.

Malgré ce report, nous y restons fermement opposés pour de nombreuses raisons que nous avions déjà pointées l'année dernière. Et les faits nous ont malheureusement donné raison : tout au long de l'année 2018 des bugs ont été repérés lors des tests. Par exemple, 500 000 contribuables ont reçu une déclaration pré-remplie erronée du fait d'un problème de transmission des données fiscales lié au PAS.

Le Gouvernement a donc cherché à modifier son dispositif (quitte à simplement déplacer les difficultés techniques), avec par exemple le report de la mise en place du PAS à 2020 pour les salariés à domicile ou encore la possibilité pour les entreprises de moins de 20 salariés de laisser le soin à l'Urssaf de collecter l'impôt à leur place (2 mesures annoncées durant l'été).

Les épisodes cacophoniques de cette rentrée ont posé un problème de crédibilité et d'incohérence du discours gouvernemental, avec une mise en veille du projet par Matignon et l'Élysée alors que le ministre Darmanin avait déjà envoyé une lettre aux contribuables expliquant les modalités du passage au PAS. Et tout cela à seulement 4 mois de sa mise en place...

Le fait que ces doutes soient intervenus aussi tard pose des questions. Soit Emmanuel Macron n'avait pas conscience des défauts du PAS malgré nos nombreuses alertes et il a tenté d'effacer en 15 jours 15 mois d'insouciance sur le sujet. Soit il a évalué son impact à court terme sur sa propre situation politique (le salaire net des contribuables baissera ce qui pourra créer un choc psychologique ayant un impact sur leur satisfaction et leur consommation). Dans les deux cas, cela montre la réalité d'un pouvoir qui n'écoute pas les oppositions et qui n'a pas d'autre direction que la volonté personnelle du prince...

Mais finalement, le Président a décidé de lancer cette soi-disant réforme « moderne et efficace ». Pour notre part, nous pensons au contraire que ce n'est pas à l'entreprise mais bien à l'administration fiscale de collecter l'impôt !

En outre, cette réforme est inutile, car La France dispose déjà d'un excellent taux de recouvrement en matière d'impôt sur le revenu (99,4% au 31 décembre de l'année N+1). Notre pays est en pointe en termes de déclaration pré-remplie, de prélèvement mensualisé automatique et de procédures en ligne, y compris de paiement, à la grande satisfaction des usagers (93% se sont déclarés satisfaits de la qualité du service dans la dernière enquête de l'administration).

Le PAS remet en cause le système fiscal français. Ainsi, comme pour les impôts indirects et notamment la TVA, le PAS ne facilitera pas l'appréhension concrète de la charge fiscale ainsi que ses variations. Le PAS pourrait ainsi être le premier pas vers un impôt sur le revenu non progressif, comme c'est déjà le cas des impôts et des cotisations actuellement prélevés à la source (CSG, etc.). Une fois mis en place, les gouvernements pourront facilement modifier les règles de l'impôt sans que cela ne soit trop visible et pourront justifier ces modifications par un besoin de simplification.

Le PAS apportera de la complexité pour les contribuables en impliquant de multiples formalités supplémentaires induites par l'année de transition (séparer les « revenus exceptionnels » des revenus courants pour 2018, etc.).

Nous pensons que ce système est également incompatible avec notre culture fiscale, du fait de la très forte personnalisation de l'impôt sur le revenu français et de la prévalence du concept de foyer fiscal sur celui d'individu.

En outre, le traitement des diverses imputations fiscales (déductions suite à des dons, etc.) ou des crédits d'impôt (emplois à domicile, etc.) sera rendu compliqué par ce passage au PAS. De plus, les revenus non salariaux (fonciers, etc.) feront l'objet d'un prélèvement parallèle mensuel sur le compte bancaire. Les français devront donc de toute façon continuer de remplir une déclaration d'impôt et de traiter avec l'administration fiscale pour régulariser leur situation une fois le PAS effectué.

Mais surtout, le PAS impose la rupture de la logique française de confidentialité des revenus privés : en connaissant leur taux d'imposition, un employeur peut déduire les revenus familiaux et patrimoniaux de ses salariés (par exemple un salarié en couple avec une personne aux revenus plus élevés ou bien qui reçoit les loyers d'un appartement). Suite à nos alertes, la majorité nous a répondu que le salarié pourrait utiliser un taux neutre (souvent moins avantageux que le taux personnalisé) puis se faire rembourser ensuite la différence par le fisc. Mais cela ajoutera alors de la complexité. Et certains employés pourraient renoncer au taux neutre et donc à la confidentialité pour ne pas avoir à avancer de l'argent ou encore pour ne pas éveiller les soupçons de leur employeur sur leur situation personnelle.

Enfin, le passage au PAS engendrera un coût important pour les finances publiques. L'administration va devoir adapter son organisation et ses logiciels déclaratifs et de paiement mais aussi lancer d'importantes campagnes d'information. Elle engagera plusieurs dizaines de millions d'euros au titre de ce type d'opérations dans le cadre de contrats avec des prestataires extérieurs privés, qui seront finalement les seuls bénéficiaires de cette réforme... En outre, le Gouvernement pourra utiliser l'argument du passage au PAS pour justifier les suppressions de poste à la Direction Générale des finances publiques (DGFiP) et donc affaiblir encore davantage l'Etat.

Pour toutes ces raisons, le passage au PAS nous semble une folie que le Gouvernement risque de regretter !

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