Bioéthique — Texte n° 2243

Amendement N° 796 (Rejeté)

(23 amendements identiques : 1 7 111 561 573 588 652 658 756 879 1001 1062 1097 1111 1455 1508 1705 1817 1955 2073 2357 2462 2480 )

Publié le 23 septembre 2019 par : M. Di Filippo.

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Exposé sommaire :

Le 24 juillet dernier sur France Inter, Agnès Buzyn déclarait « nous sommes suffisants en dons de spermatozoïdes », ce qui est totalement faux.

La France n’arrive pas, à l’heure actuelle, à répondre aux demandes d’insémination artificielle avec donneur des couples hétérosexuels. En effet, comme dans tous les autres pays dans lesquels le don est gratuit, la France connaît une pénurie de don de sperme.

Les dons de spermatozoïdes sont déjà six fois inférieurs aux demandes : 363 dons contre 2209 demandes en 2016. Il faudrait multiplier par six le nombre de dons uniquement pour répondre à la demande actuelle.

L’ouverture de la PMA pour toutes ne ferait qu’accentuer ce phénomène. Les demandes des mères seules viendraient en concurrence des demandes actuelles qui ne peuvent déjà pas être satisfaites, malgré les dénégations de la ministre de la Santé.

Actuellement, il faut attendre entre un et deux ans pour bénéficier d’un don. Si la pénurie s’aggrave suite à l’ouverture de la PMA, les délais d’attente pour les couples infertiles, qui connaissent quant à eux des difficultés d’ordre médical, risquent d’augmenter. Ce qui risque de retarder l’âge auquel ces femmes pourront recevoir le don de gamète, alors que l’âge diminue souvent les chances de succès de cette procédure.

Les membres du CCNE alerte déjà sur le risque de pénurie en cas d’adoption de la PMA pour toutes.

De plus, en cas d’extension de la PMA en dehors des cas d’infertilité et d’accroissement de la demande, la pression pour la marchandisation des gamètes humains va croître d’autant.

Le Conseil national d’éthique (pourtant en majorité favorable à la PMA sans père) avait déjà alerté sur le risque de marchandisation dans son avis du 25 septembre 2018 : « cette demande d’ouverture doit être confrontée à la rareté actuelle des gamètes qui risque de provoquer un allongement des délais d’attente ou une rupture du principe de gratuité des dons. Cela pourrait ouvrir des perspectives de marchandisation des produits du corps humain et remettre en cause le système de santé français fondé sur des principes altruistes. »

Nous pouvons le constater dans certains pays (Espagne, Canada, Belgique) qui recourent à un hypocrite « dédommagement », à l’importation de gamètes tarifés ou à la marchandisation assumée des gamètes comme au Danemark.

Cette marchandisation risque d’accompagner une dérive eugéniste dont témoigne le site Internet de Cryos, la plus grande banque de sperme du monde : ses clients y choisissent leurs gamètes selon une douzaine de critères dont la couleur de la peau ou des yeux ; le panier de commande - habituellement représenté par un Caddie - y est illustré par un landau.

Le risque d’arriver à la marchandisation des gamètes humains est fort. Face à la pénurie, Les effets de l’ouverture de la PMA pour toutes sur les stocks de gamètes est l’un des points qui fonde la légitimité de l’opposition à l’ouverture de la PMA pour toutes.

De plus, ce projet de loi risque d’entrainer un glissement de la PMA pour toutes vers l’autorisation de la GPA. Actuellement, seuls les couples hétérosexuels qui souffrent d’un problème médical d’infertilité peuvent avoir recours à une PMA. Ce projet de loi a vocation à étendre cette possibilité aux femmes seules ou aux couples de femme homosexuelles pour des raisons d’égalité. Alors même qu’il n’y a pas de discrimination des couples homosexuels puisque tous les couples hétérosexuels ne peuvent pas y accéder.

Comme l’énonce la jurisprudence du Conseil d’État, l’égalité de traitement ne signifie pas traiter tout le monde de la même manière, mais traiter tous les citoyens dans la même situation de la même manière. Cette définition, lorsque qu’on la transpose à notre débat, démontre bien s’opposer à la légalisation de la PMA pour toutes n’est pas un acte discriminatoire ou homophobe. Les couples hétérosexuels souffrant de problème d’infertilité sont dans une situation différente que les femmes homosexuelles ou seules.

Ce projet de loi est en phase de créer un « droit à l’enfant. » Le conseil d’État avait pourtant souligné dans son rapport de 2018 sur la bioéthique qu’il n’existe pas de droit à l’enfant.

Cette conception de l’égalité nous mènera inévitablement vers la GPA. En effet, comment justifier que des femmes seules, ou homosexuelles puissent accéder à la parentalité lorsque des hommes seuls ou homosexuels ne le peuvent pas ? Nous arriverons nécessairement à la GPA, au nom du principe d’égalité.

Le 10 février 2013, Edouard Philippe, alors député-maire du Havre, cosignait ainsi avec sa collègue Nathalie Kosciusko-Morizet une tribune pour expliquer son abstention sur la loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de mêmes sexe. Et c’est notamment par crainte de la PMA que celui qui est devenu Premier ministre justifiait alors son vote ! « S’engager sur la voie de l’adoption plénière implique déjà la PMA, puis la GPA, pour les couples de même sexe », écrivait-il. Edouard Philippe et NKM l’affirmaient donc haut et fort : « Nous nous opposerons résolument à la PMA pour les couples homosexuels féminins, et à la GPA qui, au nom de l’égalité, ne manquera pas d’être réclamée par la suite. » En octobre 2016, interrogé par Le Parisien alors qu’il était en campagne pour la primaire de la droite, Bruno Le Maire déclarait : « Je ne suis pas favorable à la PMA pour les couples homosexuels » car « la seule limite que je fixe, c’est celle du droit à l’enfant ». Gérald Darmanin, ex-député LR devenu ministre de l’Action et des Comptes publics, était quant à lui allé jusqu’à défendre, le 3 février 2013, un amendement visant à interdire expressément la PMA aux couples de même sexe. « L’adoption de cet amendement permettrait de montrer que ce texte n’a rien à voir avec la PMA et la GPA – c’est ce que le Gouvernement ne cesse de nous répéter depuis le début – et que l’enfant don ne serait plus un enfant dû »,

On connaît les dérives que peut entrainer la légalisation de la GPA : marchandisation du corps des femmes, exploitation des femmes dans le besoin par les ménages aisés, violation de la dignité de la personne humaine, réification de l’enfant, souffrance du nouveau-né suite à l’abandon…

Pour les éviter, il convient donc de s’opposer fermement et résolument à la PMA pour les couples de mêmes sexe.

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