Article 1er de la constitution et préservation de l'environnement — Texte n° 3787

Amendement N° 144 (Rejeté)

(10 amendements identiques : CL3 CL1 70 120 256 258 287 320 365 406 )

Publié le 3 mars 2021 par : M. Le Fur, Mme Beauvais, Mme Bouchet Bellecourt, M. Cornut-Gentille, M. Kamardine, M. Menuel, M. Quentin, M. Sermier.

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Supprimer cet article.

Exposé sommaire :

L’article unique du présent projet de loi constitutionnel vise à insérer après la troisième phrase du premier alinéa de l’article 1er de la Constitution, une phrase précisant que la France « garantit la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et lutte contre le dérèglement climatique. »

Ce projet fait suite au projet de loi constitutionnelle n° 2203 du 29 août 2019 qui prévoyait d’inscrire à l’article 1er de la Constitution le principe selon lequel la France « favorise la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et agit contre les changements climatiques ».

Il convient de se reporter à l’avis déjà critique du Conseil d’État qui avait à l’époque estimé que « si l’article 1er de la Constitution n’a pas, en principe, vocation à accueillir l’énoncé de politiques publiques, (…) le caractère prioritaire de la cause environnementale, s’agissant d’un des enjeux les plus fondamentaux auxquels l’humanité est confrontée, justifie qu’elle prenne place à cet article aux côtés des principes fondateurs de la République ».

Dans cet avis il avait même attiré l’attention du Gouvernement sur « les conséquences lourdes et en partie imprévisibles que la disposition alors envisagée était susceptible d’avoir sur la responsabilité de l’État et des pouvoirs publics territoriaux, en leur imposant une obligation d’agir » et avait en conséquence « suggéré de substituer le verbe « favoriser » au verbe « agir » ». ce que le Gouvernement avait retenu dans le projet soumis à la représentation nationale.

A nouveau saisi sur le présent projet de loi constitutionnelle, le même Conseil a rappelé dans son avis du 14 janvier 2021 que « ces considérations s’appliquent de la même façon à l’actuel projet de loi constitutionnelle. Le Conseil d’État rappelle cependant que si l’inscription de la préoccupation environnementale à l’article 1er de la Constitution revêt une portée symbolique qui ne peut être ignorée, elle ne lui confère, par elle-même, aucune prééminence d’ordre juridique sur les autres normes constitutionnelles.

Dans ce même avis du 14 janvier 2021, le Conseil d’État attire à nouveau l’attention du Gouvernement sur « les conséquences que pourrait entrainer l’emploi du terme « garantit » pour qualifier l’engagement de la France en matière environnementale, ce terme étant entendu comme s’imposant aux pouvoirs publics nationaux et locaux dans leur action nationale et internationale« .

Il souligne que « l’inscription de ce terme dans la Constitution, alors qu’il ne figure pas dans la Charte, n’aurait pas pour seul effet de consacrer l’état actuel de la protection constitutionnelle de l’environnement et de l’interprétation qu’en a donné la jurisprudence » puisqu’en « prévoyant que la France « garantit » la préservation de la biodiversité et de l’environnement, le projet imposerait aux pouvoirs publics une quasi-obligation de résultat dont les conséquences sur leur action et leur responsabilité risquent d’être plus lourdes et imprévisibles que celles issues du devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement résultant de l’article 2 de la Charte de l’environnement« .

Alors que le Conseil Constitutionnel tire déjà de lourdes conséquences juridiques de la charte de l’environnement, comme en témoigne la décision 2021‑823 QPC du 31 janvier 2020 « Union des industries de la protection des plantes », il convient de ne pas prendre de risque juridique qui pourraient avoir de lourdes conséquence en terme de responsabilité, pour la puissance publique et fragiliser plus de raison les acteurs économiques.

Dans une décision n° 2020‑809 DC du 10 décembre 2020 (Loi relative aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire pour les betteraves sucrières), le Conseil constitutionnel a jugé que les limites apportées par le législateur à l’exercice du droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, consacré par l’article 1er de la Charte de l’environnement, « ne sauraient être que liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par un motif d’intérêt général et proportionnées à l’objectif poursuivi ».

Au regard de ces deux décisions, le présent projet de loi comporte des risques juridiques qui excèdent manifestement la volonté politique de l’exécutif de donner des gages aux membres de la Convention Citoyenne sur le Climat.

Comme l’a souligné à juste titre le constitutionnaliste Jean-Philippe Dérosier, le présent projet de loi constitutionnel est « une manœuvre politique et c’est là où il faut être vigilant parce que la Constitution ne peut pas être le jeu de manœuvres politiques. On peut s’en servir, se servir de la loi pour faire ce type de manœuvre, pour mettre en œuvre la politique que l’on peut conduire. Mais la Constitution, c’est la norme fondamentale commune sur laquelle, justement, il faut s’accorder au-delà de clivages partisans. »

C’est pourquoi le présent amendement vise à supprimer l’article unique du présent projet de loi constitutionnelle.

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