Intervention de Emmanuelle Ménard

Séance en hémicycle du jeudi 30 novembre 2017 à 15h00
Compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, chers collègues, s'il est un domaine qui ressemble à un « casse-tête », pour reprendre l'expression de l'Association des maires de France, c'est bien cette compétence GEMAPI. Si tout le monde s'accorde sur la nécessité d'une réorganisation de cette compétence à l'échelle des bassins versants, il reste encore quelques points à préciser. Sans en dresser une liste exhaustive, je citerai les questions de financement – et en particulier le maintien du financement par l'État des digues domaniales – , ainsi que les évolutions institutionnelles à venir avec cette interrogation : la gestion des fleuves ne dépasse-t-elle pas le périmètre d'une communauté ?

Il nous faudra donc préciser un certain nombre de points pour rassurer et rendre opérationnelle cette gestion, qui appartenait jusqu'ici à des acteurs multiples, pour des domaines d'intervention tout aussi multiples. Reste que cette proposition de loi – même si elle doit être amendée sur tel ou tel point – va dans le bon sens. Elle a le mérite de tenter de mettre de l'ordre dans ce domaine. Et, j'en conviens, ce n'est pas chose aisée. J'y serai attentive, connaissant la sensibilité des élus locaux à ces problèmes.

Mais si je prends la parole aujourd'hui sur ce dossier GEMAPI, c'est aussi pour poser une question plus générale, celle du transfert des compétences. Une fois de plus, je ne conteste nullement la nécessité, dans ce dossier, de revoir l'architecture passée des responsabilités des uns et des autres. C'était nécessaire. Mais je veux le redire, ici, à cette tribune : on ne peut pas continuer à enlever des compétences à nos communes !

Les technocrates n'ont qu'un mot à la bouche : intercommunalité. Ils veulent en finir avec nos communes, nos bonnes vieilles communes, vestiges d'un temps que nos « élites » voudraient voir disparaître. Ils naviguent sans cesse entre paternalisme et mépris à l'égard de ces « petits élus », qui seraient incapables de penser par eux-mêmes ou de gérer par eux-mêmes. Je sais que je me fais ici la porte-parole d'un grand nombre, d'un très grand nombre d'élus locaux, qui finiront, s'ils n'y prennent garde, par n'être plus que les gardiens des registres de l'état civil. On décidera pour eux d'à peu près tout. Disons-le clairement : les maires vivent, aujourd'hui, sous les diktats de la loi NOTRe, qui les dépouillent, peu à peu, de leurs prérogatives. Si les maires sont persuadés qu'ils doivent se regrouper – et le transfert de la compétence GEMAPI devrait être une bonne chose à condition, je le répète, qu'on retravaille et qu'on précise certaines modalités d'organisation – , ils ne veulent plus qu'on le leur impose.

Il faut redonner aux maires et aux conseils municipaux nombre des compétences aujourd'hui accaparées par les intercommunalités. Ces dernières sont toujours plus vastes, toujours plus éloignées de la vie des Français, toujours plus déconnectées du pays réel. Chaque fois que cela est possible, il faut appliquer strictement le principe de subsidiarité, qui consiste, chacun le sait, à confier le maximum de pouvoir à l'échelon inférieur, pourvu qu'il ait les compétences et les moyens d'atteindre le bien commun à son niveau. Pour cela, il faut que soit rétablie la liberté de s'associer ou non à d'autres communes, afin de mutualiser au mieux les services qui peuvent l'être, dans le respect de chaque commune et de ses habitants.

C'est pourquoi, vous l'avez compris, je profite de cette tribune pour alerter une fois encore sur le grignotage quotidien du pouvoir communal. Pour que, soucieux de cette France des petites communes, trop souvent oubliée au profit de Paris et d'une poignée de métropoles régionales qui concentrent argent et pouvoir, nous soyons attentifs à ne plus les marginaliser, je dirais même, à ne plus les dépecer.

Cette proposition de loi témoigne qu'il est possible, malgré un certain flou que nous nous devons de lever, d'imaginer des réponses sans le faire au détriment de certains acteurs d'un dossier. C'est loin d'être toujours le cas ! Si cette proposition de loi très technique nous donnait l'occasion d'une prise de conscience de la nécessaire défense du pouvoir communal, je me réjouirais encore davantage de voter pour elle.

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