Intervention de Barbara Pompili

Séance en hémicycle du vendredi 1er décembre 2017 à 9h30
Fin de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili, présidente de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, madame, monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, nous voilà réunis pour cette nouvelle lecture du projet de loi mettant fin à la recherche et à l'exploitation d'hydrocarbures. S'il y aura, selon toute vraisemblance, une lecture définitive d'ici à la fin du mois de décembre, il ne fait pas vraiment de doute que le texte qui nous est présenté aujourd'hui sera, peu ou prou, le texte définitivement adopté.

La commission mixte paritaire n'est pas parvenue à un accord. Même si les échanges ont été constructifs et de grande qualité, il est rapidement apparu que la majorité sénatoriale n'avait pas saisi l'urgence climatique qui s'impose à nous. Tout en en acceptant formellement le principe, l'interdiction de l'exploration et de l'exploitation des hydrocarbures adoptée par le Sénat comprenait tant de dérogations qu'elle vidait complètement le projet de son sens : dérogations pour l'outre-mer, pour les hydrocarbures à finalité non-énergétique, pour les hydrocarbures connexes ou pour la recherche. À ces dérogations, il fallait ajouter l'adoption d'une date de prise en compte des demandes en cours d'instruction, qui aurait permis, dans la pratique, d'autoriser encore plus de quarante titres miniers.

C'est bien là le paradoxe du texte issu du Sénat : poser un principe, tout en le vidant complètement de ses effets ; se donner bonne conscience avec une loi d'affichage, sans en assumer les conséquences. Ces subterfuges ne sont plus de mise aujourd'hui, et nous avons, vis-à-vis de nos concitoyens et du reste du monde, un devoir d'agir. Cela signifie qu'il nous faut assumer les conséquences de ce texte : oui, il y aura des reconversions à prévoir ; oui, il nous faut maintenant imaginer une économie fondée sur un autre modèle.

S'agissant des reconversions, l'Assemblée nationale a adopté, en première lecture, à l'issue d'un travail collectif associant les députés de tous bords, un amendement prévoyant la remise d'un rapport sur l'accompagnement des entreprises et des personnels affectés par la fin progressive des activités d'exploration et d'exploitation, ainsi que sur la reconversion des territoires. Monsieur le ministre d'État, vous l'avez bien compris, il ne s'agit pas d'un énième rapport déposé au Parlement : c'est un engagement qui nous lie tous, les élus de la nation, le Gouvernement, les élus locaux et les entreprises, afin d'engager les territoires concernés vers un nouveau modèle économique. Il ne s'agit pas de reproduire aujourd'hui les erreurs commises hier lors de la fermeture des mines de charbon – je pourrais en parler longuement pour avoir grandi dans le bassin minier du Pas-de-Calais – ou dans les villes touchées par la fermeture de bases militaires.

Cette fois, pour réussir, nous avons le temps – puisque le projet de loi a fixé l'échéance à 2040 – , la visibilité et les outils, comme l'a démontré la semaine dernière l'audition de M. Sébastien Lecornu présentant les contrats de transition écologique. Il nous faut désormais travailler de façon impérative sur le corollaire implicite de ce texte : la recherche d'un nouveau modèle économique, qui ne s'appuie plus sur la consommation à outrance des énergies fossiles. La France se doit de prendre la tête de cette nouvelle révolution industrielle riche en emplois, et il faut reconnaître qu'en matière d'énergies renouvelables, nous sommes encore bien loin du compte. Sur ce sujet, je connais la détermination du Gouvernement, notamment la vôtre, monsieur le ministre d'État, et je constate avec satisfaction que le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance, déposé lundi dernier, comprend deux articles très prometteurs sur la simplification du processus décisionnel en matière d'éolien en mer et de géothermie.

Le texte que nous nous apprêtons à voter ne fait pas l'unanimité sur tous les bancs, j'en suis parfaitement consciente. Néanmoins, je me félicite de l'excellent état d'esprit qui a présidé aux travaux de la commission, permettant de parvenir à un projet de loi équilibré : je pense aux dispositions relatives à la ratification de l'ordonnance de 2011 portant codification législative du code minier, à celles visant à donner une définition des techniques conventionnelles et non conventionnelles, à celles portant sur les plans de protection de l'atmosphère… Sur de nombreux points, nous avons avancé de façon décisive et il faut souligner combien ce travail collectif doit au rapporteur, Jean-Charles Colas-Roy, ainsi qu'à la rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, Célia de Lavergne.

S'agissant justement des dispositions introduites en commission, issues de cette mobilisation collective, je souhaite en évoquer une plus particulièrement, prévoyant la remise d'un rapport au Parlement sur les concours de toute nature de l'État en soutien aux activités de recherche et d'exploitation des hydrocarbures hors du territoire national. Monsieur le ministre d'État, nous l'avons dit, vous l'avez dit, ce texte doit servir d'exemple à beaucoup d'autres pays. À lire ou entendre les commentaires faits après l'intervention du Président de la République à la COP23, où nous étions présents dans le cadre d'une délégation de la commission, il ne fait pas de doute qu'un mouvement a été lancé. La rencontre avec nos collègues du Bundestag en a apporté la preuve. Néanmoins – j'insiste sur ce point – , cette exemplarité doit être le fruit d'une conviction. Aussi ne me paraît-il pas envisageable de prohiber l'exploration et l'exploitation d'hydrocarbures sur le sol national tout en soutenant, par des moyens publics, de telles entreprises à l'extérieur. C'est bien là la philosophie de l'amendement adopté et je suis convaincue, monsieur le ministre d'État, que vous partagez cette préoccupation. Vous pouvez en tout cas compter sur notre détermination, celle de la commission du développement durable, pour poursuivre avec vous ce travail législatif qui nous permet d'assurer dans de bonnes conditions cette transition écologique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.