Intervention de Valérie Beauvais

Séance en hémicycle du vendredi 1er décembre 2017 à 9h30
Fin de la recherche et de l'exploitation des hydrocarbures — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Beauvais :

Les Français auront compris que c'est sous votre impulsion, pour ne pas dire votre pression, monsieur le ministre d'État, que le Gouvernement a cédé. Il fallait, bien sûr, trouver des prétextes – mais à quel prix ?

Je rappellerai à notre assemblée que la France, malgré une production annuelle de 815 000 tonnes, est contrainte d'importer massivement du pétrole, la production nationale ne correspondant qu'à 1 % seulement de notre consommation. Comme cela a été rappelé, les 99 % restants proviennent d'États qui ne s'encombrent pas des mêmes précautions que nous.

Tant que la France consommera des énergies fossiles, il faudra en produire. Le Gouvernement aurait été mieux inspiré de travailler d'abord sur la consommation, plutôt que sur 1 % de notre production. Allez dire à d'autres que ce projet de loi présente un intérêt sur le plan environnemental !

Mais il y a une deuxième raison pour le repousser. La production d'hydrocarbures génère chaque année un chiffre d'affaires de plus de 330 millions d'euros et plus de 55 millions d'euros de retombées fiscales. En outre, des emplois dépendent de cette filière. Il est crucial de préserver les bassins d'emplois et nos savoir-faire, en particulier dans les territoires ruraux et périphériques. Ces derniers vont déjà beaucoup souffrir de la politique du Gouvernement : hausse de la fiscalité du diesel, fermeture de services publics, baisse de 13 milliards d'euros aux collectivités – et j'en passe.

J'en viens maintenant aux conséquences directes de votre texte sur la science. En mettant de façon brutale un terme à la possibilité d'effectuer des recherches en matière sismique et géologique, vous privez la France de la connaissance de son sous-sol. Une entreprise de mon département, la Marne, située à Montmirail, a engagé en 2017 quelque 4 millions d'euros pour mener des travaux d'études du sous-sol ; ces travaux sont ensuite, comme vous le savez, monsieur le ministre d'État, cédés gratuitement à l'État, qui les collecte et en assure la conservation. Demain, ce ne sera plus possible. Qui financera ces études ? À moins que vous ne nous annonciez une augmentation conséquente des moyens financiers consentis au Bureau de recherches géologiques et minières, le BRGM – ce dont je doute – , ces données seront perdues !

Permettez-moi aussi d'évoquer le sort que vous réservez à la génération de jeunes géologues et d'étudiants. Monsieur le ministre d'État, vous allez contraindre toute une génération de géologues à s'expatrier. Quelles perspectives offrez-vous aux étudiants en géologie, si ce n'est d'aller exercer leurs compétences ailleurs ? C'est donc cela, le bel avenir que vous réservez à la jeunesse française ? Elle vous en sera reconnaissante !

Mes chers collègues, vu les nombreuses faiblesses que comprend ce projet de loi, la possibilité vous est encore offerte de décider de votre vote. Le texte mériterait d'être enrichi des modifications votées par le Sénat. J'en rappellerai les grandes lignes, à travers quatre propositions.

La première est de poursuivre l'exploitation des hydrocarbures lorsqu'ils sont destinés à des usages non énergétiques, notamment pour la connaissance scientifique.

La deuxième est de poursuivre des activités de recherche sur les hydrocarbures, sous le contrôle du public, aux seules fins de connaissance des sous-sols français.

La troisième est d'alléger l'encadrement du droit de suite pour les seules concessions attribuées à compter de la promulgation de la loi, et non pour les concessions en cours. De même, un industriel qui obtient la prolongation d'une concession au-delà de 2040 doit pouvoir non seulement couvrir les frais qu'il aura engagés, mais aussi enregistrer d'éventuels profits.

Quatrième et dernière proposition, la date de 2040 mentionnée dans le projet de loi doit s'appliquer aux demandes déposées au plus tard le 6 juillet 2017, et non aux demandes en cours d'instruction, parfois en souffrance depuis plusieurs années auprès de l'administration.

Voilà, mes chers collègues, les principales raisons pour lesquelles le groupe Les Républicains s'opposera très majoritairement au projet de loi tel qu'il nous est présenté. Ce texte nous semble à la fois antiéconomique et idéologique. Sa portée relève du simple symbole.

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