Intervention de Bruno Millienne

Séance en hémicycle du mardi 18 juillet 2017 à 21h30
Ordonnances relatives à l'élaboration des décisions ayant une incidence sur l'environnement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Millienne :

Il nous faut accélérer et amplifier ce qui a été fait jusqu'ici. Le Grenelle de l'environnement, la COP21 qui a débouché sur l'accord de Paris : tout ceci rend aujourd'hui possible une politique environnementale ambitieuse. Il nous faut garder farouchement les acquis, bien sûr, et poursuivre le chemin avec plus d'ardeur encore.

Les deux ordonnances du 3 août 2016 sur l'évaluation environnementale des projets et l'information du public, que nous examinons aujourd'hui, ont elles aussi apporté leur lot d'avancées notables. Je ne reviendrai pas sur tous les points de ces textes – les orateurs qui m'ont précédé ont été assez exhaustifs –, mais quelques aspects méritent que l'on s'y attarde un moment.

D'abord, il est indéniable que ces ordonnances permettront de faire avancer la cause écologiste sur bien des points. La mise en conformité du droit français au droit européen permettra à coup sûr de mieux prendre en compte les enjeux qui nous concernent – la santé, la biodiversité, le développement –, mais aussi d'offrir à nos concitoyens la possibilité de s'emparer de ces sujets de manière plus simple.

Nous nous réjouissons de la création de droits nouveaux pour les citoyens grâce au renforcement de la concertation préalable et du droit d'initiative mis en place en amont des décisions, et non plus a posteriori, une fois que les choses sont engagées, comme c'était le cas jusqu'alors. La participation du public aux décisions ayant une incidence sur l'environnement est d'autant plus renforcée que les ordonnances prévoient une procédure dématérialisée offrant aux citoyens la possibilité de formuler des observations directement via internet, ce qui traduit une modernisation de l'enquête publique mieux adaptée à notre temps. Vous le voyez, la simplification n'est donc pas toujours synonyme de renoncement : en voici un exemple parfait.

Ces droits nouveaux pour les citoyens se traduisent par des modalités de consultation nouvelles. Nous saluons donc l'avancée que constitue le renforcement des prérogatives de la Commission nationale du débat public, organisme dont l'utilité n'est plus à démontrer. La possibilité qui lui est désormais offerte de s'emparer des plans et programmes nationaux nous paraît utile à la résolution de situations conflictuelles.

Je me félicite également des travaux de la commission, menés sous la présidence de Barbara Pompili, qui ont donné lieu à un consensus sur plusieurs points fondamentaux. Je remercie également M. le secrétaire d'État Sébastien Lecornu pour son écoute et sa bienveillance à l'égard des amendements déposés. Je pense par exemple à l'alignement, essentiel à nos yeux et consensuel, de la formulation de la démarche « éviter, réduire, compenser » sur celle adoptée dans la loi pour la reconquête de la diversité, en lieu et place de la précédente formulation trop vague et donc peu efficace.

Parmi les amendements adoptés, la commission a souhaité l'abaissement de 10 à 5 millions d'euros du plafond du seuil de dépenses ou subventions publiques devant être défini par décret en Conseil d'État afin d'encadrer le nouveau droit d'initiative ouvert aux populations. Elle a également porté de deux à quatre mois le délai durant lequel les citoyens peuvent exercer leur droit d'initiative après la publication d'une déclaration d'intention.

Le groupe MODEM et apparentés proposera cependant d'aller plus loin en élargissant les conditions de mise en oeuvre du droit d'initiative. Il nous paraît en effet que le seuil de recevabilité d'une initiative citoyenne constitue dans la plupart des cas un obstacle insurmontable à l'exercice de ce droit. Dans bien des cas, en effet, le seuil de 20 % de la population d'une commune ou d'un territoire ou 10 % de celle d'un département ou d'une région aura de quoi décourager la plupart des citoyens convaincus qui entendent prendre part à cette lutte générale pour la préservation de notre environnement. Les droits doivent être effectifs et, pour qu'ils le soient, ils doivent être accessibles. C'est pourquoi nous demandons que ce seuil soit réévalué et porté à 15 % de la population d'une commune ou d'un territoire ou 7,5 % de celle d'un département ou d'une région.

Si certains amendements n'ont pas pu être adoptés, car les dispositions proposées n'avaient pas leur place dans le code de l'environnement, la majorité et le Gouvernement en soutiennent le sens et les objectifs. C'est le cas notamment de l'amendement de nos collègues du groupe La France insoumise demandant un rapport d'information sur les impacts environnementaux, humains et économiques des grands projets tels Notre-Dame-des-Landes, l'autoroute A45, la ligne à grande vitesse Lyon-Turin, EuropaCity, le projet d'incinérateur à Ivry-sur-Seine ou le projet de stockage des déchets radioactifs à Bure. Cela nous semble être du simple bon sens !

La commission soumet donc aujourd'hui en séance publique un texte mieux-disant. Le groupe MODEM et apparentés espère que la représentation nationale saura s'entendre sur ce texte, qui marque une nouvelle étape dans la protection de l'environnement et constitue une avancée en matière d'implication du citoyen en amont des projets.

Mais nous appelons à aller plus loin encore. Il nous semble nécessaire que cette consultation en amont devienne la règle pour que nos concitoyens se réapproprient leurs territoires. C'est un enjeu écologique et culturel. De même, cela rendra les aménagements plus efficaces grâce à l'implication de ceux qui se trouvent au plus proche des territoires, car on prend davantage soin de ce qui nous touche de près.

Je parlais tout à l'heure des grands projets dont il nous faut contrôler l'adéquation avec les normes environnementales, mais ce souci va bien au-delà. C'est toute la chaîne qu'il nous faut rendre viable, depuis la construction avec des matériaux biosourcés, à énergie passive ou positive, la végétalisation des opérations d'aménagement, jusqu'aux travaux des grands opérateurs en passant par l'action des maîtres d'oeuvre.

Les collectivités doivent être incitées à faire mieux. Saluons à ce titre l'initiative de la région Île-de-France, qui va mettre en place un guide des bonnes pratiques afin d'aider les collectivités dans l'élaboration des PLU et des PLU intercommunaux – PLUI.

Enfin, il nous faut soutenir les projets qui permettent d'allier développement économique, souci environnemental et désenclavement des territoires. Je pense bien sûr ici au canal Seine-Nord.

1 commentaire :

Le 20/07/2017 à 22:29, Laïc1 a dit :

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"La participation du public aux décisions ayant une incidence sur l'environnement est d'autant plus renforcée que les ordonnances prévoient une procédure dématérialisée offrant aux citoyens la possibilité de formuler des observations directement via internet,"

Ça va indéniablement dans le bon sens, bien qu'il faudrait l'étendre aux décisions n'ayant pas d'incidence sur l'environnement. Les citoyens ne s’intéressent pas qu'aux plantes vertes et au bon air, même si c'est évidemment très très important. Et il faudrait aussi décadenasser les discussions lors des conseils municipaux en permettant au public de poser des questions ou de proposer des sujets pour l'ordre du jour.

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