Intervention de Bénédicte Peyrol

Séance en hémicycle du lundi 4 décembre 2017 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2017 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBénédicte Peyrol :

Nous commençons ce soir l'examen en première lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2017.

Ce collectif budgétaire confirme l'engagement du Gouvernement de maintenir le déficit public en dessous du seuil des 3 %, permettant ainsi à la France une sortie de sa procédure de déficit excessif dès l'année prochaine. Malgré l'invalidation par le Conseil constitutionnel de la taxe sur les dividendes, les députés de la République en Marche se félicitent que le Gouvernement garde le cap de sa trajectoire budgétaire, permettant de libérer du pouvoir d'achat pour les Français et de diminuer les charges pour les entreprises, conditions intrinsèques d'une reprise soutenable de notre économie.

L'actualisation des indicateurs économiques pour la fin de l'année confirme les perspectives de croissance, avec une estimation du taux revue à 2,2 % pour la zone euro d'après la Banque centrale européenne et qui est de 1,7 % pour la France en 2017. Si cette embellie génère une hausse des recettes fiscales attendues, elle ne doit pas ralentir les efforts d'amélioration du déficit structurel et de maîtrise de la dette. Malgré des taux d'intérêt encore bas et le retour de l'inflation à un taux de 1,1 %, la prévision de charge de la dette est revue cette année à la hausse, de 0,3 milliard d'euros.

Une telle révision à la hausse, la première depuis 2011 dans un collectif budgétaire, témoigne de la vigilance dont nous devons faire preuve concernant l'évolution des emprunts de l'État. En tant que rapporteures spéciales de la mission « Engagements financiers de l'État », ma collègue Dominique David et moi-même y serons particulièrement attentives.

Je souhaiterais maintenant revenir sur un certain nombre de mesures fiscales figurant dans ce PLFR en matière de mise en conformité et de renforcement de nos dispositifs de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales, deux sujets plus que jamais d'actualité.

Plusieurs dispositions de ce texte portent sur la mise en conformité de notre droit à la suite de décisions de justice nationale et européenne. Seul l'article 11 prend un peu son indépendance en ne reprenant pas exactement les critères de déductibilité des retenues à la source prélevées à l'étranger fixés par la jurisprudence du Conseil d'État dans les arrêts Céline et LVMH. Il prévoit dans tous les cas que les retenues à la source prélevées à l'étranger conformément aux stipulations des conventions ne seront pas déductibles et que les crédits d'impôt tomberont en non-valeur.

Les articles 19 et 20, relatifs à la taxe sur la publicité et à la taxe sur les éditeurs de services de télévision, tirent les conséquences de décisions du Conseil constitutionnel. L'article 26 consolide le contrôle de l'épargne réglementée suite à l'invalidation par le Conseil d'État du contrôle réalisé par la direction générale des finances publiques – DGFIP.

Surtout, l'article 14 modifie les conditions d'application du régime spécial des fusions. Il supprime la procédure d'agrément préalable pour les opérations de restructuration impliquant une personne morale étrangère, jugée non conforme avec le droit de l'Union européenne dans l'affaire Euro Park. À cet égard, nous avons vu en commission que certaines améliorations pouvaient être apportées : notre rapporteur général les a présentées tout à l'heure.

Ces régularisations sont certes nécessaires, mais doivent néanmoins nous alerter, nous législateur, sur notre rôle de garant a priori de la conformité de la loi, particulièrement au regard du cadre européen. D'après le rapport annuel 2016 de la Commission européenne, la France comptait cette même année quatre-vingt-trois cas d'infractions pour transposition incorrecte ou mauvaise application des règles européennes et trente-cinq pour transposition tardive des directives, ce qui classe notre pays à la sixième place parmi les plus mauvais élèves.

L'effet direct et la primauté du droit de l'Union, consacrés par la jurisprudence européenne, sont des réalités que nous, parlementaires, devons être capables d'anticiper, de comprendre et d'articuler avec les mesures que nous votons dans cette enceinte.

Au sein du groupe La République en marche, nous tenons également à saluer dans ce projet de loi de finances rectificative les dispositions prises pour renforcer la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. On a pu dénoncer encore ces dernières semaines les injustices que ces comportements mettent en exergue et la nécessité pour l'Union européenne et la communauté internationale de se mobiliser.

On peut souligner le renforcement de la clause de sauvegarde, à l'article 15, pour l'imposition des revenus réalisés par l'intermédiaire de structures établies en dehors du territoire et soumis à un régime fiscal privilégié, ainsi que les dispositions concernant les obligations des institutions financières, leur contrôle et les procédures de recouvrement forcés mises en oeuvre par les comptables publics et qui devront permettre de faciliter le travail de l'administration fiscale.

Pour finir, nous voyons que si la lutte contre la fraude fiscale nécessite des sanctions lourdes, elle implique aussi une forte coordination de nos dispositifs internes avec ceux prévus par les conventions fiscales et le droit de l'Union européenne. Même si la tentation est grande d'aller vite et seuls, nous devons garder à l'esprit qu'il n'y a que par la coopération que nous parviendrons à réduire comme peau de chagrin les schémas de fraude et d'évasion fiscales. Nous pouvons et nous devons être moteurs dans cette action collective.

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