Intervention de Annie Vidal

Séance en hémicycle du jeudi 7 décembre 2017 à 9h30
Dons de jours de repos non pris aux aidants familiaux — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnie Vidal :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, chers collègues, la Conférence de la famille de 2006 a défini l'aidant comme « la personne non professionnelle qui vient en aide à titre principal, pour partie ou totalement, à une personne dépendante de son entourage, pour les activités de la vie quotidienne. Cette aide régulière peut être prodiguée de façon permanente ou non et peut prendre plusieurs formes ». Elle concerne les activités de la vie quotidienne, les gestes simples qui peuvent devenir insurmontables. Les aidants ont en moyenne cinquante-deux ans et 57 % d'entre eux sont des femmes. Ils sont entre 8 et 12 millions, chiffre difficile à établir avec précision compte tenu du nombre de personnes qui ne se considèrent pas comme aidants mais qui en assument cependant la fonction.

Je souhaite ce matin attirer votre attention sur celles et ceux qui font partie de la population active de notre pays : ils sont 4 millions, près de la moitié des aidants, à travailler en même temps. Ainsi, 14 % des salariés de notre pays sont partie prenante de ce processus d'aide ô combien indispensable et précieux. Ils viennent en aide à des enfants atteints de maladies graves, à des personnes en situation de handicap, à des personnes âgées en perte d'autonomie ou en situation de dépendance. Selon la personne aidée, les aidants n'ont pas accès aux mêmes droits ; ils sont pourtant confrontés aux mêmes types de difficultés quotidiennes. En plus d'une charge mentale très forte, l'aidant est souvent isolé et confronté à de nombreuses interrogations, tant sur le plan des orientations administratives et pratiques que sur celui de la bonne prise en charge de ce parcours de vie qu'il accompagne. Dans la majorité des cas, ils ne sont pas préparés à cette situation et ils y font face avec intelligence, bon sens et bienveillance – et c'est tout à leur honneur.

Pour préserver leur vie professionnelle, ils doivent consentir à de nombreux efforts et renoncements, le plus souvent au détriment de leur vie privée. Nous comprenons alors aisément l'épuisement qui peut être le leur. Pourtant, cet équilibre si fragile entre vie professionnelle, vie familiale et vie d'aidant leur est indispensable pour tenir. Certes, des dispositifs de congés sont prévus par la loi, mais ils ne permettent pas en l'état de faire face aux besoins de l'aidant. Pour mémoire, le congé de proche aidant permet d'accompagner un proche en perte d'autonomie ; le congé de solidarité familiale concerne les aidants accompagnant un proche en fin de vie ; le congé de présence parentale est destiné aux parents aidant un enfant de moins de vingt ans gravement malade ou en situation de handicap. S'il est possible, sous certaines conditions, de bénéficier d'une allocation journalière pendant ces congés, notamment pour le congé de solidarité familiale et celui de présence parentale, ces trois congés ont comme point commun de ne pas être rémunérés. Au-delà de tout ce qui vient d'être évoqué, des difficultés financières peuvent donc potentiellement venir s'ajouter à une situation déjà très lourde. Il est à noter, par ailleurs, que les aidants témoignent dans une grande majorité de leur volonté de préserver leur activité professionnelle, pour répondre à un besoin matériel certes, mais aussi pour le lien social que le travail représente et le soutien amical qu'il peut apporter.

La loi « Mathys » de 2014, étendue à la fonction publique en 2015, permet le don de jours de repos non pris, entre collègues, pour les parents d'un enfant de moins de vingt ans atteint d'une maladie grave ou d'un handicap. La proposition de loi de notre collègue Paul Christophe, en discussion ce matin, vise à étendre le don de jours de repos entre collègues aux proches aidant une personne en perte d'autonomie d'une particulière gravité. Cette générosité entre collègues peut permettre à l'aidant soit d'avoir plus de temps à consacrer à la personne aidée, soit de s'accorder un peu de répit. Ce texte répond de plus à une promesse de campagne de notre président. Il sollicite et favorise la solidarité entre entreprises sur le modèle de ce qui se fait déjà avec la loi « Mathys ». Il repose sur l'anonymat et le volontariat. Cet appel à la solidarité interentreprises devrait en outre avoir pour effet de sensibiliser davantage les directions des ressources humaines à la question des aidants familiaux au sein de l'entreprise. En effet, il est fondamental qu'un proche aidant ne soit pas vu sous le seul prisme du professionnel épuisé, qui potentiellement pourrait être moins opérationnel ou disponible, mais bien comme l'expression d'un problème sociétal qui nous concerne ou nous concernera tous et qui mérite, j'en suis convaincue, une réflexion collective beaucoup plus large intégrant les prévisions d'évolutions démographiques et la nécessaire adaptation de notre société.

Le groupe REM souhaite proposer, par voie d'amendement, d'étendre également ce dispositif aux aidants de proches en situation de handicap. Parce que nous sommes sensibles et attentifs à la situation des aidants, nous soutenons cette proposition de loi qui ouvre une nouvelle voie à élargir.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.