Intervention de Fiona Lazaar

Séance en hémicycle du jeudi 7 décembre 2017 à 9h30
Dons de jours de repos non pris aux aidants familiaux — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFiona Lazaar :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, chers collègues, la France compte 11 millions d'aidants familiaux, des Françaises et des Français qui s'investissent au quotidien pour accompagner un proche – parent, conjoint, enfant – en perte d'autonomie.

Nous connaissons toutes et tous une personne qui assume ce rôle. Ici même, certains d'entre nous vivent personnellement cette situation.

Cette réalité est donc vécue par très nombreux Français, et nous sommes unanimes à saluer l'apport social important de ces 11 millions d'aidants : ils effectuent en effet au quotidien un travail formidable et utile, complémentaire des mécanismes de la solidarité nationale.

Ce travail permet à de nombreuses Françaises et à de nombreux Français de vivre de manière moins dure leur perte d'autonomie. Les aidants familiaux s'investissent sur une base quotidienne, le plus souvent en parallèle d'une vie personnelle et professionnelle qui peut souffrir du temps, de l'énergie et de la disponibilité exigées par leur rôle.

Beaucoup d'entre eux travaillent en effet : certaines études révèlent que 15 % des actifs sont des aidants familiaux. Et le constat est clair : 60 % des aidants déclarent avoir du mal à concilier leur travail et leur rôle d'aidant.

Malgré le travail formidable qu'ils effectuent au quotidien, et le consensus sur les difficultés évidentes à concilier cette activité d'aidant avec une vie personnelle et professionnelle, les aidants manquent aujourd'hui de reconnaissance sociale, juridique et politique.

Je veux donc saluer cette initiative parlementaire, qui intervient quelques semaines après la Journée nationale des aidants du 6 octobre dernier qui a mis en lumière les progrès que nous devons faire dans leur reconnaissance et leur accompagnement.

Il est d'autant plus important d'agir que le vieillissement de la population et l'allongement de l'espérance de vie vont amplifier le phénomène. C'est pourquoi notre assemblée a, depuis plusieurs années, voté plusieurs mesures qui ont permis des avancées positives et substantielles.

Je pense en particulier à la définition légale du proche aidant, à l'instauration d'un droit de répit, à la création du congé de solidarité familiale et du congé de proche aidant qui permettent de suspendre le temps de travail professionnel au profit du temps de travail domestique, ou encore au don de jours de repos à un salarié parent d'un enfant gravement malade que permet la loi du 9 mai 2014.

La proposition de loi dont nous débattons propose d'élargir le dispositif mis en place par cette loi du 9 mai 2014 aux aidants familiaux. Devant le constat partagé des difficultés vécues par les aidants familiaux, elle va bien sûr dans le bon sens.

En effet, elle permettra aux aidants de dégager du temps pour leur activité d'aidant sans impact financier pour eux, grâce au mécanisme vertueux du don.

Mais c'est aussi une mesure qui contribuera directement, même si c'est au premier abord moins évident, à promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes, et en premier lieu parce que les femmes sont les premières concernées.

La majorité des aidants sont en effet des aidantes, des femmes : 60 % à 75 % selon les études. Elles représentent par ailleurs une part importante des personnes âgées isolées, du fait d'une espérance de vie plus longue ainsi que de plus grandes difficultés financières à financer cette dépendance du fait de leur plus faible niveau de salaire lorsqu'elles étaient en activité.

Mais surtout, cette proposition de loi participe de cette grande cause parce que les femmes sont les premières à être impactées, dans leur vie professionnelle, par leur statut d'aidant.

Les femmes optent en effet plus souvent que les hommes pour une interruption d'activité ou pour une réduction du temps de travail : cela est notamment dû au fait que les dispositifs de congés qui existent aujourd'hui – et dont il ne s'agit pas de remettre en cause ici le bien-fondé – incitent davantage les femmes que les hommes à les utiliser.

En effet, les congés de solidarité familiale et de proche aidant, qui permettent aujourd'hui aux aidants de dégager du temps, ne sont pas rémunérés. En conséquence, du fait des écarts de salaires qui subsistent aujourd'hui, les femmes sont plus volontiers incitées à y recourir que les hommes.

Compte tenu de la situation difficile des aidants et de la nécessité de créer des dispositifs facilitateurs pour ces femmes et ces hommes qui s'impliquent au quotidien, et parce que j'ai la conviction que c'est là aussi l'occasion d'accomplir un progrès dans le combat qui est le nôtre, celui de notre grande cause nationale, l'égalité entre les femmes et les hommes, je soutiens et voterai cette proposition de loi.

Elle marque en effet une nouvelle étape qui doit, je le pense, en appeler d'autres et ouvrir, de manière plus large, le débat sur la reconnaissance et l'accompagnement des aidants familiaux.

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