Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du jeudi 7 décembre 2017 à 15h00
Taxe sur les transferts de sportifs professionnels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je parlerai essentiellement du football, parce que c'est le sport que je connais le mieux, et parce qu'il est devenu, par son omniprésence, un véritable phénomène de société, comme en témoignent les fortes audiences, la passion qu'il suscite et les mouvements financiers qu'il occasionne.

Le football est multiforme et omniprésent. Des millions d'enfants, d'hommes et de femmes le pratiquent librement et, en clubs organisés, ce sont plus de 2 millions de licenciés qui sont inscrits à la Fédération française de football. Cette dernière peut afficher des chiffres impressionnants : 2 165 000 licenciés, 400 000 bénévoles, 15 000 clubs, dont 40 professionnels, 7 000 salariés et plus de 836 000 parties organisées chaque année.

Le football amateur, qui pénètre jusqu'aux plus petites communes, joue un rôle considérable non seulement de liant social, de formation sportive, mais également d'apprentissage de la vie en société. Ce sont des milliers de formateurs qui s'évertuent, dans des conditions souvent très difficiles, à transmettre des comportements sportifs et à promouvoir l'idée de loyauté, d'engagement honnête et de respect des autres. Le football amateur doit être pris en considération pour ce qu'il représente réellement sur le plan sportif, bien sûr, mais également sur le plan social et sociétal. Tout cela contraste avec la difficile réalité souvent vécue par les clubs : difficulté de gestion quotidienne, de trésorerie, d'infrastructures. Bien des petites équipes connaissent, au quotidien, des méthodes de gestion qui relèvent en fait du bricolage.

À côté de cette réalité, il y a le football professionnel, qui nous fait changer d'univers. Nous entrons là dans un monde complexe, fait de formation, de dirigeants, de déplacements, d'infrastructures, d'agents, de transferts, de médias. Un monde où l'unité de mesure est le million d'euros. Il est hiérarchisé, à l'échelle française, européenne, mondiale, et quelques grandes institutions dominent une majorité de sociétés de second et de troisième rang, qui tentent de survivre à la compétition sportive, et surtout financière, qui dicte le jeu quotidien.

Cette logique, liée à la disproportion des forces en présence, cette compétition permanente, la passion et la folie qui président à la compétition, l'obligation de résultat ont conduit à une surenchère qui a atteint des niveaux véritablement inquiétants. Cette logique a encore été renforcée par l'irruption d'investisseurs venant de pays pas toujours recommandables. J'aimerais vous poser une question, sans donner de leçons : est-il normal qu'un joueur, quel que soit son talent, puisse en arriver à avoir une valeur de marché quatre fois supérieure à celle d'un avion de ligne ? Question intéressante !

Les sommes mises en mouvement par le football professionnel posent objectivement un problème. En Europe, les dix clubs les plus endettés enregistrent des déséquilibres allant de 200 à 550 millions d'euros pour un total de 2,854 milliards d'euros – pour autant qu'on puisse le savoir, car un certain flou entoure cet univers, malgré l'instauration du fair-play financier. Il faut bien sûr relativiser ces données à la lumière de la valorisation boursière de ces clubs, qui atteint des niveaux astronomiques, chiffrés en dizaines de milliards d'euros. Le football français est également marqué, malgré le contrôle de la Direction nationale du contrôle de gestion – DNCG – , par un indiscutable glissement vers l'endettement cumulatif, qui va devenir problématique à terme. Il a déjà contraint un certain nombre de clubs à la rétrogradation administrative.

La plus douloureuse d'entre elles a été, pour moi, celle du Sporting Club de Bastia qui, malgré quarante-trois années de haut niveau, a perdu cinq divisions d'un coup. Je profite d'ailleurs de ma présence à cette tribune pour faire un clin d'oeil amical à tous mes amis et pour leur dire : Camperemu ! La situation de ce club, qui est de loin le plus populaire de Corse, illustre la difficulté à survivre dans un tissu démographique et entrepreneurial faible. Chacun connaît la logique économique de ce système : l'intérêt du public entraîne l'investissement publicitaire des entreprises, qui entraîne à son tour la couverture télévisuelle, principale source de revenus.

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