Intervention de Éric Coquerel

Séance en hémicycle du lundi 12 avril 2021 à 16h00
Lutte contre le dérèglement climatique — Article 39

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Coquerel :

La ministre de la transition écologique a qualifié la question des passoires thermiques d'« enjeu majeur » du projet de loi. Je crains que nous ne la traitions plutôt en mode mineur, comme toutes celles abordées dans le texte. Nous partons en effet déjà d'un très mauvais point de départ : le Haut Conseil pour le climat (HCC) souligne que la France affiche, pour ce qui est de ses logements les moins performants, le pire bilan énergétique d'Europe.

Nous discutons ici de la nouvelle classification introduite par un amendement adopté en commission spéciale. Or nous avons déjà connu, par le passé, plusieurs épisodes à l'occasion desquels on a, en modifiant les critères, brutalement fait baisser le nombre de passoires thermiques. Il y eut d'abord le nouveau calcul qui, en août 2020, a permis de faire passer ce nombre de 7,4 millions à 4,8 millions, alors même que le HCC estime que 6,7 millions de personnes sont touchées par la précarité énergétique. Vint ensuite le décret du 11 janvier 2021, en vertu duquel, à partir de 2023, un logement sera qualifié d'énergétiquement décent à partir d'un seuil exprimé non plus en énergie primaire – dont on sait pourtant qu'elle est la seule permettant de calculer réellement le niveau de performance d'un bâtiment –, mais en énergie finale.

Et voilà maintenant qu'on nous explique que le fait d'étendre la définition des rénovations dites performantes aux travaux permettant d'atteindre le niveau C, voire le niveau D, ne prête pas à conséquence, parce qu'il s'agit d'une simple question de sémantique ! C'est faux : une telle mesure change considérablement les choses ! D'après une note interne de l'Agence de la transition écologique (ADEME) publiée par la revue en ligne Contexte, la consommation du parc bâti serait deux à trois fois supérieure à l'objectif national fixé par le code de l'énergie si cette définition de la « rénovation performante » était retenue. C'est donc tout sauf anodin.

Je profite de l'occasion pour soutenir par avance les amendements visant à revenir à l'ambition initiale du texte – ils seront, me semble-t-il, examinés lorsque nous aborderons l'article 39 ter : j'espère vivement que, d'ici là, le Gouvernement reverra sa position et que nous en reviendrons à la rédaction initiale, qui réservait le terme « performant » aux bâtiments de niveau A ou B, sans intégrer les catégories C et D. C'est loin d'être une simple question de rédaction.

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