Intervention de Hervé Pellois

Séance en hémicycle du jeudi 20 juillet 2017 à 9h35
Débat d'orientation des finances publiques pour 2018

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Pellois :

Madame la présidente, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, alors que débutent, ce matin à Paris, les États généraux de l'alimentation voulus par le Président de la République, je voudrais profiter de ce débat d'orientation sur les finances publiques pour dresser un tableau des enjeux fondamentaux pour notre agriculture et notre industrie agroalimentaire.

Le secteur agricole souffre d'une conjoncture économique particulièrement dégradée : les années 2015 et 2016 et les crises successives frappant la plupart des filières animales, les aléas climatiques dans le secteur des céréales et les difficultés sanitaires dans la filière des volailles ont conduit de nombreux agriculteurs à percevoir des revenus indécents. Un tiers des agriculteurs ont perçu des revenus inférieurs à 354 euros par mois en 2016, selon la MSA. Les résultats nets par actif ont diminué de 27 % par rapport à 2015. Les chiffres présentés par l'INSEE, le 6 juillet dernier, lors de la commission des comptes de l'agriculture de la nation, nous interpellent : la valeur de la production française, hors subvention, estimée à 69,5 milliards d'euros, a diminué de 4,9 milliards d'euros, soit une baisse de 6,6 %.

Aujourd'hui encore, le manque de perspective d'amélioration de la conjoncture dans les filières lait, ovins, viandes et volailles pèse sur le moral de nos agriculteurs. Ce ne sont pas le Brexit et la nouvelle réforme de la PAC post-2020 qui apportent aujourd'hui des éléments de quiétude pour la profession. Les agriculteurs français aspirent notamment à réduire ou à amortir la volatilité des prix. Il est encore trop tôt pour savoir ce qui résultera des négociations européennes et de la nouvelle réglementation issue de la loi Sapin 2 visant à moraliser les rapports entre nos agriculteurs, l'industrie agroalimentaire et la grande distribution.

Autre sujet d'interrogation, les attentes sociétales montent en puissance, année après année. Le développement des oeufs alternatifs, de l'agriculture biologique et des différents cahiers des charges de produits territoriaux s'accélère et bouscule nos filières, qui ne sont pas toujours suffisamment réactives. Les consommateurs s'intéressent aujourd'hui à l'origine des produits, au bien-être animal, aux conséquences sur leur santé, aux modes de production, et c'est très bien ainsi. Ces contraintes peuvent devenir une chance pour notre agriculture, si nous savons répondre collectivement à ces attentes.

Le plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles mis en place par le Gouvernement précédent pour moderniser nos outils de production répond aux espérances de nos agriculteurs. Malgré la crise, les investissements dans les bâtiments sont en légère augmentation, de 0,8 %, en 2016, contrairement à ceux réalisés pour acheter du matériel, qui ont diminué de 4,8 %.

Cet effort doit être poursuivi, voire intensifié, car nos outils de production sont vieillissants par rapport à nos concurrents allemands ou polonais, et ne permettent pas d'atteindre les niveaux de performance, tant au niveau énergétique que technique. L'ambitieux programme d'investissement d'avenir agricole de cinq milliards d'euros sur cinq ans proposé par notre majorité va permettre l'accès à des financements nouveaux pour des projets de modernisation des exploitations respectueuses de l'environnement. Il concernera aussi les projets de développement d'activités de transformation et de distribution qui favorisent les circuits courts et les projets coopératifs.

Les agriculteurs sont aussi, et avant tout, des entrepreneurs, et ils bénéficieront des mesures annoncées pour libérer le travail. Ils ne veulent pas que la création de valeur ajoutée soit aussitôt dilapidée et écrasée par la guerre des prix à laquelle se livre la grande distribution. La revalorisation de la dotation Jeune Agriculteur, la DJA, est également attendue.

Les politiques budgétaires agricoles n'ont pas vocation à être élaborées au fil des crises successives. Elles doivent s'inscrire dans un modèle pérenne et stable, qui donne plus de visibilité et de protection à nos agriculteurs. Par ailleurs, je souscris aux propos de M. le ministre de l'action et des comptes publics quant à la nécessité d'évaluer les politiques publiques du point de vue de leurs résultats plutôt que des moyens. Un contrôle a posteriori renforcé me paraît d'autant plus approprié que nous traversons des périodes de crise, qui appellent à une modification des dépenses budgétaires en cours d'année.

Les politiques budgétaires ne sont pas les seules à avoir un impact concret sur l'agriculture, mais elles représentent une part essentielle des actions qui peuvent être menées. La France a de nombreux atouts, grâce à une agriculture très diversifiée. Donnons-lui les moyens d'être à la fois compétitive en Europe et de répondre aux grands défis que lui lancent la vingt et unième conférence des parties – COP 21 – et les aspirations des consommateurs.

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