Intervention de Adrien Taquet

Séance en hémicycle du mardi 8 juin 2021 à 15h00
Bioéthique — Article 1er

Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles :

Ces amendements en discussion commune poursuivent effectivement parfois des objectifs différents. Je vais donc prendre le temps, si vous m'y autorisez, de détailler les réponses du Gouvernement.

S'agissant des amendements identiques n° 861 et 870 de M. Patrick Hetzel et de M. Xavier Breton visant à interdire le don dirigé au sein d'un couple de femmes et exprimant une volonté partagée de maintenir le principe de l'anonymat du don, vous savez que ce principe, auquel le Gouvernement est évidemment très attaché, est déjà prévu dans la loi. C'est pourquoi nous formulons une demande de retrait ; sinon l'avis sera défavorable.

S'agissant de votre amendement n° 1039 , monsieur Brindeau, qui souhaite inscrire explicitement dans la loi que le don d'ovocytes de la compagne est interdit dans le cas d'un couple de femmes et ainsi faire obstacle à cette méthode dite de la ROPA, sur laquelle nous aurons l'occasion de revenir, nous avons pris position sur cette technique lors de nos débats précédents. Nous n'y sommes pas favorables pour des raisons que j'aurai l'occasion de développer, notamment en réponse aux amendements de vos collègues de la majorité.

Il n'est toutefois pas besoin, à l'inverse, d'inscrire une telle interdiction dans la loi puisque le don de gamètes ne peut être dirigé, y compris vers son partenaire. Le cadre actuel fait donc déjà obstacle à une telle pratique, raison pour laquelle je vous proposerai également, votre amendement étant satisfait, de le retirer, faute de quoi l'avis sera défavorable. Il en est de même pour les amendements identiques n° 862 et 871 de M. Patrick Hetzel et de M. Xavier Breton, ainsi que pour l'amendement n° 1147 de M. Thibault Bazin, qui visent les mêmes objectifs.

L'amendement n° 31 de M. Raphaël Gérard vise, quant à lui, à prioriser l'utilisation des gamètes au sein du couple, qui relève en réalité du don dirigé ou a, à tout le moins, cette implication. Or la loi ne le permet pas, puisqu'elle garantit, comme vous le savez, un anonymat strict entre donneur et receveur. Il est aisé de comprendre qu'en autorisant une dérogation dans le cadre d'un couple d'autres demandes se feront jour, pour justifier une extension des dons dirigés au-delà d'un couple. Le Gouvernement n'envisage pas de revenir sur le principe d'anonymat au moment du don, c'est-à-dire de permettre au donneur ou au receveur de connaître leurs identités respectives. Les risques de pression financière ou morale entre le bénéficiaire et le donneur existent et ne peuvent être évacués – raison pour laquelle l'avis du Gouvernement est défavorable à cet amendement.

De la même façon, monsieur Leseul, nous exprimons un avis défavorable sur l'amendement n° 958 , ainsi que sur l'amendement n° 330 qui a été défendu par Mme Caroline Fiat. Avis défavorable également sur l'amendement n° 525 de M. Guillaume Chiche.

Enfin, l'avis est aussi défavorable, mais pour des raisons sensiblement différentes, à l'amendement n° 325 de Mme Sylvia Pinel. Cet amendement, qui vise à autoriser la méthode dite de la ROPA, touche au principe fondamental de la médecine consistant à ne pas pratiquer d'acte médical non nécessaire et non justifié médicalement, que M. le député Raphaël Gérard a évoqué précédemment.

Dans la grande majorité des cas, il suffit, pour aboutir à une grossesse au sein d'un couple de femmes, de procéder à une insémination artificielle. Or la ROPA suppose plusieurs stimulations ovariennes du membre du couple donneur d'ovocytes, qui viennent s'ajouter à la fécondation in vitro, au transfert d'embryons et à la congélation d'embryons. Nous sommes évidemment sensibles à la volonté de deux mères de participer au projet parental, mais cette conception de la double maternité entre en contradiction avec toute la philosophie de ce projet de loi, selon laquelle le projet parental repose sur l'amour que l'on souhaite donner à un enfant sans que la biologie prime.

Si nous considérons effectivement que les deux femmes membres du couple doivent participer à la fusion des gamètes pour être considérées l'une et l'autre comme mères, nous devons par ailleurs nous interroger sur notre vision de la parentalité pour les FIV avec tiers donneur dans un couple hétérosexuel. Tout le projet de loi repose sur le principe selon lequel un donneur de gamètes n'est pas forcément un père ou une mère, les parents étant ceux qui élèvent l'enfant et lui apportent amour et sécurité – cela a fait l'objet de nombreux débats entre nous hier soir –, raison pour laquelle nous exprimons un avis défavorable sur cet amendement ainsi que sur les amendements n° 30 et 10 de M. Raphaël Gérard et de Mme Laurence Vanceunebrock.

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