Intervention de Martine Wonner

Séance en hémicycle du lundi 18 décembre 2017 à 21h30
Reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Wonner :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, je suis l'élue d'une circonscription située sur un territoire transfrontalier et, comme tous les collègues de mon groupe, je suis attachée aux valeurs européennes, dont je suis fière. La libre circulation des personnes entre pays de l'Union européenne est aujourd'hui une réalité qui doit être préservée et, à ce titre, je défends ce projet de loi. C'est aussi au titre de médecin spécialiste que je m'exprime, un médecin qui a toujours été attaché à la formation, aux compétences et à la place de la qualification.

Je ne reviendrai pas sur les directives européennes de 2005 et de 2013, mais j'évoquerai uniquement l'ordonnance présentée au Conseil des ministres de janvier 2017, qui transpose en droit interne trois dispositifs nouveaux : l'accès partiel, la carte professionnelle européenne et le mécanisme d'alerte.

Les autres points ayant été déjà beaucoup évoqués, je ne m'exprimerai que sur l'accès partiel, qui a semblé émouvoir certains collègues. L'autorisation d'exercice avec un accès partiel permet à un professionnel, pleinement qualifié dans l'État membre d'origine, d'exercer une partie seulement des actes relevant d'une profession réglementée en France. Cette autorisation est encadrée par des conditions très strictes et par un examen au cas par cas des demandes, qui pourront être refusées pour un motif impérieux d'intérêt général tenant à la protection de la santé publique.

Il est ainsi prévu que l'accès partiel à une activité professionnelle puisse être accordé uniquement lorsque les trois conditions suivantes sont remplies : le professionnel est pleinement qualifié pour exercer, dans l'État membre de l'Union européenne d'origine, l'activité professionnelle pour laquelle il sollicite un accès en France ; les différences entre l'activité professionnelle légalement exercée dans l'État d'origine et la profession correspondante en France sont si importantes que l'application de mesures de compensation reviendrait à imposer au demandeur de suivre le programme complet d'enseignement et de formation requis pour avoir pleinement accès à la formation en France ; l'activité professionnelle pour laquelle l'intéressé sollicite un accès peut objectivement être séparée d'autres activités relevant de la profession en France.

L'autorisation d'exercice avec accès partiel définie par cette ordonnance renforce le rôle des ordres professionnels et garantit l'information des patients, protégeant ainsi la qualité des soins. Pour rendre une décision sur une demande d'accès partiel, l'autorité compétente devra prendre l'avis de l'ordre professionnel régional. Le professionnel de santé devra exercer sous le titre de l'État d'origine rédigé dans la langue de cet État et informer clairement les patients et les autres destinataires de ses services des actes qu'il est habilité à effectuer dans le champ de son activité professionnelle. Il convient de préciser que l'accès partiel n'est pas applicable aux professionnels qui remplissent les conditions requises pour bénéficier de la reconnaissance automatique de leurs qualifications professionnelles, notamment les médecins.

Si nous pouvons comprendre la crainte de certains personnels de santé et ordres professionnels, nous devons également être cohérents et pragmatiques.

Alors, chers collègues, pourquoi voter ce projet de loi en toute confiance ? Le Gouvernement s'est engagé à procéder à une concertation avec les représentants des professions disposant d'un ordre et le projet de décret sera soumis à l'avis du Haut Conseil des professions paramédicales lors d'une prochaine séance. La rédaction des modalités et des décrets d'application fera l'objet d'une vigilance particulière. Le groupe soutient cette position et sera particulièrement attentif à son respect.

Toute demande devra recueillir l'avis des ordres professionnels dans un délai court ne dépassant pas quatre mois et l'évaluation des compétences des personnels dont l'activité partielle sera autorisée devra être régulière et pratiquée par des pairs expérimentés dès les premiers mois d'exercice. Ces conditions claires et indispensables, qui permettront d'éclairer les patients comme les professionnels de santé, donnent à ces articles tout leur sens. Aucun risque ne sera pris en matière de qualité et de sécurité des soins, et la France honorera ses engagements européens.

Ce projet de loi est un premier pas vers l'accueil dans notre pays des personnels de santé formés dans un autre État de l'Union européenne. Nous devons faire confiance à leur compétence, qui sera aussi synonyme de partage et d'apport pour nos personnels de santé. Ce projet est enfin une des solutions permettant de commencer à asseoir la délégation de compétence et de contribuer à lutter contre les déserts médicaux, car si la problématique affecte clairement les médecins, ces derniers s'appuient sur un réseau et un maillage de professionnels paramédicaux.

Puisque les compétences et l'évaluation sont au coeur de ce projet de loi, je vous invite à le voter.

1 commentaire :

Le 22/12/2017 à 10:31, Laïc1 a dit :

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"Si nous pouvons comprendre la crainte de certains personnels de santé et ordres professionnels, nous devons également être cohérents et pragmatiques."

Les ordres professionnels pour lesquels la santé financière du médecin est plus importante que la santé tout court du citoyen.

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