Intervention de Constance Le Grip

Séance en hémicycle du mardi 19 décembre 2017 à 15h00
Orientation et réussite des étudiants — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaConstance Le Grip :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, en un peu moins d'un mois, le Gouvernement aura présenté en Conseil des ministres, puis fait voter en commission, un projet de loi relatif, selon un titre plein de promesses, « à l'orientation et à la réussite des étudiants ». Les mots sonnent agréablement et s'annoncent prometteurs. Nous partageons tous, dans cet hémicycle, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons, la volonté de faire réussir nos étudiants et de mettre fin à la spirale de l'échec, qui voit 60 % de nos jeunes échouer à la fin de la première année de licence.

En réalité, avec seulement six articles dans sa version initiale, le projet de loi esquive les vrais sujets de fond, dont celui des critères d'accès à l'enseignement supérieur. Vous nous proposez, madame la ministre, de répondre à des problèmes techniques, certes importants et légitimes, sans définir une vision globale de ce que devrait être l'enseignement supérieur français. Cette absence de perspective est encore plus marquante s'agissant de l'université. Pour nous, députés du groupe Les Républicains, le défi de l'enseignement supérieur et de la recherche dans notre pays ne pourra être véritablement relevé qu'avec un acte II de l'autonomie des universités et des établissements d'enseignement supérieur. Nous en sommes très loin, et déplorons l'occasion ici manquée.

Les mentalités ont en effet évolué. Le Président de la République lui-même déclarait, dans une interview au journal Le Point, vouloir mettre fin au mythe de l'université pour tous. Mais, par crainte sans doute de mouvements sociaux et de blocages, et peut-être également en raison de liens forts entre votre majorité et la précédente, cette louable intention présidentielle est passée à la trappe. Les échanges en commission, puis en séance, n'auront pas permis de faire évoluer substantiellement le projet de loi initial, ce que nous regrettons.

Peu des 421 amendements déposés par l'ensemble des groupes ont été adoptés. Sur les 126 amendements déposés par les députés Les Républicains, seuls trois ont été adoptés : l'un en commission, les deux autres en séance publique. Vous comprendrez aisément que le résultat ne soit à la hauteur ni des espérances suscitées par les premières déclarations de l'exécutif, ni du défi qui se pose à nous, dix ans après la grande loi d'autonomie des universités de Valérie Pécresse et Nicolas Sarkozy.

Nous n'avons eu de cesse de dénoncer les insuffisances et le caractère inachevé, inabouti, incomplet et, à certains égards, inquiétant des mesures que vous nous proposez aujourd'hui. Certes, nous vous donnons acte de la suppression du tirage au sort, opération injuste et arbitraire dont nous avions demandé la suppression à plusieurs reprises. En revanche, vous avez tiré de l'injonction faite par la CNIL cet été la conclusion qu'il fallait supprimer entièrement la plateforme APB et la remplacer par une autre. Nous n'avons pas cessé non plus, au cours des débats, de vous faire savoir que nous ne comprenions pas l'intérêt et la pertinence de supprimer la hiérarchisation des voeux et de les faire passer de vingt-quatre à dix au maximum.

Nous regrettons que vous ayez confondu vitesse et précipitation. Nous déplorons également que beaucoup des améliorations que nous proposions n'aient pas été retenues, s'agissant notamment des fameux attendus, début de commencement, si je puis dire, d'une meilleure articulation entre la formation des futurs bacheliers et les caractéristiques requises pour accéder à l'enseignement supérieur. Ces attendus, très timides, sont formulés en des termes très généraux dans un document national de cadrage dont nous n'attendons en réalité pas grand-chose.

C'est décidément, je le répète, une occasion ratée, qui esquive le débat de fond. Nous aurions souhaité plus de volontarisme et une vision beaucoup plus aboutie de la voie que doit prendre l'université française pour relever le défi qui se pose à elle. Pourquoi esquiver à ce point le débat sur la sélection ? Pourquoi esquiver à ce point le débat sur les exigences pédagogiques que nous avons demandées, nous, Les Républicains, dans un amendement, afin de mieux faire coïncider la formation des futurs étudiants avec ce que l'on peut attendre d'eux, pour une pleine et entière réussite dans l'enseignement supérieur ?

Pour toutes ces raisons, et parce que nos futurs bacheliers et leurs familles verront nombre de leurs attentes et de leurs espoirs déçus, nous ne pouvons soutenir ce projet de loi, et voterons donc contre lui.

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