Intervention de Pierre Bauby

Réunion du mercredi 13 décembre 2017 à 16h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance

Pierre Bauby, directeur de l'Observatoire de l'action publique, Fondation Jean Jaurès :

Merci de m'avoir invité à réfléchir à ce projet de loi. La réforme de l'État est un serpent de mer dont on parle depuis que l'État existe. J'ai été frappé de trouver pour la première fois dans le titre du projet de loi le mot « confiance » : il est inhabituel de voir ce lien entre l'État et les citoyens évoqué de la sorte.

C'est pourtant le mot-clé du projet de loi et de sa philosophie, ce qui m'amène à une première réflexion : si on parle de confiance, cela signifie qu'il y a de la méfiance, sinon cet objectif n'aurait pas de sens. Je déplore qu'à aucun moment ni l'exposé des motifs ni l'étude d'impact ne tentent de recenser quelles sont les méfiances existantes qui paralysent ou handicapent les relations entre l'État, les citoyens et les divers acteurs. Cet état des lieux serait pourtant utile afin que ce projet remédie à ces méfiances.

Pour éclairer ce débat et répondre aux questions de votre rapporteur sur la philosophie et les principes, je tenterai de prendre un peu de recul.

Aujourd'hui, lorsque l'on évoque l'État et ses rapports avec la société, on parle des décideurs politiques, des services administratifs et des agents publics ainsi que de tous les acteurs de la société dite civile, qu'il s'agisse des citoyens, des individus – les utilisateurs comme disent les textes européens –, des entreprises et des acteurs économiques.

Il existe donc trois grandes catégories d'acteurs entre lesquelles se manifestent des méfiances. Les taux d'abstention aux élections montrent que tel est bien le cas entre les décideurs politiques et les citoyens. Réciproquement, l'histoire de l'État en France – qui est très particulière – et sa sédimentation montrent une méfiance spontanée de l'État envers les citoyens, considérés comme suspects de vouloir abuser de leur situation.

Une société de confiance, l'exposé des motifs et le projet de loi le disent bien, implique de changer de vision, de paradigme, de sortir par le haut du débat entre ceux qui prônent plus d'État, parce qu'il est protecteur, et ceux qui veulent moins d'État, parce qu'il est le fossoyeur des libertés… Pour cela, il faut s'interroger sur les finalités, les missions, les objectifs.

Il faut ainsi remettre l'État à sa place : il ne doit pas être dominateur de la société, ce qu'il a trop été en France comme dans d'autres pays. Mais il n'en faut pas moins lui donner toute sa place, et ne pas en faire un État minimal ou croupion, comme nos amis de l'IFRAP ont parfois pu le dire ou l'écrire…

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