Intervention de Bruno le Maire

Réunion du mercredi 19 juillet 2017 à 19h05
Commission des affaires économiques

Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances :

S'agissent du financement des TPE, Madame Bénédicte Taurine, je ne me reconnais guère dans les discours de ceux qui nient tout problème d'accès au crédit pour les entreprises de notre pays. Si les PME et les grandes entreprises ont accès au crédit, ce n'est pas le cas des TPE, qui peinent parfois à trouver 5 000 euros, 10 000 euros ou 15 000 euros. Cela peut être un boulanger qui veut refaire son pas-de-porte, un serrurier qui a besoin de rénover l'intérieur de son magasin.

Au passage, je répète à M. Sébastien Jumel que le pays que nous voulons construire est une France pour tous les Français et pas seulement pour les grands et les gagnants. J'ai demandé à La Poste d'être cette banque qui apportera les moyens dont ils ont besoin à ceux qui cherchent un petit crédit. Pourquoi La Poste ? Parce qu'elle a la surface financière et les relais sur le territoire pour le faire, et parce qu'elle peut parfaitement compléter l'action de Bpifrance ou de structures financières plus lourdes qui prêtent des montants plus importants. Étant élu d'un territoire rural qui a connu la désindustrialisation, je sais à quel point les petites entreprises ont du mal à se développer et je serai particulièrement attentif dans ce domaine.

Le député de Dieppe m'interpelle aussi sur le libéralisme. Vous pouvez mettre les étiquettes que vous voulez sur qui vous voulez, mais je veux que l'on sache bien quel type de produit se trouve dessous. Mon libéralisme n'est pas du laisser-aller ni du laisser-faire.

Quand je suis arrivé à Bercy, il n'y avait pour l'entreprise GM&S de La Souterraine aucune offre de reprise, aucun investissement en vue, aucun soutien prévu de l'État. Si j'avais appliqué les règles d'un libéralisme sauvage, j'aurais suivi les recommandations qui m'ont été faites : « laissez tomber, ce site n'a pas d'avenir », « la Creuse, c'est trop loin », « La Souterraine, c'est perdu ». J'ai eu exactement la réaction inverse.

Après des semaines de négociations que nous avons conduites avec M. Benjamin Griveaux, où en sommes-nous ? Il y a une offre de reprise présentée par un repreneur sérieux. Quinze millions d'investissements supplémentaires vont être réalisés dans cette usine dont 5 millions d'euros vont être apportés par l'État. Si le libéralisme sauvage se caractérise par le fait que l'État investit dans une entreprise en difficulté, il va falloir qu'on change les étiquettes ! Les groupes Renault et Peugeot vont aussi accorder 5 millions d'euros chacun – le président de Peugeot lui-même s'y est engagé hier. GM&S a des commandes sécurisées représentant un montant de 22 millions d'euros sur les cinq années à venir. Ces commandes ne sont pas tombées du ciel ; elles sont le fruit de négociations. L'État a pesé de tout son poids pour que GM&S ait un avenir. J'estime qu'il appartient à l'État de ne pas laisser tomber une entreprise industrielle située dans un département reculé dont l'accès est difficile.

Vous parlez de l'État actionnaire et de Sandouville. Vous connaissez comme moi, Monsieur Sébastien Jumel, les chiffres de l'emploi à Sandouville. La présence de l'État au capital de Renault n'a pas empêché la ville de perdre des centaines et des centaines d'emplois. Si l'État actionnaire garantissait l'emploi, cela se saurait. Ce qui garantit l'emploi, c'est la compétitivité d'une entreprise et sa capacité à prendre des parts de marché, ce n'est pas la présence de l'État à son capital. Renault – entreprise qui fonctionne remarquablement bien et qui va devenir l'un des premiers constructeurs automobiles du monde – apporte la preuve que l'important est la compétitivité. Si la présence de l'État au capital était une garantie, Sandouville compterait encore plus de 4 000 emplois, comme il y a une dizaine d'années.

Madame Sophie Errante, vous étiez à Saint-Nazaire pour inaugurer le nouveau paquebot construit par STX et fêter un événement particulièrement positif : les chantiers navals ont engrangé 4,5 milliards d'euros de commandes, ce qui leur garantit des années d'activité. La composition du capital prévue pour STX ne nous satisfaisait pas. Le Président de la République l'a dit clairement : cette fondation de Trieste, détentrice de 6 % des parts, n'était finalement qu'un faux nez permettant à l'actionnaire italien de maîtriser 54 % du capital.

De nouveaux équilibres seront définis dans les heures qui viennent. Les Italiens sont les bienvenus. Fincantieri, industriel renommé, est le bienvenu. Sa présence au capital de STX doit nous permettre de lancer une coopération franco-italienne de grande qualité dans le domaine de la construction navale. Je suis allé à Rome pour le dire aux autorités italiennes : il n'y a pas de suspicion, pas de rejet, au contraire. Nos amis industriels italiens sont les bienvenus pour développer l'activité et l'emploi de STX sur le site de Saint-Nazaire.

Cet actionnariat comptera aussi Naval Group, c'est-à-dire l'ex-DCNS, l'État et les salariés. Il est important d'associer les salariés au capital de l'entreprise, pour qu'ils puissent bénéficier directement du produit de leur travail et des bons résultats qu'ils obtiennent. C'est dans ce cadre que nous définirons les nouveaux équilibres. J'ose espérer que, dans les jours qui viennent, nous parviendrons à nous entendre avec les autorités italiennes sur la définition de ce nouvel équilibre, qui doit permettre, je le répète, d'ouvrir la voie à une grande coopération franco-italienne dans le domaine de la construction navale.

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