Intervention de Patricia Lemoine

Séance en hémicycle du mardi 15 février 2022 à 15h00
Accès transparent au marché de l'assurance emprunteur — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatricia Lemoine, rapporteure de la commission mixte paritaire :

Nous franchissons aujourd'hui une étape cruciale sur un sujet qui a alimenté de nombreux débats et réformes depuis près de quinze ans : l'assurance emprunteur pour les crédits immobiliers. S'attaquer à ce marché était un pari osé et semé d'embûches, qui était loin d'être gagné. Et pourtant, nous y sommes parvenus !

La proposition de loi que je défends depuis près de deux ans pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur, est le résultat de travaux menés conjointement avec le secteur bancaire, le secteur assurantiel, mais aussi les associations de malades – je salue tout particulièrement l'association RoseUp. Elle est également le fruit d'une concertation menée avec le Sénat dans un esprit constructif, pour aboutir à un texte équilibré, voté à l'unanimité par les membres de la commission mixte paritaire, que je remercie sincèrement.

Premier objectif : redonner du pouvoir d'achat aux Français. En réintroduisant l'article 1er du texte voté à l'Assemblée nationale, qui permet à tout assuré de résilier à tout moment son assurance emprunteur, nous offrons d'abord à celui-ci une liberté de choix dans un secteur majoritairement détenu par les banques – à plus de 87 % selon un rapport de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) – mais, surtout, nous lui ouvrons la possibilité de réaliser des gains substantiels, puisque, selon l'association UFC-Que choisir, pour un crédit de 250 000 euros, l'économie moyenne s'établirait entre 5 000 et 15 000 euros sur la durée du contrat, tout en étant totalement neutre pour les finances publiques.

Sur une année, ce ne sont pas moins de 550 millions qui seront économisés par les Français. C'est donc une mesure utile, alors que les enjeux de pouvoir d'achat restent au cœur de leurs préoccupations. Afin d'éviter tout risque de manœuvres dilatoires de la part du prêteur, nous renforçons l'information de l'assuré et nous relevons le niveau des sanctions ; de plus, l'avenant au contrat sera édité dans un délai de dix jours.

Deuxième avancée majeure du texte, issue de l'article 6 du texte initial : nous abaissons de dix à cinq ans le délai du droit à l'oubli pour les personnes ayant été atteintes de pathologies cancéreuses ou de l'hépatite virale C. Nous mettons ainsi fin à une injustice criante faite aux malades, condamnés à une double peine car ils devaient attendre plus de dix ans après la fin de leur protocole thérapeutique pour bénéficier du droit à l'oubli et accéder ainsi plus facilement au crédit immobilier. C'est donc un véritable espoir que nous leur redonnons, en leur offrant la possibilité de réaliser leur rêve d'accéder à la propriété, une étape parfois nécessaire pour se reconstruire.

Par ailleurs, nous renvoyons aux partenaires de la convention AERAS – s'assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé – le soin d'établir la liste des autres pathologies qui pourraient également bénéficier de ce dispositif. Nous leur demandons aussi de relever à 500 000 le plafond d'emprunt, fixé à 320 000 euros ; Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance, et Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, leur ont écrit un courrier en ce sens. La feuille de route est claire : ils doivent faire part de leurs propositions avant le 31 juillet 2022, faute de quoi la question sera renvoyée au pouvoir réglementaire.

Enfin, le texte tend à supprimer le questionnaire médical, pour les prêts d'une quotité inférieure à 200 000 euros par assuré et dont l'échéance de remboursement est antérieure au soixantième anniversaire de l'assuré. Cette mesure est ambitieuse, même révolutionnaire : un couple pourra emprunter jusqu'à 400 000 euros sans questionnaire médical. Je souligne le rôle qu'a joué le Sénat, qui nous a permis d'avancer plus loin encore qu'en première lecture, en particulier grâce au rapporteur Daniel Gremillet.

Afin de nous assurer que l'ensemble de ces mesures ne provoque pas d'effets de bord, notamment de hausse tarifaire pour les assurés, le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) évaluera le nouveau dispositif dans un délai de deux ans.

Sans posture politique aucune, je crois pouvoir affirmer que la commission mixte paritaire a abouti à un texte qui respecte un équilibre parfait entre équité, solidarité et libéralisation du marché de l'assurance emprunteur. Les deux rapporteurs n'ont eu qu'un fil conducteur : protéger le droit des assurés.

J'ai la conviction intime que le moment était opportun pour voter un texte de cette portée. Je remercie mes collègues du groupe Agir ensemble, en particulier Olivier Becht, d'avoir accepté d'inscrire cette proposition de loi à l'ordre du jour de notre niche parlementaire ; je remercie également l'ensemble des députés, de tous les bancs, qui l'ont soutenue dès la première lecture ; je salue enfin le Gouvernement, et notamment Bruno Le Maire, pour leur soutien.

Vous l'aurez compris, la présente proposition de loi est juste, utile, et très attendue par de nombreux Français. Je souhaite que le vote de cet après-midi illustre bien l'ambition de cette législature : agir ensemble, sans relâche, pour améliorer le quotidien des Français.

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