Intervention de Sylvia Pinel

Séance en hémicycle du mardi 15 février 2022 à 15h00
Accès transparent au marché de l'assurance emprunteur — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvia Pinel :

Bien que technique, le sujet de l'assurance emprunteur touche le quotidien de nos concitoyens qui ont besoin de recourir à l'emprunt – notamment à un emprunt immobilier. En effet, ils sont nombreux à vouloir acheter leur résidence principale, à souhaiter réaliser un investissement locatif. Presque tous vont devoir emprunter pour réaliser leur objectif, et une immense majorité d'entre eux sera dans l'obligation d'assurer son crédit.

Nous connaissons les chiffres : l'assurance du prêt immobilier représente en moyenne entre 6 % et 15 % du montant emprunté. Concrètement, un crédit de 180 000 euros sur vingt ans, souscrit par un emprunteur ayant entre 18 ans et 30 ans, coûtera en moyenne 9 936 euros en frais d'assurance. Ce chiffre important s'explique par une libéralisation lacunaire du secteur bancaire. Aujourd'hui, 87,5 % des contrats d'assurance restent détenus par les bancassureurs.

La loi Lagarde, portant réforme du crédit à la consommation, la loi Hamon, relative à la consommation, et l'amendement Bourquin ont accru la transparence du marché mais ne sont pas pour autant parvenus à établir une véritable concurrence dans le secteur bancaire. Aussi, comme vous, je pense qu'il faut aller plus loin en permettant aux consommateurs de résilier, à tout moment, leur assurance emprunteur. Leur ouvrir une telle possibilité revient à leur permettre de ne plus être captifs de leur établissement bancaire, tout en laissant la concurrence faire jouer les prix à la baisse. Quelques centaines, voire peut-être des milliers d'euros pour les prêts les plus importants, pourraient ainsi être économisés. Pour cela, il est nécessaire d'accroître le droit à l'information des emprunteurs. Je me réjouis donc du maintien, en commission mixte paritaire, des dispositions visant à imposer à l'assureur d'informer, chaque année, son assuré de son droit de résiliation.

Autre chiffre marquant : 30 % des demandes de substitution de contrat obtiennent une réponse hors délai, ce qui hypothèque – de fait – les chances de faire jouer la concurrence. Aussi, je salue les mesures qui – à l'article 4 et à l'article 5 – permettront de lutter contre ces manœuvres dilatoires et la mauvaise foi des banques.

Ces quelques mesures permettront, je l'espère, de faciliter l'accès de nos concitoyens à la propriété, car cela est, pour une grande partie d'entre eux, un projet de vie aujourd'hui difficilement accessible. Confrontés à une hausse des prix et à une lente érosion de leur pouvoir d'achat, les ménages des classes populaires et moyennes peinent à acquérir leurs logements. À cet égard, on peut d'ailleurs regretter l'affaiblissement, ces dernières années, de certains outils d'accession à la propriété : depuis 2017, le prêt à taux zéro (PTZ) a été raboté, et les aides personnalisées au logement (APL) pour l'accession ont été supprimées…

Concernant le second volet du texte, à savoir l'accès à l'emprunt et à l'assurance emprunteur des personnes ayant été atteintes de pathologie de longue durée, je veux saluer les avancées introduites par le Sénat. La suppression du questionnaire médical pour les prêts de moins de 200 000 euros permettra d'améliorer l'accès à la propriété. Eu égard au droit à l'oubli, je veux évoquer le sort des anciens malades, qui souffrent d'une double peine, car, alors qu'ils ont surmonté la maladie, ils doivent ensuite endurer les conséquences financières de l'altération de leur état de santé : refus de prêt, exclusions de garanties, très lourdes surprimes sont leur lot commun, même lorsqu'ils ont achevé leurs traitements des années auparavant.

Faute d'avancées significatives obtenues dans le cadre de la convention AERAS ces cinq dernières années, il était nécessaire de remettre le sujet sur la table. Les sénateurs ont proposé de réduire le délai du droit à l'oubli de dix à cinq ans pour les pathologies cancéreuses, une avancée maintenue par la commission mixte paritaire. Il s'agissait d'une promesse du Président de la République, et je me réjouis qu'elle soit enfin honorée.

Concernant les autres pathologies, la nouvelle rédaction impose aux signataires de la convention nationale relative à l'accès au crédit de se mettre autour de la table dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi : c'est un premier pas, mais il ne garantit pas pour autant que les négociations déboucheront sur une solution mieux-disante pour les malades et anciens malades.

Ce texte permettra, au final, de mieux préserver les consommateurs – notamment les plus fragiles – et de lever certaines barrières à l'accession à la propriété : mon groupe votera donc en faveur de la présente proposition de loi.

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