Intervention de Gérald Darmanin

Séance en hémicycle du mardi 23 janvier 2018 à 15h00
État au service d'une société de confiance — Présentation

Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics :

Tony Chapron a fait davantage, monsieur le député, il a taclé un joueur… Mais c'est un excellent arbitre, par ailleurs !

Le deuxième axe de ce projet de loi, c'est la simplification, qui répond concrètement à l'attente des usagers du service public. Je ne rappellerai qu'un chiffre : cent quinzième sur cent quarante. C'est le rang de la France sur l'échelle de la simplification administrative. De ce point de vue, je crois que tous les gouvernements qui se sont succédé ont une part de responsabilité dans l'empilement des normes et la complexité de notre système. Là encore, je m'en tiendrai à trois mesures essentielles, pour laisser M. le rapporteur exposer les détails du dispositif.

Ce texte introduit l'expérimentation du référent unique, pour que les usagers frappent toujours à la même porte – comme Justine à la CAF. Deuxièmement, nous adaptons les horaires d'ouverture des services publics aux habitudes de vie des Français. Enfin, un autre engagement trouve sa première traduction dans ce texte : le « zéro papier » d'ici à 2022, avec la dématérialisation de l'ensemble des déclarations administratives – schéma auquel je travaille avec Mounir Mahjoubi – , ou encore l'extension par expérimentation du principe « Dites-le-nous une fois », et même « Dites-le-nous une fois pour toutes ».

Cette loi contient également d'autres leviers pour rendre notre réglementation moins complexe, pour les particuliers, comme pour les entreprises : opérations de transparence et information ; lutte contre la surtransposition, ce mal français, auquel les parlementaires eux-mêmes sont parfois attachés ; inversion, enfin, de la manière de faire la loi, puisque nous imposons désormais aux professionnels de la construction – et ce sera aussi le cas pour la petite enfance – un « permis de faire », c'est-à-dire une obligation de résultat, et non plus de moyens. Avouons-le : nous n'avons jamais été très forts dans ce domaine jusqu'à présent.

L'ensemble de ces dispositions a été construit à partir du terrain, grâce à l'aide des parlementaires, que je tiens à remercier et grâce aux très riches débats qui ont eu lieu en commission, après la consultation de représentants du monde socio-professionnel. Le texte a ainsi connu de vraies évolutions, nées du débat parlementaire en commission. Je ne sais pas combien d'heures nous avons consacrées à ce projet de loi, mais je pense que ma présence en commission, ainsi que celle d'Olivier Dussopt, témoignait de l'intérêt du Gouvernement pour ce travail parlementaire de très grande qualité.

Parmi les enrichissements notables, je mentionnerai les nouveaux dispositifs de médiation et les expérimentations autour du référent unique, prévues par ce texte. Je tiens d'ailleurs à souligner que, à l'exception de la Corse et de la Bretagne, toutes les régions de France sont concernées par des expérimentations – pas toujours les mêmes – , et nous sommes d'ailleurs ouverts à ce que chaque territoire de la République puisse faire l'objet d'une expérimentation, afin de réparer les « erreurs géographiques » du Gouvernement.

Il faudra d'abord assurer, après l'adoption de ce texte, un « service après-vote », c'est-à-dire un suivi renforcé pour veiller à ce qu'il soit réellement appliqué. Tel est le sens du conseil de la réforme, dont je sais qu'il est cher à Mme Errante, présidente de la commission spéciale. Il sera créé immédiatement après l'adoption du texte et je souhaite que les parlementaires de tous les bords politiques puissent participer à son action : il veillera notamment à la publication des décrets – même si celle-ci reste une prérogative de l'exécutif, rien n'interdit d'échanger sur ces textes – , il examinera les résultats des différentes expérimentations, afin de ne pas laisser cette tâche à l'administration, laquelle – sait-on jamais ! – pourrait ne pas les juger positivement. Ce conseil pourra enfin organiser des déplacements sur le terrain pour veiller à la mise en oeuvre concrète des dispositions contenues dans ce texte – ce qu'on appelle l'art d'exécution.

J'aimerais, à présent, dire un mot de nos agents publics, car ils seront la clé de la réussite de ce projet de loi. Nous sommes réunis ici pour voter des changements dans nos textes, mais ce qui compte avant tout, ce sont les changements dans les têtes. Or il faut d'abord des moyens. Il est plutôt d'usage que le ministre des comptes publics appelle à la réduction des moyens, mais il se trouve que le projet de loi de finances que l'Assemblée nationale a bien voulu adopter comporte des nouveautés.

On y trouve notamment une ligne budgétaire de 1,5 milliard d'euros, dans le cadre du Grand plan d'investissement, en faveur de la formation des agents publics. Des crédits sont également prévus pour le droit à l'erreur et l'expérimentation : ils seront mobilisés dès l'adoption du texte, c'est-à-dire dès le mois de mars, après que le projet de loi aura été examiné au Sénat – c'est aujourd'hui que les sénateurs doivent désigner le président de la commission spéciale et son rapporteur. À cette somme s'ajoutent 700 millions d'euros, au titre de la mission « Action et transformation publiques ». C'est la première fois, sous la Ve République, qu'un budget est consacré à la transformation publique. Il doit notamment accompagner la dématérialisation et financer un lancement d'appel à projets, qui sera fait très prochainement pour ce travail très important dans chacun des ministères.

Les agents sont les premiers à demander un cadre, mais aussi la possibilité d'innover et la liberté d'accompagner les entreprises et les particuliers. Si la loi doit être générale, son application, elle, doit être particulière. Et, même si la loi de la République doit s'appliquer partout sur le territoire, il est évident que des absurdités administratives doivent être réglées.

Lors d'un récent déplacement dans la circonscription de l'excellent rapporteur général, Joël Giraud, je me suis aperçu, en discutant avec Mme la préfète, que le plus grand lac d'Europe est concerné à la fois par les dispositions de la loi Montagne et par celles de la loi Littoral. Or il est tout à fait impossible, pour Mme la préfète, d'appliquer les deux réglementations en même temps. Le législateur n'a pas prévu cette exception, et c'est bien normal, mais il faudrait laisser aux autorités déconcentrées la possibilité de tenir compte de l'esprit des lois, plutôt que de les soumettre à des règles, dans ce qu'elles ont de plus strict et, parfois, d'absurde.

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