Intervention de Patrice Verchère

Réunion du mercredi 17 janvier 2018 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrice Verchère :

Le SSA avait été le grand oublié de la loi de programmation militaire 2014-2019, avec des crédits de fonctionnement et d'investissement réduits de manière significative. Votre prédécesseur avait indiqué lors d'une audition que le SSA remplissait ses missions avec une grande difficulté – vous semblez le constater également –, et même la Cour des comptes avait tiré la sonnette d'alarme. À l'occasion de son audition par notre commission, le chef d'état-major des armées a déclaré que les suppressions supplémentaires d'effectifs touchant le SSA seraient reportées sur les années 2020-2021. Toutefois et malgré la restructuration que vous poursuivez, il n'est pas certain que le SSA pourra répondre à l'ensemble de ses missions, compte tenu notamment des OPEX qui peuvent être amenées à durer et dont le nombre pourrait augmenter, ou encore du risque d'attentats. Avec cette restructuration, essentiellement liée à des problèmes budgétaires, ne craignez-vous pas de perdre en efficacité alors même que, ainsi que vous l'avez rappelé, nous disposons d'un des meilleurs systèmes au monde ? Ne craignez-vous pas que cette diminution des moyens envoie un signal négatif aux candidats potentiels ? Qu'attendez-vous de la prochaine loi de programmation militaire ? Êtes-vous optimiste quant à une future augmentation de vos moyens ?

Médecin général Maryline Gygax Généro. Vos questions balaient tout le champ des missions du SSA et je vous en remercie. Quid du devenir des HIA ? Les huit HIA sont nécessaires à la réponse au contrat opérationnel. Les ensembles hospitaliers civils et militaires et les partenariats étroits contractés ne constituent en aucun cas une fermeture des hôpitaux militaires puisque la partie militaire va rester bien identifiée au sein de chaque EHCM. Tel est le cas y compris à Bordeaux où le projet comporte, si je puis dire, une sortie de l'hôpital de ses murs, avec l'insertion d'un noyau de 250 personnels au sein de l'EHCM, leur gestion administrative demeurant assurée par l'HIA. Ces partenariats ne sont pas des fermetures. Il faut les comprendre comme une densification. L'accès à un large éventail de patients au sein de l'établissement partenaire est extrêmement utile pour le maintien et le développement des compétences de nos personnels. Même si la constitution des EHCM est complexe avec, comme je l'ai rappelé, de nombreux aspects, notamment juridiques, qui sont encore en cours de construction, cette mise en place avance et ces partenariats sont, selon moi, le seul moyen de répondre de façon concomitante à l'équation de densification et de contraction des effectifs.

Nos hôpitaux consacrent environ 80 % de leur activité à la patientèle civile. C'est en cela qu'ils sont inscrits dans les territoires de santé, et c'est pourquoi il était important, dans le cadre du projet SSA 2020, de faire du service un véritable acteur du système public de santé pour lui permettre, en s'inscrivant dans les filières de soins, d'assurer le recrutement nécessaire au maintien des compétences de ses personnels. C'est un des aspects par lequel l'ouverture sert le recentrage sur la mission opérationnelle.

Les partenariats avec les ARS se sont concrétisés par la signature d'accords-cadres et vont pouvoir s'intensifier grâce aux outils dont va nous doter l'ordonnance SSA-INI, sa publication étant imminente. Elle va nous permettre de passer d'une logique de coopération à une logique de contractualisation avec les ARS, de nous inscrire dans les plans régionaux de santé, et va permettre aux ARS de prendre en compte les besoins de défense dans les autorisations d'activités ou d'équipements délivrées. Pour mieux préparer ces futures relations avec les ARS, nous allons, dans les jours qui viennent, affecter un praticien au sein de l'ARS Auvergne-Rhône-Alpes en tant qu'officier de liaison. Il sera chargé de tisser ces premiers liens avec l'ARS et de préparer les crises aux niveaux territorial et régional grâce à ses connaissances dans la gestion des situations sanitaires exceptionnelles, en lien avec l'organisation territoriale de défense et de sécurité. Cette expérimentation va débuter à Lyon, territoire où nous avons récemment fermé la première direction régionale du SSA. Nous portons beaucoup d'espoirs dans cette expérimentation qui, si elle réussit – et je n'en doute pas –, nous donnera les moyens de généraliser ce type de relations sur tout le territoire, non seulement entre les HIA et les ARS, mais également entre les centres médicaux des armées et ces dernières.

J'en viens aux perspectives de carrière, à la rémunération et à la question de l'attractivité. Nous n'avons actuellement pas de problème quant à l'attractivité du concours de recrutement à l'école de santé des armées. Tout l'enjeu est de s'interroger sur l'identité du médecin militaire aujourd'hui et dans dix ans, à l'issue de la formation des élèves qui rejoignent actuellement l'école. Nous menons un travail prospectif prenant en compte les aspirations des jeunes générations ou encore la féminisation, à laquelle n'échappe pas le SSA comme d'ailleurs l'ensemble du monde de la santé publique. Par ailleurs, un travail de collaboration étroite est en cours avec la direction des ressources humaines du ministère des Armées sur les conditions de rémunération qui doivent certainement être améliorées afin de s'adapter au monde très concurrentiel de la santé publique. Je crois très sincèrement que le SSA reste attractif, de par les missions et les conditions d'exercice qu'il offre. Encore récemment, au Tchad, j'ai vu de jeunes praticiens sortis d'école depuis moins de deux ans qui étaient heureux d'exercer leur coeur de métier. Les conditions très spécifiques d'exercice de ce métier restent donc attractives, y compris vis-à-vis des jeunes générations. À nous d'y veiller par les conditions d'exercice et de rémunération. Le travail est en cours, et je suis personnellement optimiste à ce sujet.

Concernant la PACES, nos élèves-praticiens suivent les mêmes études que les élèves civils et passent les mêmes concours. La valorisation de nos métiers fait partie de la politique d'attractivité et de fidélisation que je souhaite mettre en place. Nous y travaillons avec beaucoup d'énergie, afin de susciter également le recrutement de réservistes qui est vital pour le SSA.

Les liens avec l'Europe constituent un axe en cours de développement et de réflexion, notamment sur le plan opérationnel. Nous avons de très bonnes relations avec le SSA allemand notamment, mais également avec d'autres services européens qui souhaitent mettre en place des coopérations leur permettant de maintenir leurs capacités opérationnelles par des formations communes et par le partage de ce savoir-faire très spécifique de mise en oeuvre d'une chaîne santé complète et autonome dont dispose le SSA français. Cette coopération est déjà une réalité concrète : quatre mois par an, c'est un chirurgien allemand qui, à Djibouti, prend en charge nos blessés au niveau du centre médico-chirurgical. Nous réfléchissons également à la modularité et l'interopérabilité possibles, même si la langue peut effectivement constituer une barrière. Nous travaillons à la formation linguistique de nos praticiens. Au-delà de l'interopérabilité technique, nous travaillons également à des jumelages entre les hôpitaux militaires français et allemands afin de susciter des vocations linguistiques, si l'on peut dire…

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