Intervention de Barbara Pompili

Séance en hémicycle du mercredi 31 janvier 2018 à 15h00
Sureté et sécurité des installations nucléaires — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili, rapporteure de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Monsieur le président, chers collègues, la proposition de résolution visant à créer une commission d'enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires n'est pas la première de cette législature car les groupes de l'opposition ont – pour certains d'entre eux du moins – déjà fait usage de leur droit de tirage, mais c'est la première que nous examinons en séance publique car c'est la première qui émane du groupe majoritaire. Elle témoigne incontestablement d'une volonté de s'emparer de tous les instruments permettant à la représentation nationale d'assurer la fonction d'évaluation et de contrôle qui lui est confiée par l'article 24 de la Constitution. Je suis fière, à ce titre, qu'elle ait recueilli l'unanimité au sein de mon groupe, mais également qu'elle ait été soutenue par des députés sur quasiment tous les bancs de l'hémicycle, ce dont je tiens à les remercier.

Cette volonté commune de travailler sur le sujet traduit bien le débat qui existe aujourd'hui sur la question de la sûreté et de la sécurité nucléaires. Il ne s'agit pas, même si certains voudraient que l'on tombe dans ce travers, d'un débat pour ou contre le nucléaire. Quelles que soient nos opinions sur cette question, tout le monde convient aujourd'hui que les installations nucléaires doivent répondre au plus haut niveau d'exigence en termes de sûreté et de sécurité.

La France est le premier pays au monde en nombre de réacteurs nucléaires en exploitation par habitant, avec 58 réacteurs pour 67 millions de Français. Ces réacteurs produisent plus de 70 % de l'électricité fabriquée dans notre pays. Si nous prenons en compte l'ensemble des installations nucléaires, ce qui inclut les réacteurs arrêtés, les réacteurs de recherche, les usines de transformation, les centres de stockage de déchets et différents autres sites, nous en arrivons à un total de plus de 120 sites. Il faut encore évoquer les transports de matières radioactives, au nombre de 650 par an environ, qui font partie intégrante de la problématique. Se pose également, à l'heure actuelle, la question de l'éventuel prolongement de l'autorisation d'exploitation des réacteurs au-delà des quarante ans pour lesquels ils ont été conçus, avec des interrogations sur la faisabilité technique de ce prolongement.

Au regard de l'importance du parc, les événements récents, qu'il s'agisse des tentatives d'intrusion ou de défaillances signalées, mais aussi du risque d'attentat, n'ont pas manqué de susciter des inquiétudes légitimes auprès de nos concitoyens. La commission d'enquête que nous proposons de créer n'a pas pour objet d'attiser ces inquiétudes ou, à l'inverse, de les mettre sous le tapis : il nous a semblé sain, légitime et démocratique que la représentation nationale s'empare du sujet afin de l'étudier de façon apaisée, responsable, sans tabou ni idée préconçue. Il convient, sur ce sujet comme sur tant d'autres d'ailleurs, de ne pas laisser préempter le débat par les opérateurs, quelle que soit leur qualité, au motif qu'il serait trop technique.

Le rapport que j'ai présenté devant la commission du développement durable s'attache à examiner la recevabilité de la proposition de résolution tant au regard des prescriptions législatives et réglementaires qu'au regard des conditions d'opportunité.

Je ne reviendrai pas sur ces conditions de recevabilité, si ce n'est pour insister sur le fait que la proposition de résolution délimite clairement le champ d'investigation de la commission d'enquête, puisque les notions de sûreté et de sécurité sont parfaitement définies dans le domaine de l'énergie nucléaire : elles visent à la fois la fiabilité technique des installations et les procédures à l'encontre de tout acte malveillant.

S'agissant du critère de recevabilité lié à l'existence ou non de poursuites judiciaires, je vous invite à vous reporter au rapport, puisque j'ai souhaité la plus totale transparence à ce sujet. Il comprend en effet, en annexe, les réponses de la garde des sceaux qui confirment que des poursuites judiciaires ont été engagées.

Comme vous le savez tous, mes chers collègues, il nous est bien évidemment interdit de nous immiscer dans ces procédures. Ainsi, il ne nous sera pas possible, par exemple, de travailler sur le déroulement de la journée du 12 octobre 2017, qui a vu des militants de Greenpeace s'introduire dans la centrale de Cattenom. Cela ne nous interdit pas, en revanche, d'étudier les conditions de sécurité face aux risques d'attaques terroristes, qu'il s'agisse d'intrusions, de cyberattaques ou d'utilisation de drones. J'ajoute que c'est cette même démarche de respect du principe de séparation des pouvoirs qui a pu permettre, entre autres nombreux exemples, la création d'une commission d'enquête sous la précédente législature, demandée par le groupe Les Républicains sur les actes terroristes de janvier et de novembre 2015. Il s'agissait non pas d'étudier le déroulement de ces attaques ou d'établir des responsabilités, mais bien d'analyser les conditions de réponse de l'État face à elles.

Place au débat maintenant, et surtout, je l'espère, place au travail parlementaire ! C'est l'honneur de la représentation nationale que de s'emparer de ces questions, et j'invite les députés de tous les groupes à rejoindre cette commission d'enquête pour participer à ce qui s'annonce être six mois d'un travail intense mais essentiel pour notre démocratie.

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